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Etranglé par une montagne de dettes envers la Chine, le Laos communiste s'efforce de maîtriser une inflation galopante. Les prix des denrées alimentaires ont tellement augmenté qu'un nombre croissant de ménages peine à se nourrir correctement.
Sur un marché de Vientiane, plusieurs commerçants ont déclaré à l'AFP n'avoir jamais vu aussi peu d'activité, alors que les familles ont vu la valeur de leur argent s'effondrer depuis la pandémie de Covid-19.
Le Covid-19 et l'invasion de l'Ukraine par la Russie ont fait exploser les prix dans le monde entier et le Laos s'est révélé incapable de freiner l'inflation.
Selon la Banque asiatique de développement (BAD), les prix ont grimpé de 23 % en 2022, de 31 % l'année dernière et devraient progresser d'encore 25 % en 2024.
Les familles, en particulier, ont été durement touchées, le coût des produits de base comme le riz, le sucre, l'huile et le poulet ayant doublé l'année dernière.
Au marché de Vientiane, un marchand d'or a déclaré que les clients venaient auparavant acheter des colliers, des bagues et des boucles d'oreilles pour des occasions spéciales, mais qu'aujourd'hui, tout ce qu'ils voulaient, c'était vendre leurs objets de valeur pour se procurer de l'argent.
"Il m'arrive de rester assis toute la journée sans que personne n'achète mon or", a témoigné le mois dernier auprès de l'AFP cet homme de 45 ans, qui souhaite rester anonyme car au Laos, pays autoritaire dirigé par un parti unique, il est risqué de parler à des médias étrangers.
- Dette "insoutenable" -
Malgré trois décennies de croissance économique constante, le Laos reste l'un des pays les plus pauvres d'Asie, avec des infrastructures de transport limitées et une main-d'œuvre peu qualifiée, principalement employée dans l'agriculture.
L'espérance de vie n'est que de 69 ans et, selon la Banque asiatique de développement, près d'un enfant de moins de cinq ans sur trois souffre d'un retard de croissance dû à la malnutrition, soit l'un des taux les plus élevés au monde.
Ces dernières années, le gouvernement a emprunté des milliards de dollars à son voisin chinois pour financer une ligne ferroviaire à grande vitesse de 6 milliards de dollars et une série de grands barrages hydroélectriques, dans le but de devenir la "batterie" de l'Asie du Sud-Est.
La Banque mondiale a averti dans un rapport publié la semaine dernière que la dette publique - plus de 13 milliards de dollars, soit 108 % du PIB - était "insoutenable".
En faisant baisser la valeur du kip, la monnaie nationale qui a perdu la moitié de sa valeur par rapport au dollar en 2022 et près d'un cinquième au cours des neuf premiers mois de 2024, le service de la dette alimente l'inflation .
"Compte tenu de la forte dépendance du Laos à l'égard des importations, la dépréciation du kip a fait grimper les prix à la consommation et l'inflation, comprimant la demande intérieure et ralentissant la reprise économique", a déclaré à l'AFP Poh Lynn Ng, économiste au Bureau de recherche macroéconomique de l'ASEAN+3 (AMRO).
Des paiements d'intérêts totalisant 1,7 milliard de dollars sont dus en 2024 et une moyenne de 1,3 milliard de dollars pour les trois prochaines années, ce qui érode les réserves de change du Laos.
L'AFP a contacté le ministère laotien des finances pour obtenir un commentaire, mais n'a pas reçu de réponse.
- Réponse "trop lente" -
Dans ce contexte, la Banque du Laos a relevé ses taux d'intérêt et, en août, le gouvernement a lancé un plan visant à ramener l'inflation en dessous de 20% d'ici à décembre.
Cependant, pour Vivat Kittiphongkosol, de la Joint Development Bank Laos, le gouvernement a été "trop lent" à réagir.
La Banque mondiale estime que le gouvernement a apporté une certaine stabilité à ses finances, mais principalement grâce à des reports de dettes et à la limitation des dépenses en matière de santé, d'éducation et de protection sociale.
Alex Kremer, directeur de la Banque mondiale pour le Laos, a prévenu que ces mesures d'austérité auraient des conséquences néfastes à long terme.
A la place, la Banque mondiale plaide pour une augmentation des recettes en réduisant les avantages fiscaux et pour une restructuration de la dette.
Face à cette situation difficile, le pays peut néanmoins toujours compter sur Pékin, qui fait "tout son possible pour aider le Laos à alléger le fardeau de sa dette", selon un porte-parole du ministère chinois des affaires étrangères.
Bien que petit, le Laos est en effet important pour la Chine, à la fois sur le plan politique et en tant qu'étape clé de l'itinéraire des "Nouvelles routes de la soie".
T.L.Marti--NZN