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Des femmes ont été autorisées jeudi pour la première depuis près de trois ans en Iran à assister dans un stade à Téhéran à un match de football opposant l'équipe nationale à l'Irak, comptant pour la qualification au Mondial-2022 au Qatar.
"Je suis très heureuse. C'est la première fois que j'assiste à un match au stade Azadi", s'écrie Mahya, une ingénieure civile de 26 ans, la tête recouverte d'un foulard gris, qui porte fièrement le drapeau national. "J'ai acheté les tickets en ligne et j'ai reçu un SMS de confirmation", dit-elle.
Depuis environ 40 ans, la République islamique interdit généralement l'accès des stades aux spectatrices, notamment pour des matches de football, car les religieux qui jouent un rôle prépondérant dans ce pays musulman soutiennent qu'elles doivent être protégées de l'atmosphère masculine et de la vue des hommes partiellement dévêtus.
En septembre 2019, la Fifa, instance dirigeante du football mondial, avait ordonné à l'Iran de permettre aux femmes d'accéder sans restrictions aux stades. Un mois plus tard, elles avaient pu assister au stade Azadi de Téhéran à la rencontre opposant l'Iran au Cambodge, match de qualification pour le Mondial-2022.
Jeudi, les femmes ont pénétré dans le stade par une entrée spéciale via un parking où des policières en tchador avec un badge rouge sur le bras contrôlaient les arrivantes. Les hommes y ont accédé par une autre entrée.
"J'aurais voulu que mon mari soit avec moi mais ils nous ont dit que les hommes et les femmes doivent être séparés", assure Golnaz, 24 ans qui porte son enfant dans une main et une vuvuzela (un sorte de trompette) dans l'autre.
Le groupe de supportrices iraniennes a été placé derrière le but de l'équipe d'Irak et les hommes dans une autre partie du stade.
S'ils sont bien séparés, les fans, hommes et femmes, soutiennent à l’unisson l'équipe nationale en faisant entendre leur voix tandis que la poignée d'Irakiens a du mal à se faire entendre.
Dix mille billets, dont deux mille réservés aux femmes, étaient disponibles pour ce match, a rapporté l'agence ISNA.
- Espoir -
En octobre 2019, la dernière fois que des femmes étaient autorisées à assister à un match de l'équipe d'Iran, elles étaient séparées des hommes et surveillées par des policières. Mais depuis, les matches de l'équipe nationale se sont tenus à huis-clos en raison des restrictions liées au Covid-19.
"Vraiment, ça n'a rien d'étrange, ni de compliqué pour une femme de venir au stade. Cela aurait du arriver plus tôt mais je suis très heureuse et j'espère que cela va continuer et que je pourrai assister à des matches de championnat", a-t-elle joyeuse.
"En tout cas si on gagne, on ira fêter la victoire dans les rues de la capitale", assure-t-elle.
L'intervention de la Fifa ordonnant à l'Iran d'ouvrir les stades aux femmes était intervenue après le décès d'une supportrice, Sahar Khodayari, qui s'était immolée par le feu devant un tribunal par crainte d'être emprisonnée pour avoir voulu assister à un match. Surnommée "Blue Girl" en raison des couleurs du club qu'elle soutenait (Esteghlal FC), elle avait tenté de pénétrer dans un stade alors qu'elle était déguisée en garçon.
Sa mort avait provoqué un tollé, beaucoup appelant à l'interdiction de l'Iran aux rencontres internationales et au boycott des matches.
La Fifa faisait pression depuis des années pour que l'Iran ouvre ses stades aux femmes, mais Téhéran n'avait jusqu'à 2019 autorisé qu'en de rares occasions un nombre limité d'entre elles (au maximum un millier de supportrices en novembre 2018) à assister à quelques rencontres.
Les matches entre l'Iran et l'Irak ont toujours un écho très puissant dans la population en raison de la guerre qui a opposé les deux pays de 1980 à 1988 faisant un million de morts et des destructions considérables.
M.Hug--NZN