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Le parti au pouvoir en Namibie depuis l'indépendance fait face mercredi à ses élections les plus incertaines et sa candidate Netumbo Nandi-Ndaitwah, en position de devenir la première femme présidente du pays, pourrait être contrainte à un second tour inédit.
Les urnes, bleues pour la présidentielle, jaunes pour les législatives, doivent se remplir de 07H00 (05H00 GMT) à 21H00 (19H00 GMT) locales au gré des suffrages du 1,5 million d'électeurs inscrits, dont le dépouillement est attendu au plus tard samedi, d'après la commission électorale.
Surnommée "NNN", la candidate du parti au pouvoir, la Swapo, qui à 72 ans a connu la lutte pour la libération, affronte la concurrence de l'ex-dentiste et avocat Panduleni Itula. Il a fondé en 2020 sa propre formation, le parti des patriotes indépendants (IPC).
Chômage massif, inégalités persistantes et renouvellement des générations ont érodé le soutien à la Swapo sur ce territoire désertique d'Afrique australe parmi les premiers fournisseurs mondiaux d'uranium.
Dissident de la Swapo âgé de 67 ans, Panduleni Itula avait remporté 29,4% des suffrages à la précédente élection présidentielle sans parti sur lequel s'appuyer. Feu le président Hage Geingob avait été réélu avec 56% des voix.
"Ce jour s'annonce comme celui de la jeunesse qui doit changer la gouvernance de cette nation", a-t-il lancé samedi à ses partisans lors d'un meeting dans le nord du pays.
Si les élections législatives se tiennent à la proportionnelle, un second tour à la présidentielle est pour la première fois une "option assez réaliste", selon Henning Melber, chercheur à l'Institut nordique de l'Afrique d'Uppsala (Suède).
Celui-ci doit se tenir dans les 60 jours suivant l'annonce des résultats définitifs, au plus tard, selon la loi électorale.
"J'espère du changement car certains leaders politiques sont corrompus", estime Onesmus Nanyemba, 27 ans, qui travaille dans la finance et est venu en électeur "neutre" au meeting de la Swapo à Windhoek dimanche.
"L'abondante activité minière ne se traduit pas vraiment par une amélioration des infrastructures, ni par des opportunités d'emploi", observe l'analyste indépendante Marisa Lourenço. Ce qui "alimente une grande part de la frustration des jeunes", dont 46% des 18-34 ans étaient sans emploi en 2018, selon les derniers chiffres officiels publiés.
Après trois décennies de règne de la Swapo, mouvement d'inspiration marxiste du temps de la lutte, la Namibie demeure, après l'Afrique du Sud, le deuxième pays le plus inégalitaire de la planète, selon la Banque mondiale.
- Dégagisme régional -
L'Organisation du peuple du Sud-Ouest africain (Swapo), qui a combattu pour l'indépendance du pays, sous le joug jusqu'en 1990 de l'Afrique du Sud époque apartheid, peut craindre le même sort que ses partis de libération frères dans la région.
Un vent de changement souffle depuis quelques mois sur le sud du continent africain à la population très jeune. Dans la foulée du revers électoral de l'ANC en Afrique du Sud, dépossédé de sa majorité absolue, le BDP au pouvoir depuis 1966 au Botswana a été balayé.
Sans oublier des semaines de contestation acharnée au Mozambique après la victoire proclamée du Frelimo, le parti au pouvoir depuis l'indépendance en 1975, dans des élections marquées par de nombreuses irrégularités d'après les observateurs internationaux.
Ces partis n'ont plus le même attrait auprès des "born frees", ces jeunes nés après la libération de leur pays. A l'image du reste du continent, la Namibie affiche une population juvénile: 63% de ses 3 millions d'habitants ont moins de 30 ans.
"Ce n'est pas seulement qu'ils sont jeunes et qu'ils n'ont pas connu la libération, c'est qu'ils subissent de plein fouet les effets de la crise économique", observe Nic Cheeseman, spécialiste de politique africaine à l'université de Birmingham.
"Les problèmes touchant la Namibie, comme d'autres pays africains, modifient radicalement le paysage politique; les élections portent désormais sur des enjeux basiques de gagne-pain", analyse auprès de l'AFP Tendai Mbanje, chercheur au Centre africain pour la gouvernance.
Raison pour laquelle "NNN" promet dans son programme la création en cinq ans de plus de 250.000 emplois. Mais Netumbo Nandi-Ndaitwah a averti dimanche lors de son ultime meeting que "le monde de l'entreprise ne peut prospérer que si la politique est stable".
M.J.Baumann--NZN