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Les bureaux de vote en Afrique du Sud continuaient à drainer de longues files mercredi soir, la participation s'annnonçant forte pour ces législatives les plus disputées depuis 30 ans, alors que l'ANC au pouvoir risque de perdre sa majorité historique.
Parmi les 27,6 millions d'électeurs, certains gardent encore l'espoir que le Congrès national africain (ANC) pourra remédier au chômage endémique (33%), mettre fin aux inégalités record et résoudre pénuries d'eau et d'électricité. Mais d'autres expriment leur ras-le-bol et sont décidés à donner sa chance à l'opposition.
A deux heures de la fermeture du scrutin à 21H00 (19H00), de nombreux électeurs patientaient, parfois depuis des heures, pour exprimer leur vote. La commission électorale a précisé que les grandes villes étaient particulièrement concernées.
Elle a aussi indiqué s'attendre à une participation "bien supérieure" à celle des dernières législatives en 2019, pour lesquelles 66% des inscrits s'étaient déplacés.
A Durban, Sibahle Vilakazi, 25 ans, est revenue une troisième fois devant son bureau de vote, découragée plus tôt dans la journée par la longueur de la file: "Je ne renoncerai pas, nous avons besoin de changement, tout le monde ici va s'accrocher".
A Soweto, le président Cyril Ramaphosa, 71 ans, a assuré souriant que la victoire de l'ANC ne fait "aucun doute". Mais le chef de la principale formation d'opposition (DA), John Steenhuisen, a évoqué l'ouverture d'une nouvelle ère, après trente ans de scrutins où "il allait de soi que l'ANC allait gagner, on se demandait seulement avec quel score".
Les résultats définitifs ne sont pas attendus avant le week-end.
- "Rien pour nous" -
A Soweto, Agnes Ngobeni, grand-mère de 76 ans, fait peu de mystère de sa fidélité à l'ANC. Elle a voté "pour le parti que j'aime, celui qui a fait de moi ce que je suis".
L'ANC, "on vote pour eux mais ils ne font rien pour nous", réfute Jeffrey Benzane 75 ans, qui tourne le dos pour la première fois au parti de Nelson Mandela.
"Je veux du changement", tranche Danveries Mabasa, chômeur de 41 ans, "on n'a pas de boulot, pas d'eau, rien ne marche".
Pour Nkateko Maranele, commerçante de 29 ans, c'est aux jeunes, massivement touchés par le chômage, de prendre les choses en main et aller aux urnes, au lieu d'"attendre le changement depuis leur lit".
A Nkandla, en pays zoulou (Est), Nokuthobeka Ngcobo, 26 ans, dit fièrement avoir voté pour le petit parti d'opposition (MK) mené par le sulfureux ex-président Jacob Zuma (2008-2019), pour "changer les choses".
- "Imprévisible" -
Ce scrutin est "sans aucun doute le plus imprévisible depuis 1994", relève l'analyste politique Daniel Silke.
En raison d'une désillusion croissante à l'égard de l'ANC, liée à une économie morose et aux nombreux scandales de corruption, le parti au pouvoir risque d'obtenir "un résultat potentiellement inférieur à 50%".
Il serait alors contraint de former un gouvernement de coalition. Si le score de l'ANC est meilleur qu'annoncé et se rapproche des 50%, il lui suffira de quelques députés issus de petits partis pour maintenir sa ligne générale.
L'Alliance démocratique (DA), qui promet de "sauver l'Afrique du Sud" et son économie, pourrait rafler 25% des voix, selon les sondages.
Les radicaux de gauche des Combattants pour la liberté économique (EFF) sont crédités d'environ 10%. Leur leader Julius Malema a fustigé, après avoir déposé son bulletin à Polokwane (nord), la longue attente aux bureaux de vote qui "incite les gens à partir avant de voter".
Mais la plus grande menace pour l'ANC pourrait provenir de l'Umkhonto We Sizwe (MK) de Zuma, crédité de jusqu'à 14% des suffrages, capitalisant sur les déçus du parti au pouvoir.
Face à une opposition morcelée, l'ANC affaibli devrait toutefois demeurer le premier parti au Parlement, où il détient actuellement 230 sièges sur 400.
L.Muratori--NZN