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C'est un chemin aux ornières trompeuses. Mais Jacky Larroque ne risque pas de s'y embourber: il connaît bien ces terres sauvages du Couserans, en Ariège, qu'il sillonne depuis plus de trente ans pour piéger rats, taupes et autres fouines causant des dégâts.
Se faufilant dans les bois, ombre agile et silencieuse, il sait repérer ici le terrier d'un renard, là les déjections toutes fraîches d'une martre, plus loin l'empreinte nette d'une patte de blaireau. "C'est un passage, murmure-t-il. Les animaux empruntent régulièrement les mêmes sentiers. Il suffit de savoir regarder."
Peu bavard et l'oeil vif, ce piégeur agréé de 71 ans, retraité d'un poste de mécanicien dans une fabrique de papier, intervient sur demande lorsqu'un ragondin menace de faire effondrer un pont en abîmant les berges d'une rivière, ou qu'une fouine dévore la laine de verre isolante d'une maison.
"Je ne piège jamais pour le plaisir. Un particulier ou une collectivité me contacte et je me rends sur place", explique Jacky Larroque à l'AFP.
Il connaît chaque animal des forêts et cours d'eau du Couserans et fait corps avec cette campagne où il a grandi, heureux de contribuer à l'équilibre de la nature par une forme de régulation des espèces invasives ou classées nuisibles.
Car nul ne peut piéger librement. Un agrément préfectoral est obligatoire, après une formation à un savoir-faire ancestral dispensée par un organisme reconnu: seize heures réparties entre théorie (connaissance des espèces, respect de la législation) et pratique (manipulation et pose des pièges, gestes de sécurité).
"Une quarantaine d'agréments sont délivrés chaque année" dans le département, précise Michel Dedieu, président de l'Association Joseph Artigues des piégeurs agréés de l'Ariège (AJAPAA 09), qui sont des bénévoles et dont Jacky Larroque est l'un des membres.
Ce jour-là, il part contrôler des pièges posés la veille au soir dans un champ miné par des taupes et des campagnols. A l'aide d'une grosse cuillère, il dégage la terre de l'une des galeries de la taupinière, en extrait un piège et l'animal qui s'y est pris.
Au volant de sa vieille 4L qui cahote, légère, dans les chemins boueux, Jacky Larroque pousse plus loin. En quelques minutes, il prépare un piège à collet: avec son couteau, il taille deux brindilles, puis les positionne à l'entrée d'un terrier, en évitant le plus possible de les manipuler.
"Si l'animal sent mon odeur, il ne se laissera pas avoir."
A.Weber--NZN