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Une nouvelle manifestation pour Yvan Colonna, militant indépendantiste mortellement agressé en prison, a débuté dimanche après-midi à Ajaccio, avec le risque, en cas de violences, de retarder l'ouverture annoncée de discussions avec le gouvernement autour d'une possible autonomie pour l'île.
A 15h00, un cortège de plusieurs milliers de personnes, derrière deux larges banderoles portant le désormais traditionnel slogan "État français assassin", s'est mis en marche sous le soleil vers la préfecture. Au milieu des dizaines de banderas, le drapeau corse frappé de la tête de Maure, émergeaient aussi un drapeau basque et un grand drapeau breton.
Cette marche réunissait au moins 3.800 personnes selon un premier comptage des autorités, 14.000 selon les organisateurs, un large collectif nationaliste demandant "justice et vérité" pour Yvan Colonna. Ce collectif avait été formé après l'agression mortelle, le 2 mars, du militant nationaliste, qui purgeait une peine de prison à perpétuité pour l'assassinat du préfet Claude Erignac en 1998 à Ajaccio.
Composé des partis politiques autonomistes et indépendantistes, des syndicats nationalistes et d'associations de défense de prisonniers, ce mouvement était déjà à l'origine des grandes manifestations des 6 et 13 mars à Corte et Bastia, qui s'étaient achevées dans la violence. 7.000 personnes s'étaient rassemblées à Bastia selon les autorités, 15.000 selon les organisateurs.
Face à de nouveaux risques de débordements, un imposant dispositif de sécurité a été mis en place dimanche dans Ajaccio, notamment devant la préfecture ou le palais de justice, qui avait été la cible des manifestants le 9 mars, avec un incendie dans la salle des pas perdus.
"Face à cette France meurtrière et en mémoire du patriote qu'était Yvan, nous serons tous ensemble dimanche pour la manifestation à Ajaccio", avait écrit Stéphane Colonna, son frère, mardi sur Twitter, en langue corse. Dimanche, il se trouvait effectivement en tête de cortège, entouré de très jeunes manifestants, des enfants pour certains, qui reprenaient en chœur le cri d'"État français assassin".
- Cocktails Molotov et boules de pétanque -
Parmi les manifestants se trouvait également Gilles Simeoni, président autonomiste du conseil exécutif de Corse. Autre figure visible parmi le cortège: Charles Pieri, ex-leader présumé du Front de libération nationale de la Corse (FLNC), mouvement qui a récemment menacé de reprendre la lutte armée, ou encore Paul-Félix Benedetti, le leader du parti indépendantiste Core in Fronte.
Devant et sur les côtés de la marche, près d'une centaine de jeunes, cagoulés et équipés de masques à gaz ou de masques de ski, étaient déjà prêts à des échauffourées, cocktails Molotov à la main pour certains, alors que des fumigènes commençaient aussi à faire leur apparition.
Avant la manifestation, plusieurs dizaines de projectiles avaient été saisis par les forces de l'ordre, dont des dizaines de boules de pétanque.
Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, s'était engagé, lors de sa visite en Corse du 16 au 18 mars, à ouvrir "dès la première semaine du mois d'avril" un processus de négociations sur "l'ensemble des problématiques corses", dont "l'évolution institutionnelle vers un statut d'autonomie restant à préciser".
Si M. Simeoni a avancé la journée du 8 avril pour l'ouverture de ces discussions, cette date n'a pas été confirmée par Beauvau.
Dans un document qu'ils avaient co-signé le 18 mars, MM. Darmanin et Simeoni avaient convenu "que la mise en œuvre de ce processus historique ne" pouvait "s’envisager que dans un cadre général apaisé et calme".
W.Odermatt--NZN