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Quand les explosions - et avec elles l'idée de la mort imminente - se rapprochaient trop dans la ville ukrainienne d'Irpin près de Kiev, Tamara Osypchuk, 72 ans, se remettait à écrire de la poésie.
"Les explosions étaient très fortes, comme l'éruption d'un volcan, comme si la Terre elle-même explosait", dit-elle, assise sur une chaise d'un centre d'évacuation de la banlieue de Kiev, vêtue d'un long manteau de fourrure noire, écharpe beige et bonnet de laine rouge.
"J'écris des poèmes et quand il y a des explosions, je ressens une grande inspiration", explique Tamara Osypchuk.
Elle s'est retrouvée, presque à regret, parmi la vingtaine de civils qui a pu quitter samedi la ville d'Irpin dévastée.
Les combats ont démoli une partie du bâtiment dans lequel elle habitait au neuvième étage. Mais la vieille dame n'a quitté son appartement que parce qu'un proche lui a fait envoyer des ambulances en charge, depuis le début des combats, d'évacuer les habitants.
"J'ai pensé que j'allais mourir ici, que je ne quitterais pas l'Ukraine", raconte-t-elle, avoir avoir demandé à parler à sa fille qui réside en Grande-Bretagne.
"J'aime énormément l'Ukraine. J'ai beaucoup voyagé à travers le monde mais nulle part ailleurs, ni en Angleterre, ni en République Tchèque, en Pologne ou en Italie, je n'ai ressenti ce que je ressens ici", confie-t-elle.
- "Les chiens vont bien" -
La Russie a annoncé vendredi sa décision de se concentrer sur "la libération du Donbass", dans l'est de l'Ukraine, fief des séparatistes prorusses, semblant revoir ses objectifs de guerre à la baisse.
Le président américain Joe Biden a toutefois déclaré samedi à Varsovie qu'il n'était "pas sûr" que cette annonce signifiait un changement de la stratégie russe.
Autour de Kiev, les combats continuent pour "repousser l'offensive ennemie", selon l'état-major ukrainien, précisant que la ligne de front n'a pas bougé.
La vie est devenue impossible dans Irpin avec d'intenses combats opposant forces ukrainiennes et russes.
Localité tranquille de la banlieue de Kiev, son emplacement stratégique dans la tentative d'encerclement de la capitale par les forces russes, l'a transformée en théâtre de combats acharnés.
La plupart de ses habitants l'avaient quittée en empruntant les restes d'un pont détruit et, maintenant, ce sont ses derniers occupants qui l'abandonnent.
Dans le centre d'accueil, d'autres réfugiés se pressent. Une vieille dame, la tête bandée, est transportée dans un brancard.
Une fille de dix ans, visiblement angoissée, se tient auprès de sa mère, qui boit du thé dans un gobelet en plastique en pleurant.
Ces dernières familles à quitter Irpin semblent presque toutes avoir des animaux de compagnie. Elles ont préféré attendre les secours plutôt que de les abandonner.
Des volontaires ont fait plusieurs aller-retour sous le feu, transportant dans des pick-up les animaux et leurs propriétaires.
Svitlana Rogutska a pu quitter Irpin avec dix chiens et un chat après avoir longuement attendu ces volontaires. "Les chiens, dit-elle, vont bien".
F.Carpenteri--NZN