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Depuis les plus grands bureaux de la banque en ligne Starling, on ne voit pas les gratte-ciel de la City mais le paysage urbain plus modeste de Cardiff, capitale du Pays de Galles, qu'Anne Boden connaît bien.
"Nous avons de bonnes universités et de grands talents à Cardiff, nous les utilisons pour créer quelque chose de spécial pour nos clients", revendique la patronne de la banque britannique à l'occasion de l'inauguration de ce site où près de la moitié de ses 1.800 employés travaillent.
Avec près de 3 millions d'utilisateurs et une part de marché de 8% auprès des entreprises britanniques, Starling a réussi à se tailler une place dans le monde concurrentiel de la fintech, et dégage un profit, ce qui est plutôt rare dans le secteur.
Elle-même issue d'une famille modeste et ancienne étudiante au Pays de Galles, Mme Boden décrit sa banque, lancée en 2014, comme "une force qu'il ne faut pas sous-estimer".
Le commentaire s'applique aussi à celle qui se décrit régulièrement comme "une Galloise d'un mètre 52": dans le monde très masculin de la finance, elle défend la place des femmes entrepreneuses et a été nommée à la tête d'un groupe de réflexion sur le sujet par le gouvernement.
Anne Boden revendique ne pas être "une banquière classique" et affirme vouloir proposer à ses clients une expérience différente de celle des banques traditionnelles pour lesquelles elle a travaillé jusqu'en 2013.
Mais dans le sillage de la crise financière de 2008, l'ancienne employée de la Royal Bank of Scotland (RBS) doit se distinguer de nombreux entrepreneurs qui veulent aussi bousculer la finance à l'ancienne.
Alors âgée de plus de 50 ans, elle s'associe à Tom Blomfield, jeune entrepreneur de moins de trente ans, ancien étudiant d'Oxford... Typique du milieu des start-up londoniennes.
Mais en 2015, il quitte le navire avec une grande partie de l'équipe à quelques mois du lancement de Starling, pour lancer Monzo, une banque rivale.
Dans un livre autobiographique, Anne Boden raconte ce coup dur et sa lutte pour garder le contrôle de Starling et conserver sa vision: une banque rentable mais "responsable", en ligne mais au service clients accessible en permanence, attentive à l'environnement - Starling affirme utiliser de l'énergie renouvelable et du plastique recyclé.
Sa capitalisation de plus de deux milliards de livres (2,5 milliards de dollars) reste loin derrière celle du géant Revolut (33 milliards de dollars) ou de Monzo (4,5 milliards de dollars), mais elle arrive souvent en tête des classements de satisfaction des consommateurs.
-Pas de crypto "gadget"-
Si Anne Boden maintient en riant avoir désormais des relations de "concurrence cordiales" avec les autres grands noms de la fintech britannique, elle n'hésite pas à les critiquer et à vanter l'approche plus prudente de Starling.
Dans son livre, elle détaillait le travail de fourmi réalisé pour obtenir une licence bancaire avant le lancement de Starling, ce Graal qui permet d'effectuer des prêts en utilisant les dépôts de ses clients et qui la distingue désormais de certains concurrents au Royaume-Uni.
Le géant de la fintech Revolut n'est en effet pas reconnu comme une banque à Londres, même s'il l'est dans plusieurs pays européens, et la presse financière détaille régulièrement ses efforts pour obtenir une licence.
Selon Mme Boden, c'est justement l'activité bancaire qui permet à Starling de dégager un profit.
"Certaines de ces nouvelles fintechs essayent de rendre leur base d'utilisateurs rentable en imaginant des offres d'investissements ou d'achats de cryptomonnaies", estime-t-elle.
"Nous n'avons pas besoin de chercher des gadgets", attaque-t-elle.
Elle ne cache pas son ambition: "dans cinq ans, les gens parleront de Starling comme d'une entreprise technologique mondiale qui possède une banque très fructueuse au Royaume-Uni, et cela commence par ici, à Cardiff".
Si la patronne de Starling ne répond pas aux questions sur une possible introduction en Bourse, qui était prévue à la fin de l'année ou début 2023, elle est plus disserte sur le futur de la banque: "nous allons vers un avenir où la technologie sera partout", estime-t-elle, et les banques devront être en mesure d'offrir par exemple "une assurance calculée pas tous les trimestres mais à chaque instant ou une voiture automatique qui serait payée au kilomètre".
A.Wyss--NZN