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Tout juste investi, Vladimir Poutine supervise jeudi une grande parade militaire pour la célébration de le victoire de l'Union soviétique sur l'Allemagne nazie en 1945, une mémoire que le président russe invoque abondamment pour justifier son assaut contre l'Ukraine.
Plus de deux ans après le début de l’offensive à grande échelle contre Kiev, en février 2022, l'armée russe a multiplié les petites avancées dans l'est de l'Ukraine et se trouve en bien meilleure posture que l'année précédente, malgré les pertes.
Vladimir Poutine, 71 ans, qui a fait de ce conflit l'un des marqueurs de sa politique de puissance, promet à chaque occasion la "victoire" à ses concitoyens dans un combat contre un gouvernement ukrainien présenté comme "néo-nazi".
Le chef du Kremlin mobilise de longue date la mémoire de la Seconde guerre mondiale - qui a fait 27 millions de morts côté soviétique - pour se présenter en héritier de la puissance de l'URSS et légitimer son propre pouvoir.
Le défilé militaire du 9 mai, mis en scène comme un grand spectacle, est la pièce centrale de ce récit guerrier censé exalter la puissance du pays.
- Défilés annulés -
Mais la parade, prévue sur la place Rouge de Moscou, n'échappe pas aux retombées sécuritaires et diplomatiques de l'assaut contre Kiev.
Vladimir Poutine, isolé sur la scène internationale, ne sera entouré jeudi que de quelques chefs d'Etat piochés parmi ses proches alliés.
Parmi eux, les dirigeants du Bélarus, du Kazakhstan ou du Turkménistan, selon le Kremlin, qui a ajouté que ceux de Cuba ou du Laos étaient aussi conviés.
Certains défilés ont aussi été annulés pour des raisons de "sécurité", notamment dans les régions de Koursk, près de la frontière ukrainienne ou de Pskov, à côté de l'Estonie.
Le Kremlin cherche à entretenir l'idée selon laquelle la vie quotidienne des Russes ne serait pas perturbée par le conflit, mais l'Ukraine a multiplié ces derniers mois les attaques contre le territoire russe.
Les régions frontalières, comme celle de Belgorod, sont régulièrement touchées par des frappes mortelles, répondant, selon Kiev, à celles de Moscou en Ukraine.
Au Kirghizstan, un ex-république soviétique d'Asie centrale, la traditionnelle marche du "Régiment immortel" a également été annulée par les autorités afin d'éviter toute action "terroriste ou de provocation", selon l'agence Akipress.
Le 22 mars, un attentat revendiqué par le groupe Etat Islamique contre une salle de concert près de Moscou avait fait 144 morts et des centaines de blessés.
- "Menaces" occidentales -
La parade de 2023 avait été bien plus modeste que les années précédentes, avec très peu d'équipements modernes alors que les troupes russes étaient déjà mobilisées massivement sur le front.
Lors de son discours depuis la place Rouge, Vladimir Poutine avait assuré à ses concitoyens qu'"une guerre (avait) été lancée contre notre patrie".
Il avait promis de l'emporter, même si la Russie sortait alors d'une série d'échecs cuisants, à l'aube d'une contre-offensive ukrainienne très attendue.
Un an après, la situation est toute autre: l'armée russe a bien subi d'importantes pertes et ne parvient pas à réussir de véritable percée, mais elle a enchaîné récemment les gains territoriaux face à des troupes ukrainiennes en difficulté.
La contre-offensive de Kiev a échoué, et c'est l'Ukraine qui craint désormais que son adversaire, qui dispose de plus d'hommes, d'équipements et d'une industrie militaire plus puissante, ne lance une opération d'ampleur à l'arrivée de l'été.
Sur le plan intérieur, le pouvoir de Vladimir Poutine est aussi plus incontesté que jamais.
La répression féroce a écrasé toutes les voix dissidentes. Son grand opposant Alexeï Navalny est mort mi-février en prison dans des circonstances encore floues.
Le président russe vient de rempiler jusqu'en 2030, avec la possibilité d'effectuer ensuite un autre mandat jusqu'en 2036.
Signe d'une rupture avec l'Occident toujours plus profonde, Vladimir Poutine a récemment ordonné la tenue prochaine d'exercices nucléaires tactiques en réponse à des "menaces" occidentales visant la Russie.
L'Ukraine, qui célébrait elle aussi cette victoire le 9 mai, conformément à la tradition soviétique, a choisi l'an dernier de se distancer encore un peu plus de Moscou.
Le président Volodymyr Zelensky avait annoncé que son pays la commémorerait désormais le 8 mai, en même temps que "le monde libre".
T.Gerber--NZN