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Après l'avoir rejetée il y a un an, l'Assemblée devrait approuver mardi la fusion controversée des deux acteurs de la sûreté nucléaire, l'ASN, gendarme des centrales, et l'IRSN, chargé de l'expertise technique, Les Républicains et le Rassemblement national venant en appui de la majorité.
Le projet de loi relatif à la gouvernance de la sûreté nucléaire prévoit la création le 1er janvier 2025 d'une "Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection" (ASNR) issue du rapprochement de l'Autorité de sûreté nucléaire et de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, qui emploient respectivement environ 530 et 1.740 agents.
A l'issue du vote, le gouvernement devrait convoquer une commission mixte paritaire le 3 avril, en vue d'une adoption définitive dans les deux chambres début avril.
La réforme, qui vise, selon le gouvernement, à "fluidifier" le secteur et à réduire les délais dans les processus d'expertise, d'autorisation et de contrôle, en pleine relance de l'atome, a provoqué l'ire des syndicats des deux entités et rencontré l'opposition de nombre d'élus, d'experts et d'associations.
Ses détracteurs alertent notamment sur le risque de désorganisation du système, de perte d'indépendance des experts et de transparence à l'égard du public.
Mercredi, les représentants du personnel du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), qui devrait accueillir une partie des personnels de l'IRSN, ont fait part de leur opposition à la fusion, mettant en garde sur "les risques de perte de compétence et d'indépendance".
A l'Assemblée, le projet a suscité des débats électriques.
Le gouvernement avait essuyé un premier revers en mars 2023, ne parvenant pas à faire adopter la fusion dans le cadre de l'examen du projet de loi d'accélération du nucléaire. En commission des lois à l'Assemblée il y a deux semaines, il a de nouveau subi une défaite, les députés rejetant l'article principal du nouveau projet de loi.
Mais une large majorité a finalement approuvé le 12 mars dans l'hémicycle un amendement du gouvernement rétablissant cet article (206 pour, 117 contre). Le RN, qui s'était abstenu il y a un an et avait voté contre la fusion en commission, a joint ses voix à celles de la majorité Renaissance-MoDem-Horizons, et d'une partie de LR.
- "Grave recul" -
Dans l'hémicycle, le ministre de l'Industrie Roland Lescure a défendu une fusion visant à créer une entité "plus puissante, plus transparente, plus fluide et plus indépendante", sans convaincre les oppositions.
L'ancienne ministre de l'Écologie Delphine Batho a notamment critiqué la décision du gouvernement de supprimer la publication des avis d'expertise en amont des décisions, une demande du lobby nucléaire.
"C'est le plus grave recul en matière d'information du public et de sûreté nucléaire depuis des décennies", a fustigé la députée écologiste, accusant l'exécutif de "tuer la confiance" de l'opinion dans la sûreté nucléaire.
"Il arrive parfois (...) qu'on doive prendre des décisions rapidement pour des raisons de sûreté", a justifié M. Lescure.
Mme Batho dénonce aussi un "démantèlement de l'IRSN", avec le transfert au Commissariat à l'énergie atomique (CEA) des 140 salariés de la direction de l'expertise nucléaire de défense (DEND). "La réforme met fin à l'approche intégrée de la sûreté nucléaire civile, militaire et de sécurité intérieure", regrette-t-elle.
Plusieurs députés, comme Sébastien Jumel (PCF) ou Julie Laernoes (EELV) se sont étonnés au cours des débats de la volte-face du RN. "En commission, nos collègues du RN semblaient avoir des doutes (...) Depuis ils ont retourné totalement leur veste et changé d'avis radicalement", a attaqué Mme Laernoes.
"On est pour la fusion", "notre vote contre était un vote en forme d'avertissement", alors qu'un certain nombre de questions posées par le RN "n'avaient pas eu de réponses", a expliqué à l'AFP un cadre du groupe.
A.Wyss--NZN