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Le président Macky Sall a lancé mardi à Dakar les travaux de la première usine de dessalement d'eau de mer du Sénégal pour améliorer l'approvisionnement de la métropole confrontée à des pénuries, malgré les craintes des pêcheurs et de défenseurs de l'environnement.
"Ce projet complexe et inédit marque une étape majeure dans la réalisation du plan Sénégal émergent (PSE)", vaste programme visant à mettre ce pays pauvre sur la voie de l'émergence à l'horizon 2035, a dit le chef de l'Etat.
L'usine de dessalement des Mamelles, sur la côte en pleine ville, doit avoir une capacité de 100.000 m3/jour et participer à mettre fin aux coupures qui empoisonnent la vie de maints Dakarois.
L'infrastructure diversifiera l'approvisionnement de Dakar, en grande partie tributaire du lac de Guiers, situé à plus de 250 km.
De nombreux quartiers de Dakar sont régulièrement confrontés à des problèmes d'eau. La capitale, à la croissance démographique importante, concentre sur 0,3% du territoire le cinquième des 17 millions de Sénégalais et la quasi-totalité des activités économiques du pays.
Les autorités prévoient une augmentation des besoins en eau à Dakar et dans les "pôles émergents" comme la nouvelle ville de Diamniadio, à une trentaine de kilomètres de la capitale, la ville de Thiès, à 70 km, et la Petite Côte, une zone touristique.
"L'Etat a pris toutes les dispositions pour la maîtrise des impacts environnementaux de ce projet. L'écosystème marin sera préservé", a assuré Macky Sall.
- Littoral dakarois rogné -
Mais le projet a suscité les critiques du mouvement citoyen "Y en a marre".
Le dessalement est pratiqué dans des pays très secs mais très riches, comme des monarchies de la péninsule Arabique, "alors que notre pays, qui manque de moyens, a assez d'eau", en surface ou dans les nappes souterraines, objecte le rappeur Cyril Touré, dit Thiaat, membre de ce mouvement.
"Cette usine va contaminer la faune aquatique. Elle est construite sur une des rares plages qui restent à Dakar dont le littoral est privatisé. Les vendeurs de friandises, de poissons et d'objets d'art et les commerces sur cette plage vont arrêter leurs activités", déplore-t-il.
Oumar Diagne, pêcheur sur une plage voisine du site de l'usine, dit craindre pour sa propre activité. "Les rejets de l'usine vont chasser les poissons", a-t-il confié à l'AFP.
"Les pêcheurs fréquentent au quotidien la zone où l'usine doit être construite. Il y aura des entraves à notre métier. Les autorités doivent nous indemniser", réclame Samba Fall, un autre pêcheur.
"Chez Max", un restaurant de plage située près de la future usine, le propriétaire Amadou Magatte Dieng dit avec amertume avoir "choisi de ne plus parler de cette usine qui va détruire l'environnement". "Depuis 2016, nous nous battons contre cette usine. Il est prévu que des tuyaux passent ici (dans le restaurant). Nous allons fermer et partir. Nous n'avons pas réclamé d'indemnisation", explique-t-il à l'AFP.
Sur 17 millions de Sénégalais, 98,8% ont accès à l'eau en ville et 91% en campagne, selon le ministère de l'Hydraulique.
Depuis 2020, l'Etat confie la production et la distribution en milieu urbain à la Sén'eau (55% de capitaux sénégalais, 45% pour le français Suez).
L.Zimmermann--NZN