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La question sensible des retraites a fait irruption jeudi dans la campagne présidentielle avec la proposition du candidat Emmanuel Macron de repousser l'âge de départ à 65 ans, dénoncée comme "injuste" par ses adversaires, notamment de gauche.
A un mois du premier tour, le président-candidat Emmanuel Macron distille au compte-gouttes des éléments de son programme qu'il pourrait dévoiler en fin de semaine prochaine, selon son entourage.
Le chef de l'Etat devait se soustraire à la campagne jeudi et vendredi le temps d'un sommet européen à Versailles consacré à la guerre en Ukraine. La réunion est honorée par le déploiement du drapeau européen sous l'Arc de Triomphe, une récidive du 31 décembre ardemment critiquée par des tenants de la nation comme Eric Zemmour ou Nicolas Dupont-Aignan.
Après la suppression de la redevance audiovisuelle lundi, c'est sa proposition de relever l'âge légal de départ à la retraite -- 62 ans actuellement -- qui faisait débat le jour où le syndicat CFDT, très en pointe sur ce dossier, a auditionné les candidats à la présidentielle.
Le thème des retraites, couplé à celui du pouvoir d'achat, est un sujet particulièrement sensible depuis la crise sociale des gilets jaunes (2018-2019) et les grandes manifestations syndicales contre la réforme à l'automne 2019.
S'il est réélu en avril, le chef de l'Etat ambitionne de relancer cette vaste réforme des retraites qu'il avait dû suspendre puis annuler en pleine crise du Covid.
- Le "travailler plus" -
Il s'agit d'"un choix de société", avec la nécessité de "financer une protection pour les Français et investir pour (eux)", sans augmenter les impôts, et donc en "travaillant plus", a résumé le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal, reprenant l'un des thèmes de campagne du candidat dans sa "Lettre aux Français".
Concrètement, M. Macron propose un allongement progressif d'ici "2032" de l'âge de départ à la retraite à 65 ans, "un minimum de retraite à 1.100 euros" pour les carrières complètes, et la "suppression des principaux régimes spéciaux".
Le patron du premier syndicat français, Laurent Berger, a dénoncé lors d'un point de presse à la CFDT une mesure "injuste" et "brutale" que la confédération entend "combattre".
M. Macron n'est pas le seul à vouloir repousser l'âge de départ à la retraite.
A droite, la candidate LR Valérie Pécresse plaide elle aussi pour 65 ans, et à l'extrême droite, Eric Zemmour veut la porter à 64 ans.
Marine Le Pen parle elle d'une retraite à 60 ans mais qu'elle réserve à ceux entrés très jeunes dans la vie active. "La retraite à 65 ans, c'est profondément injuste", a-t-elle déclaré expliquant qu'un "maximum de gens n'arriveront jamais à la retraite".
Même opposition à gauche, le leader de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon affichant son "désaccord absolu". "Moi je suis pour la retraite à 60 ans", a-t-il rappelé sur RMC.
La socialiste Anne Hidalgo a dénoncé "une hypocrisie fondamentale", tandis que l'écologiste Yannick Jadot a parlé d'une mesure "extrêmement injuste" souhaitant au contraire remettre la pénibilité au cœur du régime des retraites.
Pour Ian Brossat, porte-parole du candidat communiste Fabien Roussel, c'est "une proposition antisociale et cruelle pour les gens qui exercent des métiers pénibles".
- Pécresse vs Zemmour -
Au coude-à-coude dans les sondages, Valérie Pécresse et Eric Zemmour s'affrontent eux lors d'un débat jeudi soir sur TF1 et LCI, en espérant apparaître de nouveau en mesure de se qualifier pour le second tour.
Mme Pécresse participera auparavant jeudi à Paris à une réunion de la droite européenne (PPE), en marge du sommet des dirigeants de l'UE.
Ce premier face-à-face télévisé pourrait être décisif car l'enjeu est pour chacun de relancer une campagne paralysée par la guerre en Ukraine. D'autant que les deux connaissent une baisse dans les sondages: Valérie Pécresse est donnée autour de 11 à 13%, Eric Zemmour de 11% à 14%, soit à une encablure de Marine Le Pen (17-18%) et loin derrière Emmanuel Macron (environ 30%).
Les raisons du décrochage sont différentes: ébranlée par un mauvais démarrage au Zénith le 13 février, Valérie Pécresse a passé beaucoup de temps à faire la synthèse des différentes sensibilités de son propre camp et peine à créer une dynamique face au président-candidat.
L'ancien polémiste est lui pénalisé pour ses propos jugés prorusses ou ses positions sur les réfugiés ukrainiens qui ont suscité des critiques jusque dans son équipe -- il a depuis nuancé ce dernier point.
Le débat sera-t-il décisif? Les deux candidats ont intérêt à cette exposition médiatique, Valérie Pécresse parce qu'étant "inaudible, il faut qu'elle soit présente", et Eric Zemmour parce qu'il patine dans les sondages, malgré le ralliement de la nièce de Marine Le Pen, Marion Maréchal, relève Mathieu Gallard d'Ipsos.
A.P.Huber--NZN