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Le président russe Vladimir Poutine s'est déclaré jeudi déterminé à poursuivre l'offensive contre l'Ukraine "sans compromis", et les forces russes pilonnaient plusieurs villes stratégiques, malgré le début de nouveaux pourparlers entre Kiev et Moscou.
Dernier témoignage de ces frappes meurtrières, celles qui ont fait neuf morts et quatre blessés en visant deux écoles et des habitations de la ville ukrainienne de Tcherniguiv (nord), selon le gouverneur local.
L'intensification de l'offensive russe, une semaine exactement après le début de l'attaque, coïncide avec de nouveaux pourparlers russo-ukrainiens, qui ont débuté peu avant 15H00 GMT à la frontière bélarusso-polonaise.
"La Russie a l'intention de poursuivre sans compromis son combat contre les membres des groupes nationalistes qui commettent des crimes de guerre", a déclaré M. Poutine lors d'un entretien téléphonique avec son homologue français Emmanuel Macron, selon un compte rendu du Kremlin.
Il a répété son exigence d'une démilitarisation et d'un statut neutre pour l'Ukraine, avant d'avertir: "Toute tentative de gagner du temps par les négociations ne mènera qu'à l'ajout d'exigences supplémentaires vis-à-vis de Kiev".
Le président français, qui disait la veille encore vouloir "garder le contact" avec son homologue russe, estime après l'appel que "le pire est à venir" et que M. Poutine veut "prendre le contrôle" de toute l'Ukraine, selon l'Elysée.
Un peu plus tôt, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait promis de faire payer les Russes pour toutes les pertes causées, afin de "reconstruire chaque immeuble, chaque rue, chaque ville".
Des responsables ukrainiens ont confirmé que l'armée russe avait pris dans la nuit de mercredi à jeudi le contrôle d'une grande ville, Kherson, métropole de 290.000 habitants proche de la péninsule de Crimée, après de violents bombardements.
Le chef de l'administration régionale, Guennadi Lagouta, a appelé sur Telegram les habitants à rester chez eux, indiquant que "les occupants (russes) sont dans tous les quartiers de la ville et très dangereux".
- "Blocus" de Marioupol
Plus à l'est, à Marioupol, le maire a accusé la Russie de vouloir assiéger la ville.
"Ils ont détruit les ponts, détruit les trains pour nous empêcher de sortir nos femmes, enfants et vieillards (...) Ils cherchent à imposer un blocus, comme à Léningrad", la ville soviétique redevenue aujourd'hui Saint-Péterbourg, assiégée par les nazis, a déclaré Vadym Boïtchenko sur Telegram.
Ce grand port ukrainien de la mer d'Azov, site clé pour permettre aux forces russes arrivant du Donbass, au nord-est, et de Crimée, au sud-ouest, de se rejoindre, "résiste" pour l'instant, selon l'armée ukrainienne.
A l'autre bout du pays, dans le nord-est près de la frontière russe, la grande ville de Kharkiv, frappée par des bombardements meurtriers mardi et mercredi, a été pilonnée toute la nuit, selon les autorités régionales.
Et à 200 km au sud de Kharkiv, le centre industriel de Dnipro, fort d'un million d'habitants et épargné pour l'instant, se préparait à un assaut russe. L'AFP a vu des habitants entasser des sacs de sable et préparer des cocktails Molotov.
Des troupes russes se trouvaient aussi près de Zaporojie, à 200 km au sud de Dnipro, où se trouve la plus grande centrale nucléaire ukrainienne. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), gendarme onusien du nucléaire, a adopté jeudi une résolution appelant Moscou à "cesser immédiatement les actions contre les sites nucléaires ukrainiens".
A Kiev, où de fortes explosions ont été entendues dans la nuit de mercredi à jeudi, les habitants qui n'ont pas fui se préparent depuis des jours à un assaut. Des milliers de femmes et enfants dorment depuis plusieurs nuits dans le métro, transformé en abri antiaérien.
A 150 km à l'ouest de la capitale, à Jytomyr, Oleg Roubak vouait Vladimir Poutine à l'"enfer pour l'éternité", après une frappe mardi soir qui a tué sa femme et détruit sa maison.
"Je veux que le monde entier écoute mon histoire", a-t-il dit à l'AFP. Une histoire faite d'un bonheur simple jusqu'à ce que l'invasion russe la fasse voler en éclats.
