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L'Ukraine peut, si elle a les "bons équipements", "gagner" la guerre contre la Russie, que Washington souhaite suffisamment "affaiblie" pour qu'elle ne lance plus d'invasion comme celle qu'elle mène depuis le 24 février, a déclaré lundi le chef du Pentagone au retour d'une visite à Kiev avec le secrétaire d'Etat américain.
"La première chose pour gagner, c'est de croire que l'on peut gagner. Et ils sont convaincus qu'ils peuvent gagner", a dit Lloyd Austin à quelques journalistes à propos des Ukrainiens. "Ils peuvent gagner s'ils ont les bons équipements, le bon soutien", a-t-il ajouté, au lendemain de son déplacement, le premier de ministres américains depuis le début du conflit le 24 février.
"Nous voulons voir la Russie affaiblie à un degré tel qu'elle ne puisse pas faire le même genre de choses que l'invasion de l'Ukraine", a encore déclaré le ministre américain de la Défense, après avoir rencontré dimanche le président Volodymyr Zelensky. "Elle a déjà perdu beaucoup de capacités militaires, et beaucoup de troupes pour être franc, et nous ne voudrions pas qu'elle puisse rapidement reconstituer ces capacités".
Les Etats-Unis - qui ont aussi annoncé une nouvelle aide militaire de 700 millions de dollars, dont quelque 400 millions pour aider des pays d'Europe de l'est ayant fourni des armes à l'Ukraine - ont accéléré dernièrement leurs livraisons d'équipements militaires à l'Ukraine.
Ils lui livrent désormais des armes lourdes, afin de résister à l'offensive russe qui se concentre sur l'est et le sud du pays, après que les troupes de Moscou eurent échoué dans la région de Kiev, dont elles se sont retirées fin mars.
Le président Zelensky, qui ne cesse d'appeler ses partenaires occidentaux à fournir plus d'armes offensives à Kiev, a remercié Washington, le peuple américain et le président Joe Biden "personnellement", pour leur soutien.
Il a souligné que l'aide militaire américaine "inédite", d'un montant total de 3,4 milliards de dollars, était "la contribution la plus importante au renforcement des capacités de défense ukrainienne."
- Retour des diplomates américains -
Les Etats-Unis se montrent beaucoup plus prudents que plusieurs pays européens, qui ont déjà rouvert leurs ambassades à Kiev, dont la France.
La visite des dirigeants américains a revêtu une valeur symbolique d'autant plus importante qu'elle coïncidait avec la Pâque orthodoxe, synonyme d'espoir pour beaucoup de fidèles.
Malgré des appels répétés à une trêve pour la Pâque orthodoxe dimanche, les combats se sont poursuivis tout le week-end dans l'est et le sud de l'Ukraine.
L'ONU avait notamment appelé en vain à une trêve "immédiate" à Marioupol, port stratégique de la mer d'Azov presque entièrement contrôlé par l'armée russe, afin de permettre l'évacuation de quelque 100.000 civils encore coincés dans la ville en ruines.
Les bombardements et les combats ont déjà coûté la vie à plus de 20.000 civils à Marioupol, selon le maire Vadim Boïtchenko. Les Ukrainiens accusent les Russes d'empêcher toutes les évacuations vers des zones plus calmes d'Ukraine, et de n'autoriser des départs que vers la Russie ou des localités ukrainiennes occupées par les Russes.
Les forces russes continuaient lundi à bombarder, avec missiles et artillerie, le vaste complexe métallurgique d'Azovstal, où sont retranchés les derniers combattants ukrainiens mais aussi près de 1.000 civils, selon l'état-major ukrainien.
Un conseiller du président Zelensky a déclaré dimanche que l'Ukraine avait proposé à la Russie de tenir "une session spéciale de pourparlers juste à côté du site d'Azovstal", indiquant "attendre la réponse".
L'armée ukrainienne a aussi affirmé lundi avoir repoussé une série d'attaques russes dans les régions de Donetsk et Lougansk, dans le Donbass, où de nombreuses localités, comme Roubijné, sont quotidiennement sous les bombes.
A Lyssytchansk, sur la ligne de front du Donbass, un retraité ukrainien, prénommé Mykola, observe tous les jours à la jumelle, depuis sa maison-tourelle, la lente progression des forces russes.
Si lui se dit prêt à résister "jusqu'au bout", il reconnaît qu'une partie de la population de cette région à l'histoire complexe ne verrait pas d'un mauvais oeil la prise de contrôle du Donbass par les Russes. C'est l'un des objectifs affichés par Moscou, tout comme le contrôle total du sud de l'Ukraine, où les combats sont aussi quotidiens, notamment dans la région entre Kherson et Mykolaïv.
Côté russe, un grand dépôt de carburant était lundi en flammes à Briansk, ville située à 150 km de la frontière ukrainienne et servant de base logistique aux forces russes, selon Moscou. Si les Russes accusent régulièrement les Ukraniens d'attaques sur des localités frontalières, les autorités n'ont pas précisé immédiatement les raisons de l'incendie.
L'agence de presse Interfax a indiqué qu'un deuxième dépôt de carburant était en flammes dans la même région, mais cette information n'a pas pu être confirmée dans l'immédiat. Moscou a aussi indiqué avoir abattu lundi deux drones ukrainiens près de la frontière.
- "J'espère que ca va finir" -
Une partie de la ville de Kharkiv, deuxième ville d'Ukraine, est aussi quotidiennement sous les bombes, obligeant les civils à dormir depuis des semaines dans des souterrains.
"C'était effrayant la première semaine, après on s'est habitué", a raconté à l'AFP Alex, 14 ans, un des enfants qui s'abritent quotidiennement dans un parking souterrain de la ville. "En semaine, le matin, je rentre chez moi pour faire mes devoirs, puis je reviens ici pour déjeuner, jouer à des jeux, aux cartes, au téléphone (...) Nos parents ne nous disent pas les détails de la guerre. Nous savons que des missiles frappent des bâtiments, des terrains de jeux. Nous savons que la guerre continue", a-t-il expliqué.
J'espère que ça va finir, que les présidents (ukrainien et russe) s'accorderont pour obtenir la paix", a-t-il ajouté.
Mais beaucoup s'attendent désormais à une guerre longue, alors que les négociations engagées entre Moscou et Kiev semblent dans l'impasse et que la guerre a déjà jeté sur les routes près de 13 millions de personnes, dont plus de 5 millions ont fui l'Ukraine, selon l'ONU.
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres était dans ce contexte attendu lundi en Turquie, pays qui tente de jouer les médiateurs dans le conflit, avant de se rendre mardi, à Moscou, puis à Kiev.
burx-cat/uh/at
S.Scheidegger--NZN