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La pression continue de monter lundi sur Moscou, qui doit accueillir un dirigeant européen, le chancelier autrichien Karl Nehammer, pour la première fois depuis l'invasion de l'Ukraine, dans l'attente de nouvelles sanctions européennes et alors que la banque française Société générale a annoncé mettre fin à ses activités en Russie.
Sur le terrain, les troupes ukrainiennes fortifient leurs positions dans l'est, dans la crainte d'une offensive massive et meurtrière des Russes, qui ont fait de cette région leur objectif prioritaire après avoir retiré leurs troupes de la région de Kiev et du nord.
Après s'être rendu en Ukraine samedi, Karl Nehammer doit rencontrer dans l'après-midi à Moscou le président russe Vladimir Poutine, avec "l'intention de tout faire pour que des mesures soient prises en faveur de la paix", tout en reconnaissant que les chances d'y parvenir étaient minces.
"Nous sommes neutres sur le plan militaire, mais nous avons une position claire sur la guerre d'agression russe contre l'Ukraine. Elle doit cesser! Il faut des corridors humanitaires, un cessez-le-feu et une enquête complète sur les crimes de guerre", a-t-il twitté dimanche.
M. Nehammer a ajouté qu'il comptait évoquer au Kremlin les "crimes de guerre" à Boutcha, au nord-ouest de Kiev, devenue un symbole des atrocités de la guerre en Ukraine. Près de 300 personnes y ont été enterrées dans des fosses communes, selon les autorités ukrainiennes, qui accusent les Russes de massacres, ce que Moscou dément en bloc, dénonçant une "manipulation".
Lundi matin, la banque française Société Générale, très impliquée jusqu'ici en Russie, s'est ajoutée à la liste des entreprises occidentales qui ont annoncé cesser leurs activités dans le pays depuis l'invasion de l'Ukraine par les troupes russes le 24 février.
La banque française a annoncé qu'elle allait le faire en cédant notamment la totalité de sa participation dans Rosbank, poids lourd du secteur bancaire russe dans lequel elle était actionnaire majoritaire. Elle était exposée en Russie à hauteur de 18,6 milliards d'euros, dont 15,4 milliards pour Rosbank.
- Mines et obstacles antichar -
Sur le terrain, les forces ukrainiennes ont continué ce weekend à fortifier leurs positions dans l'est du pays, dans la crainte d'une prochaine grande offensive russe.
Dans la zone rurale de Barvinkove, par exemple, soldats ukrainiens et membres de la Défense territoriale ont miné les bords de routes et installé des obstacles antichars à tous les carrefours.
Après avoir revu ses plans à la baisse et retiré ses troupes de la région de Kiev et du nord de l'Ukraine, Moscou a fait sa priorité de la conquête totale du Donbass, dans l'est, dont une partie est contrôlée depuis 2014 par des séparatistes prorusses.
"La semaine prochaine ne sera pas moins importante que celle-ci ni que les précédentes. Les troupes russes passeront à des opérations encore plus importantes dans l'est de notre Etat", a averti dimanche soir le président ukrainien Volodymyr Zelensky, dans un communiqué.
"La bataille pour le Donbass durera plusieurs jours, et pendant ces jours nos villes pourraient être complètement détruites", a prédit pour sa part sur Facebook Serguiï Gaïdaï, le gouverneur de la région de Lougansk, dans le Donbass, en appelant de nouveau les civils à quitter la région dans les cinq couloirs humanitaires prévus.
"Le scénario de Marioupol peut se répéter dans la région de Lougansk", a-t-il dit, en se référant au grand port du sud-est de l'Ukraine dévasté et assiégé depuis fin février par les forces russes.
De son côté, le ministère de la Défense russe a accusé dimanche les Ukrainiens et les Occidentaux de provocations "monstrueuses et sans pitié" et de meurtres de civils à Lougansk.
Des analystes estiment que Vladimir Poutine, dont la décision d'envahir l'Ukraine s'est heurtée à la résistance acharnée des Ukrainiens, veut obtenir une victoire dans le Donbass avant le défilé militaire du 9 mai marquant sur la Place Rouge la victoire soviétique sur les nazis.
Alors que la population tente de fuir les régions orientales de l'Ukraine pour échapper à la bataille qui s'y annonce, les frappes aériennes et les bombardements continuent: dimanche, ils ont fait au moins 11 morts, dont un enfant de 7 ans, et 14 blessés à Kharkiv (est), la deuxième ville du pays, et dans sa banlieue, selon le gouverneur régional Oleg Sinegoubov.
"L'armée russe continue de faire la guerre aux civils, faute de victoires sur le front", a-t-il accusé.
Selon les services de la procureure générale, Iryna Venediktova, 183 enfants sont morts et plus de 342 ont été blessés dans le pays depuis le début de l'invasion russe.
Dans les environs de Kiev, occupés plusieurs semaines durant par l'armée russe, la recherche des corps se poursuit.
"A ce jour, nous avons 1.222 personnes tuées, pour la seule région de Kiev", a déclaré Mme Venediktova à la chaîne britannique Sky News.
Elle n'a pas précisé si les corps découverts étaient exclusivement ceux de civils, mais elle a également fait état de 5.600 enquêtes ouvertes pour crimes de guerre présumés depuis le début de l'invasion russe le 24 février, dont ceux de Boutcha.
A Bouzova, également près de Kiev, deux corps habillés en civil ont été découverts dans une fosse, ont constaté des journalistes de l'AFP. Une femme a regardé à l'intérieur avant de s'effondrer, ayant reconnu le corps aux chaussures: "Mon fils, mon fils", a-t-elle crié.
- Ouvert à la négociation -
"Boutcha ne s'est pas fait en un jour. Pendant de nombreuses années, les élites politiques et la propagande russes ont incité à la haine, déshumanisé les Ukrainiens, nourri la supériorité russe et préparé le terrain pour ces atrocités", a écrit dimanche le ministre des Affaires étrangères ukrainien Dmytro Kouleba sur Twitter.
Mais dans un entretien avec la chaîne américaine NBC dimanche soir, M. Kouleba s'est néanmoins déclaré ouvert à la négociation avec Moscou.
"Si m'asseoir avec les Russes peut m'aider à empêcher au moins un massacre comme à Boutcha, ou au moins une autre attaque comme à Kramatorsk, je dois saisir cette opportunité", a-t-il dit.
Une frappe de missile devant la gare de Kramatorsk, dans l'est de l'Ukraine, a fait 57 morts dont au moins 5 enfants vendredi.
Le président Zelensky a appelé les Occidentaux à "suivre l'exemple du Royaume-Uni" --dont le Premier ministre Boris Johnson a effectué une visite surprise en Ukraine samedi-- en imposant "un embargo total sur les hydrocarbures russes".
De son côté, le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, a dit que l'Alliance préparait des plans pour une force militaire permanente à ses frontières afin de prévenir toute nouvelle agression de la Russie.
Cette nouvelle force sera, a-t-il ajouté, une "conséquence à long terme" de l'invasion de l'Ukraine.
burx-roc-emd/all/at
T.L.Marti--NZN