AEX
1.3800
"Un vent mauvais souffle en Europe", "la Russie sera là demain, après-demain" :: le président français Emmanuel Macron a appelé lundi depuis Dresde, dans l'ex-RDA, les Européens à "se réveiller" face à la montée de l'extrême droite et aux menaces extérieures, à moins de deux semaines des élections européennes.
Durant près de 45 minutes, dans une ambiance de meeting électoral, alternant entre le français et l'allemand, le chef de l'Etat, applaudi à chaque envolée sur la démocratie ou la paix en Europe, a enflammé son public.
"Regardons autour de nous la fascination pour les régimes autoritaires, regardons autour de nous le moment illibéral que nous vivons", a-t-il lancé,devant l'église martyre Notre-Dame (Frauenkirche) de Dresde, détruite par des bombardements alliés en 1945 et reconstruite après la réunification allemande.
"Réveillons-nous !", a-t-il martelé.
Deux ans après le début de l’agression russe en Ukraine, l'Europe est à "un moment inédit de son histoire" qui la contraint à penser par elle-même "sa défense et sa sécurité", a-t-il averti, devant des milliers de jeunes Allemands, Tchèques et Polonais et en présence du président allemand Frank Walter-Steinmeier.
"Je le dis dans un endroit de l’Europe qui a vécu une toute autre moitié de 20e siècle que mon pays", qui a été "abandonnée à un rideau de fer", sous "domination soviétique" pendant 45 ans, avant de bâtir son "propre chemin" après la chute du Mur de Berlin en 1989, a-t-il souligné.
- "Vous pouvez compter sur moi ! "
"La géographie, nous ne la changerons pas avec la Russie qui aujourd'hui menace notre sécurité et a agressé l'Ukraine", a-t-il asséné, dénonçant la "dérive d’un pouvoir autoritaire révisionniste qui a décidé de jouer avec l'avenir de l'Europe pour bâtir des rêves d'empire".
Le continent a certes pu compter au fil des années sur l'allié américain, qui encore aujourd'hui est le premier fournisseur en armement de l'Ukraine pour l'aider à repousser l'agresseur russe.
Mais les Etats-Unis ont les yeux désormais rivés sur la Chine, leur premier rival stratégique et économique, et la possible réélection de Donald Trump en novembre complique encore l'équation.
L'Union européenne, prise en étau entre ces deux géants, doit "sortir de la naïveté" et "se protéger mieux" sur le plan commercial, "doubler" son budget et assumer le "mur d’investissements" nécessaire à la transition écologique et numérique, a-t-il encore insisté.
Face à tous ces défis, "l’Allemagne peut compter sur la France et la France compte sur l'Allemagne, "l'Europe elle peut compter sur nous et nous comptons sur l'Europe", a-t-il martelé. "Vous pouvez compter sur moi et je compte sur vous !, a-t-il conclu, dans des élans inédits depuis sa première élection en 2017.
Emmanuel Macron était le premier président français à se rendre en visite d'Etat dans l'est de Allemagne depuis François Mitterrand en 1989.
- Combat d'une vie -
L'ex-RDA communiste, et tout particulièrement l'Etat régional de Saxe dont Dresde est la capitale, est aussi une terre de conquête du parti d'extrême droite AfD (Alternative pour l'Allemagne), qui décline la peur du déclassement et des étrangers dans ces régions longtemps coupées de l'Ouest. A l'issue du discours, une centaine de ses militants ont défilé près de la Frauenkirche.
Dans la matinée, à Berlin, les deux présidents s'étaient longuement recueillis sur le site de l'imposant mémorial de l'Holocauste, en mémoire aux six millions de juifs assassinés par les nazis.
M. Macron a salué leur combat d'une vie pour forcer à "ouvrir les yeux" sur le travail de mémoire en Allemagne, mais aussi en France durant la collaboration, en les décorant à l'ambassade de France.
Mardi, M. Macron doit recevoir le prix international de la paix de Westphalie à Münster (ouest) pour son "engagement européen", avant de retrouver le chancelier Olaf Scholz à Meseberg, près de Berlin, pour un conseil des ministres franco-allemand.
Dans une tribune au Financial Times, les deux dirigeants, soucieux de montrer leur capacité à dépasser leurs différends, qui pèsent sur l'Europe, ont plaidé pour donner un "nouvel élan à la compétitivité" dans l'UE.
"Notre Europe est mortelle, et nous devons relever ce défi", ont-ils martelé, reprenant l'antienne d'Emmanuel Macron dans son discours à la Sorbonne le 25 avril.
M.Hug--NZN