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Les Roumains votent dimanche pour élire leur Parlement, avec à la clé une possible victoire de l'extrême droite et un basculement stratégique de cet État voisin de l'Ukraine, membre de l'UE et de l'Otan.
En quelques jours, le pays d'Europe orientale a vu se succéder les rebondissements, de l'arrivée surprise du candidat d'extrême droite Calin Georgescu au premier tour de la présidentielle aux accusations des autorités quant à l'intégrité des élections.
Elles ont mis en cause l'influence russe dans le contexte régional actuel et le rôle de la plateforme TikTok. Au point que la Cour constitutionnelle a ordonné un nouveau comptage, toujours en cours.
En cette journée de fête nationale en Roumanie, les bureaux de vote seront ouverts jusqu'à 21H00 (19H00 GMT). Les sondages de sortie des urnes seront publiés peu après.
Florentina Noja, ingénieure de 55 ans, a décidé de donner sa voix à "des jeunes candidats, moins endoctrinés par le système". "Nous avons besoin de repartir de zéro", dit-elle à l'AFP sous un ciel nuageux à Bucarest, tout en redoutant que la Roumanie se détourne du chemin européen.
Après trois décennies d'une vie politique structurée par deux grands partis, les analystes prédisent un hémicycle fragmenté et des négociations difficiles pour former un gouvernement.
- Choix "existentiel" -
L'extrême droite, disséminée entre plusieurs formations qui ont en commun de s'opposer au soutien à Kiev au nom de la "paix" et de défendre des "valeurs chrétiennes", est créditée de plus de 30% d'intentions de vote.
Depuis la chute du communisme en 1989, le pays n'a jamais connu pareille percée, mais la colère des 19 millions d'habitants couve devant les difficultés économiques et la guerre de l'autre côté de la frontière.
George Sorin, économiste de 45 ans, a fait son choix: il votera pour un parti nationaliste. Le Parlement actuel "n'a fait que servir les intérêts de l'Ukraine en approuvant toute une série d'aides sans rien expliquer", oubliant "ceux de la Roumanie", dit-il, critiquant aussi "la servilité" à Bruxelles.
Ce bord politique est représenté par AUR (Alliance pour l'unité des Roumains), dont le candidat George Simion a recueilli près de 14% à la présidentielle, mais aussi par SOS Romania, dirigé par la tempétueuse candidate favorable au Kremlin Diana Sosoaca, ou encore le tout nouveau Parti de la jeunesse (POT).
Dans le camp pro-européen adverse, les centristes d'USR espèrent tirer leur épingle du jeu après la deuxième place décrochée à la présidentielle par leur cheffe de file Elena Lasconi.
Grands perdants dimanche dernier, les sociaux-démocrates et les libéraux, au pouvoir dans une coalition, ont appelé à choisir "entre la stabilité et le chaos", selon le message lancé aux urnes par le Premier ministre sortant Marcel Ciolacu.
Dans le même sens, le président Klaus Iohannis a qualifié ces élections de "cruciales pour la direction de la Roumanie dans les années à venir".
Rester "un pays de liberté", "une nation européenne moderne" ou "sombrer dans un isolement néfaste et renouer avec un passé sombre", voilà "le choix existentiel auquel nous sommes confrontés", a-t-il averti.
- Défiance -
Le scrutin se déroule dans un climat fébrile après la décision de la justice de recompter les bulletins du premier tour de la présidentielle.
En votant dès l'ouverture à Focsani, à près de trois heures de route de la capitale, M. Simion a dénoncé la tentative désespérée des partis traditionnels de "s'accrocher au pouvoir". "Ils n'écoutent pas la voix des Roumains et veulent rejouer le match pour obtenir les résultats qu'ils veulent".
"Ce qui est en train de se passer ne me semble pas très démocratique", abonde Gina Visan, infirmière de 40 ans.
Pour Septimius Parvu, coordinateur du groupe de réflexion Expert Forum (EFOR), nul doute que cette décision "mine la confiance" dans les institutions et est de nature à "alimenter" le vote d'extrême droite.
Les États-Unis se sont même immiscés dans le débat, espérant qu'aucune décision de l'entre-deux tours ne vienne "mettre en péril la crédibilité du processus électoral" et "ternir" la "solide réputation de la Roumanie comme partenaire démocratique fiable", selon une déclaration de son ambassadrice à Bucarest, Kathleen Kavalec.
Y.Keller--NZN