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Tous les passages routiers à la frontière entre la Pologne et l'Ukraine ont été débloqués par les agriculteurs polonais "pour ne pas rendre plus difficile" la situation des Ukrainiens confrontés à des attaques particulièrement intenses de l'armée russe.
Les transporteurs, puis des agriculteurs polonais, ont bloqué des mois durant la frontière, protestant contre une concurrence déloyale avec notamment l'arrivée dans leur pays de denrées alimentaires en provenance de cet Etat voisin déchiré par la guerre.
Ces importations avaient été libéralisées en 2022 par Bruxelles, ce qui a conduit à des perturbations sur le marché agricole et alimentaire en Pologne et dans d'autres pays de la région.
Kiev a aussitôt salué la levée des barrages.
- "Solidaires" -
On peut emprunter "tous les passages" frontaliers, a déclaré lundi à l'AFP le porte-parole des douanes à Lublin, Michal Derus, après le déblocage, dans la nuit de dimanche à lundi, du poste de Hrebenne.
Les autres postes-frontières ont rouvert les uns après les autres, à la suite des décisions de protestataires ou des autorités locales.
Les organisateurs polonais des blocages disent avoir pris en compte les récentes nouvelles d'Ukraine.
Le commandant en chef de l'armée ukrainienne, Oleksandre Syrsky, a ainsi reconnu dimanche que la situation sur le front s'était "détériorée", les troupes russes, supérieures en nombre et en équipements, ayant remporté des "succès tactiques" dans plusieurs zones.
"Nous sommes solidaires de l'Ukraine et nous ne pouvons pas permettre qu'elle perde la guerre", pour cette raison "nous avons décidé de suspendre notre manifestation, pour la durée de cette période difficile", a expliqué à l'AFP Roman Kondrow, qui dirige l'organisation "La campagne dupée", le coordinateur des protestations à la frontière.
"En tant qu'agriculteurs et en tant qu'êtres humains, nous comprenons la situation difficile et extrême de ces familles et de ces personnes" en Ukraine, a-t-il assuré, et "nous ne devons pas leur rendre la tâche plus difficile encore".
Selon M. Derus, "désormais, tous les camions sont autorisés à passer, sauf s'ils transportent des produits" faisant l'objet d'un embargo imposé par la Pologne, en particulier sur des céréales.
"Si les camions transportent ce genre de produits (sous embargo), ils seront plombés et ne pourront passer qu'en transit", a-t-il précisé.
- Négociations "pas faciles" -
Le ministre ukrainien de l'Agriculture, Mykola Solsky, s'est félicité de la levée des blocages.
"Nous exprimons notre gratitude au ministère polonais pour son travail constructif sur le déblocage de la frontière. Nous remercions également les associations sectorielles des deux pays", a écrit le ministre.
Cette mesure a été prise alors qu'aucun accord n'a encore été signé entre les autorités polonaises et les agriculteurs d'une part, ni entre Varsovie et Kiev d'autre part
Selon le ministère polonais de l'Agriculture, la suspension des protestations à la frontière a aussi pu être le résultat des négociations menées en permanence avec les représentants du monde agricole et intervient après des annonces d'aides du gouvernement à ceux qui n'arrivent pas à vendre leurs stocks de blé sur un marché saturé.
Les négociations bilatérales "pas faciles" entre les ministères et les associations se poursuivront, a assuré lundi M. Solsky, en annonçant une prochaine session de discussions le 7 mai.
L'Ukraine a vu son secteur agricole et ses principales voies d'exportation par la mer Noire paralysés par l'invasion russe de 2022.
Afin de l'aider sur le plan économique, Bruxelles a supprimé cette année-là les droits de douane sur les marchandises ukrainiennes transitant par l'UE.
Toutefois, en raison de problèmes de logistique et de fraudes, une grande partie des exportations ukrainiennes destinées à des pays tiers sont restées en Pologne, au détriment des producteurs locaux.
Les barrages frontaliers et les différends sur les céréales ont mis à rude épreuve les relations entre Varsovie et Kiev, même si la Pologne fait toujours preuve d'un soutien sans faille à son voisin depuis le début de l'attaque russe.
I.Widmer--NZN