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Renforcer un "pilier démocratique": le Parlement a définitivement adopté mercredi une proposition de loi visant à mieux protéger et accompagner les lanceurs d'alertes.
Le texte issu d'un accord entre députés et sénateurs a fait l'objet d'un ultime vote favorable à l'unanimité au Sénat, bouclant trois mois de parcours législatif.
La proposition de loi du député Sylvain Waserman (MoDem) conforte le rôle de contre-pouvoir de ces personnes qui paient souvent cher leur combat - intimidations, licenciement, procédures judiciaires...
Du Mediator qui a secoué le monde pharmaceutique aux "Luxleaks" dans celui de la finance, nombre d'affaires ont été mises sur la place publique par ces lanceurs d'alerte, qui décrivent souvent leur engagement comme un long calvaire au résultat incertain.
Travaillée avec le ministère de la Justice, le Conseil d’État et les associations, la nouvelle loi définit plus précisément leur statut, oriente leurs démarches, renforce leurs droits et ceux des personnes ou associations qui les assistent, facilite leur soutien financier et psychologique, entre autres.
Elle transpose en droit français une directive européenne de 2019, en allant au-delà de ce qu'exige le droit européen, et corrige des imperfections de la loi pionnière, dite "Sapin II", de 2016, peu utilisée à ce jour.
"Cette loi traite chacune des étapes de la vie des lanceurs d’alerte. Leur protection devient un pilier de nos démocraties, à côté de la liberté de la presse", fait valoir M. Waserman.
Ce texte "offre un cercle de protection autour du lanceur d'alerte", s'est félicitée devant le Sénat la secrétaire d'Etat Sarah El Haïry, au nom du gouvernement.
"On a pu obtenir des avancées significatives pour améliorer leur situation, leur protection et le fait qu’ils puissent lancer l’alerte avec un peu plus d’assurance", a déclaré mercredi à la presse Glen Millot, de l’association La Maison des Lanceurs d’Alerte, très active en faveur de cette loi.
Le lanceur d'alerte est défini comme "une personne physique qui signale ou divulgue, sans contrepartie financière directe et de bonne foi, des informations portant sur un crime, un délit, une menace ou un préjudice pour l’intérêt général", ou une violation d'un engagement international de la France.
- "procédures bâillons" -
La nouvelle législation prévoit certaines exceptions, comme les faits et informations couverts par le secret de la défense nationale, celui des délibérations judiciaires ou le secret médical.
Le texte précise et diversifie les canaux internes à l'entreprise, ou externes, à la disposition des lanceurs d'alerte pour valider leur démarche.
La loi Sapin II était en effet jugée imparfaite car privilégiant le signalement interne auprès de l'employeur, une modalité qui peut être dissuasive ou contreproductive.
Le lanceur d'alerte pourra donc désormais s'il le souhaite passer directement par un canal externe - Défenseur des droits, justice, autorité administrative ou personne morale habilitée...
Le Défenseur des droits aura un adjoint spécialement chargé d'assister les lanceurs d'alertes.
La justice disposera également d'outils supplémentaires pour faciliter la défense de leurs droits.
Les "facilitateurs", qui accompagnent le lanceur d'alerte, seront eux aussi mieux reconnus et protégés.
Le texte prévoit également des sanctions contre ceux qui chercheraient à étouffer leur action en multipliant des procédures hostiles (procédures "bâillons"), ou leur faire subir des représailles.
Mais la loi entend aussi éviter l'écueil de procédures d'alerte "hâtives, infondées ou abusives", a souligné la rapporteure au Sénat, Catherine Di Folco (LR)
Mme El Haïry a aussi souligné la nécessité de protéger "ceux qui oeuvrent au bien commun, et ne pas inciter à des comportements malhonnêtes, à des règlements de comptes".
Contrairement au souhait des députés de La France Insoumise (LFI), qui ont notamment plaidé le cas du fondateur de Wikileaks, l'Australien Julian Assange menacé d'être extradé de Grande-Bretagne vers les Etats-Unis, le texte n'a pas été étendu aux lanceurs d'alerte étrangers.
La nouvelle loi a néanmoins reçu le soutien de l'Américaine Frances Haugen, ex-informaticienne de Facebook venue en novembre dernier au Palais Bourbon dénoncer les dérives des géants de l'internet.
P.E.Steiner--NZN