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L'Ukraine a affirmé jeudi freiner l'avancée militaire russe dans le nord-est du pays, mais la situation y reste "extrêmement difficile" selon le président Volodymyr Zelensky, Moscou y menant une offensive qui lui a permis d'engranger ses plus importants gains territoriaux depuis fin 2022.
Les autorités ukrainiennes ont par ailleurs accusé l'armée russe d'avoir exécuté au moins un civil ukrainien et d'en utiliser une quarantaine d'autres comme "boucliers humains" à Vovtchansk, localité de la région de Kharkiv (nord-est) et cible d'un assaut des troupes russes qui ont conquis, selon des estimations de l'AFP, près de 260 km2 en une semaine.
Le président Volodymyr Zelensky s'est rendu jeudi à Kharkiv, capitale régionale et deuxième ville du pays, pour une réunion de son cabinet militaire.
"A ce jour, la situation (...) est globalement sous contrôle, nos militaires infligent des pertes sensibles à l'occupant", a déclaré M. Zelensky. "Mais la zone reste extrêmement difficile, c'est pourquoi nous renforçons nos unités", a-t-il ajouté.
Le gouverneur régional Oleg Synegoubov a indiqué que "l'ennemi" avançait encore dans la zone de la localité de Lyptsi et que les Russes continuaient d'essayer "de prendre Vovtchansk".
"Nous ne pouvons pas dire que nos soldats soient parvenus à stabiliser la ligne de front", a-t-il admis tout en estimant que la phase "active" de l'avancée adverse "a été arrêtée".
Dans la matinée, l'armée avait dit être parvenue à "stabiliser partiellement la situation" et à stopper les avancées russes dans "certains" secteurs.
Le ministre de l'Intérieur Igor Klymenko a lui accusé la Russie d'avoir procédé à des détentions arbitraires de civils et à au moins une exécution sommaire à Vovtchansk, ville de 18.000 habitants avant la guerre.
- "Bouclier humain" -
Plus tard dans la journée, la police de cette région a précisé ces accusations affirmant que l'armée russe détenait de 35 à 40 civils, les utilisant comme "bouclier humain" pour protéger un quartier général militaire.
Un habitant âgé qui essayait de s'échapper à pied en territoire contrôlé par l'Ukraine a été tué par une balle dans la tête, selon la même source.
L'AFP n'est pas en mesure de confirmer ces accusations de source indépendante. La Russie n'a pas réagi dans l'immédiat.
Les forces russes ont été accusées de nombreuses exactions documentées en Ukraine, en particulier le massacre de centaines de civils à Boutcha, banlieue de Kiev qu'ils ont occupée au début de leur invasion en 2022.
La Russie a lancé le 10 mai une nouvelle offensive terrestre contre la région de Kharkiv, pénétrant par le nord dans deux secteurs frontaliers, ceux de Vovtchansk et de Loukiantsi, localités situées respectivement à une cinquantaine et une trentaine de kilomètres de la ville de Kharkiv.
Le chef de l'administration militaire de Vovtchansk, Tamaz Gambaraсhvili, a été blessé jeudi lors d'une frappe sur un village des environs, a indiqué le gouverneur régional. Cinq autres hommes ont été blessés, dont deux médecins.
Entre le 9 et le 15 mai, les Russes ont conquis 257 km2 dans la seule région de Kharkiv, selon une analyse jeudi de l'AFP à partir de données fournies par l'Institut américain pour l'étude de la guerre (ISW).
En outre, 21 km2 ont été occupés dans d'autres zones du front, selon la même source.
- Tirs incessants -
Selon les services de secours, 8.800 personnes ont été évacuées ces derniers jours. Une personne a été tuée et une quinzaine d'autres ont été blessées dans divers bombardements.
Dans la ville de Kharkiv, des personnes évacuées de Vovtchansk continuent d'arriver dans un centre humanitaire.
Parmi eux, Nadia Borodina, 85 ans, foulard rouge traditionnel sur la tête, son chien en laisse et son chat dans un sac en plastique. Elle a attendu trois jours d'être évacuée, avec peu de nourriture et sans moyen de communication.
"Les soldats sont arrivés et ont crié +Allons-y, allons-y!+ et nous sommes partis en cinq minutes", a raconté la veille dame à l'AFP. "J'ai vécu la Seconde Guerre mondiale mais aujourd'hui c'est encore plus effrayant!".
S'appuyant sur sa canne, Pandji Ravchanov marche dans la cour du centre d'évacuation où des réfugiés, âgés pour la plupart, reçoivent des produits de première nécessité.
"Mes mains tremblent encore de peur", confie cet homme de 67 ans. Avec sa femme Olia, ils sont partis à pied à 4 heures du matin, marchant jusqu'à la route de Kharkiv, où des bénévoles ukrainiens les ont trouvés.
"Ils tirent jour et nuit", dit M. Ravchanov.
L'assaut russe vient exploiter l'affaiblissement des forces ukrainiennes des derniers mois, Kiev manquant d'hommes, mais aussi d'armes et de munitions à cause des retards de l'aide militaire occidentale.
O.Pereira--NZN