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Un checkpoint en pleine rue et des contrôles suspicieux pour ceux qui s'aventurent dehors malgré le couvre-feu, des allers-retour aux abris entre deux bombardements: au quatrième jour de l'invasion russe, les habitants de Kiev entrent dans le quotidien de la guerre.
"Bien sûr que c'est un peu dangereux. Je pense que si vous êtes prudent et que vous regardez autour de vous, c'est plus sûr que de rester devant la télévision et de regarder les informations tout le temps, parce que ça vous rendra fou", justifie cette habitante de la capitale ukrainienne.
Derrière elle, une unité de soldats ukrainiens a installé un point de contrôle. Mitrailleuses pointées sur chaque voiture ou passant, les soldats et volontaires contrôlent tout ce qui bouge.
"Qu'on ne vous revoie plus dans la rue", dit un policier qui patrouille un peu plus loin.
Un homme explique qu'il est juste sorti chercher du pain et qu'il n'en a pas trouvé.
Place de la Victoire, l'avenue principale de Kiev se dessine à l'horizon comme une bande de bitume vide sur des kilomètres. Tout le monde préfère éviter l'artère pilonnée la veille par des tirs russes. Au profit des plus petites rues.
- Suspicion -
La mairie de Kiev a annoncé samedi un couvre-feu strict jusqu'à lundi 08H00 (06H00 GMT). Plus aucun magasin ou station essence n'est ouvert. Sortir de chez soi est en théorie interdit.
"Tous les civils qui seront dans la rue pendant le couvre-feu seront considérés comme des membres des groupes de sabotage et de reconnaissance de l'ennemi", a menacé le maire de la ville Vitali Klitschko.
Pour limiter la progression les forces russes dans la capitale - dont certaines agiraient selon Kiev sous couvert, habillées en civil, en ambulances ou même en uniformes de soldats ukrainiens - des consignes ont été données aux habitants.
Chacun est appelé à recouvrir d'un papier le numéro de sa rue, à ôter la fonction localisation de son téléphone et tous les feux de signalisation ont été déconnectés.
Toute interaction entre inconnus se fait sur le ton de la suspicion: on traque un accent trop russe, une démarche particulière ou des questions trop intrusives.
Pendant la nuit, les tirs russes ont déchiré le ciel et les bombardements se sont intensifiés. Kiev redoutait l'instant fatidique, un "blitz" de l'aviation russe et un tapis de bombe, mais finalement le calme est revenu au petit matin sur la ville.
Entre deux bombardements sporadiques au loin, alors que les combats continuent au nord de la ville, sur le Dniepr, on entend surtout dimanche matin dans la ville, le gazouillis des oiseaux.
- "Nation la plus cool" -
Olena Vasyliaka, profite de cette accalmie pour descendre des provisions de son appartement jusqu'à l'abri ou elle s'est installée.
"Nous vivons au dernier étage et je ne resterai jamais là haut avec les enfants", explique la productrice de 50 ans, dont le mari est sur "le front" de l'Est depuis le premier jour de l'invasion des forces de Moscou.
"Bien sûr, nous souffrons. Mais ca va aller, c'est notre vie maintenant. Le choc s'est produit mais maintenant nous devons nous habituer à ça", ajoute-t-elle avant de retourner à son abri souterrain, installé dans une librairie de quartier.
Sous la cave voutée, au milieu des matelas de camping, on a laissé un ordinateur branché sur les informations ukrainiennes en continu. Une femme regarde en boucle le discours du président Volodymyr Zelensky, considéré comme le héros de tout un peuple en Ukraine, et même désormais au-delà.
Pour les habitants de Kiev qui ont choisi de ne pas évacuer, passé le choc, l'esprit de résistance s'installe.
"Nous aimons notre armée. Nous les aimons parce qu'ils font des choses qu'on n'attendait pas d'eux. Nous sommes la nation la plus cool du monde", s'enthousiasme assis dans le bunker-librairie Andriï Vasyliak, 23 ans, juriste.
O.Meier--NZN