- Couloirs humanitaires -
Dans ces conditions, la délégation ukrainienne aux pourparlers entendait réclamer, a minima, des couloirs humanitaires pour évacuer les civils, a indiqué sur Facebook son chef, David Arakhamia.
La veille, le chef de la délégation russe, Vladimir Medinski, avait suggéré que les discussions porteraient sur un cessez-le-feu.
De premières négociations lundi n'avaient donné aucun résultat tangible. Kiev réclamait l'arrêt immédiat de l'invasion, tandis que Moscou semblait attendre une reddition.
Les Etats-Unis "soutiendront les efforts diplomatiques" pour obtenir un cessez-le-feu avec Moscou, même si "c'est beaucoup plus difficile d'y parvenir quand les tirs résonnent et les chars avancent", a déclaré le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken.
"Des centaines sinon des milliers de civils ont été tués et blessés", a-t-il déploré. Personne n'a avancé jusqu'ici d'estimation pour le bilan global du conflit.
M. Blinken entamait jeudi une tournée incluant Pologne, pays baltes et Moldavie.
Cette dernière, qui n'est membre ni de l'UE ni de l'Otan et compte une région séparatiste russe, craint d'être la prochaine cible russe. Tout comme la Géorgie qui, attaquée militairement par la Russie en 2008, a déposé jeudi sa candidature pour intégrer l'UE.
- Un million de réfugiés -
Le pilonnage meurtrier des villes ukrainiennes suscite une vive émotion dans le monde, où s'enchaînent manifestations et élans de solidarité avec les Ukrainiens.
Le chef humanitaire de l'ONU, Martin Griffiths, a indiqué jeudi avoir récolté 1,5 milliard de dollars d'aide d'urgence pour l'Ukraine, et les cloches de cathédrales à Paris, Berlin, Madrid ou Vienne ont sonné à 11h00 GMT pour l'Ukraine.
Plus d'un million de personnes ont déjà fui l'Ukraine, selon les derniers chiffres du Haut commissariat aux réfugiés de l'ONU, surtout vers la Pologne, la Hongrie, la Roumanie et la Moldavie.
Certains commencent aussi à arriver à Berlin depuis Varsovie, en train. La maire de la capitale allemande, Franziska Giffey, s'attend à prendre en charge jusqu'à 20.000 réfugiés.
L'isolement de la Russie est apparu clairement mercredi à l'Assemblée générale des Nations unies: les 193 pays membres ont voté à une écrasante majorité une résolution qui "exige que la Russie cesse immédiatement de recourir à la force contre l'Ukraine". Cinq pays s'y sont opposés, 35 s'abstenant, dont la Chine.
Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), le Britannique Karim Khan, a annoncé mercredi soir l'"ouverture immédiate" d'une enquête pour crimes de guerre contre la Russie.
- Effondrement du rouble -
Les sanctions économiques infligées par le camp occidental à Moscou et aux proches de Poutine sont de plus en plus dures.
L'UE a confirmé que sept banques russes seraient, à compter du 12 mars, exclues du système de messagerie Swift, un rouage-clé de la finance internationale. La Banque mondiale a coupé tous ses programmes d'aide en Russie et au Bélarus, tandis que le Canada infligeait jeudi des droits d'importation de 35% sur les produits russes et bélarusses.
Les agences de notation financière Fitch et Moody's ont rétrogradé la Russie dans la catégorie des pays risquant de ne pas pouvoir rembourser leur dette.
Après avoir perdu plus du tiers de sa valeur en devises étrangères, le rouble plongeait à nouveau de plus de 11% jeudi matin.
Moscou multiplie les mesures pour défendre son économie, mais aussi pour étouffer toute voix opposée à la guerre: la radio indépendante Ekho Moskvy, a dû acter sa fermeture jeudi après avoir été interdite d'antenne, et la chaîne de télévision internet d'opposition Dojd, dont l'accès avait été également bloqué par le régulateur russe, a annoncé suspendre son travail.
Conséquence de l'isolement économique de la Russie, les prix des hydrocarbures et de l'aluminium, dont Moscou est un gros exportateur, continuent à s'envoler. Le baril de pétrole WTI dépassait les 115 dollars, un record depuis 2008.
La Russie est aussi désormais quasi-bannie du monde sportif et culturel. Dernière mesure d'exclusion en date: le promoteur du championnat du monde de F1 a annoncé l'annulation des Grand Prix en Russie.
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W.F.Portman--NZN