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La canicule se déplaçait vers l'est de la France mardi, après avoir fait tomber plus de 60 records absolus de chaleur et laissant dans son sillage des incendies dévastateurs, jusque dans des régions habituellement épargnées par ces impacts du réchauffement climatique.
Alors que toute l'Europe occidentale suffoque sous la chaleur extrême, le Royaume-Uni dépassant pour le première fois de son histoire les 40°C, Météo-France a levé tôt mardi la vigilance rouge canicule sur les 15 départements de la façade atlantique où l'alerte maximale était en vigueur.
C'est le Sud-Ouest qui a subi les pires conséquences, avec deux gigantesques incendies en Gironde qui ont brûlé depuis le 12 juillet plus de 19.000 hectares de forêt. Poussée par le vent, la fumée a été ressentie dans la nuit jusqu'à Bordeaux et même plus au nord.
Près de 1.700 pompiers venus de toute la France, appuyés par d'importants moyens aériens, sont mobilisés contre les deux brasiers qui ont brûlé 6.500 hectares de forêt à La Teste-de-Buch près d'Arcachon, et 12.800 à Landiras, à 50 km à l'est, où un homme a été placé en garde à vue, l'enquête se dirigeant vers "un acte volontairement malveillant". En sept jours, ces deux incendies ont obligé à évacuer 37.000 personnes.
- "Camping" brûlé -
Comme les occupants des "Flots bleus" (en fait "La dune"), décor de la très populaire série de films "Camping" au pied de la dune du Pilat, dont une bonne partie n'a pas résisté aux flammes. A l'entrée, l'effigie du personnage de Patrick Chirac est encore debout. Mais un peu plus loin, comme en écho à l'avertissement de son célèbre homonyme, "notre maison brûle", les bungalows sont éventrés, des véhicules calcinés, le bâtiment des sanitaires dévasté.
"Tout ce qui devait brûler a brûlé. Maintenant ce qui nous intéresse, c’est éviter toute reprise du feu dans le massif", souligne le commandant Matthieu Jomain, porte-parole des pompiers.
Les incendies ont atteint des régions peu habituées, comme la Bretagne. Près de 1.400 hectares de végétation sont partis en fumée dans les Monts d'Arrée (Finistère) où 500 personnes ont été évacuées, quelques heures après les records de chaleur historiques enregistrés dans tous les départements bretons.
Le vignoble de Bourgogne, mondialement réputé, a aussi connu des frayeurs. Une dizaine d'hectares de pins ont brûlé au-dessus des vignes de Vosne-Romanée et Nuits-Saint-Georges.
Non loin, à Dijon, Pauline Louis s'est réfugiée dans la fraîcheur relative de l'église Notre-Dame, chef-d’oeuvre gothique. "On est mieux ici" pour "respirer un peu", souffle la touriste belge de 62 ans. Du nord au sud, les communes ouvrent leurs lieux frais ou climatisés, comme une patinoire à Gap, ou le Palais des Beaux-Arts de Lille.
Le pays entier est en alerte. Massifs forestiers fermés dans les Bouches-du-Rhône, tout comme de façon exceptionnelle les routes forestières en Ile-de-France, en Normandie et dans les Hauts-de-France, où plus de 250 hectares ont brûlé depuis le 20 juin dans le seul département de l'Oise.
"Le changement climatique amplifie les paramètres favorables aux incendies: sécheresse, vent, fortes températures fragilisent les forêts qui souffrent", a souligné sur France Inter Françoise Alriq, directrice adjointe de la fédération des communes forestières de France.
- Amplitude -
Les chiffres parlent d'eux-même: selon Météo-France, nous sommes dans la 45e vague de chaleur en France métropolitaine depuis 1947, et leur rythme s’accélère.
Sur les 35 dernières années, elles ont été trois fois plus nombreuses que sur les 35 années précédentes.
Depuis 2010, seule l'année 2014 a été épargnée et la vague actuelle est déjà la deuxième cette année, après l'épisode très précoce et intense du mois de juin.
La moyenne des températures maximales lundi sur la France (dans 30 stations de référence sur tout le territoire) a été la deuxième plus élevée jamais enregistrée, avec 37,6°C, après le 5 août 2003, qui avait culminé à 37,7°C, au coeur d'une canicule historique et meurtrière.
Le thermomètre est monté jusqu'à 42,6°C à Biscarrosse, dans les Landes. Au total 64 records absolus de chaleur sont tombés, principalement le long de la façade atlantique, jusqu'en Seine-Maritime où 38,2°C ont été atteints au Cap de la Hève, au nord du Havre.
"C'était malheureusement quelque chose d'attendu," dit l'AFP Matthieu Sorel, climatologue à Météo-France. Mais pour le spécialiste, plus encore que le nombre, "ce qui est significatif c'est l'amplitude" entre anciens et nouveaux records. "Plus quatre degrés à Brest, c'est colossal". A la pointe de la Bretagne le mercure s'est en effet envolé, de 35,1°C en août 2003 à 39,3°C lundi.
G.Kuhn--NZN