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Pour la première fois depuis une dizaine d'années, dans une zone rebelle du nord-ouest de la Syrie, l'agriculteur Mohammed Ramadan, n'a plus de mal à irriguer son champ grâce à la réhabilitation d'un réservoir qui a redonné vie aux terres de la région.
Le "barrage" vital d'al-Balaa, comme l'appellent les habitants, est situé au milieu de la plaine agricole d'al-Rouj, dans l'ouest de la région d'Idleb.
Il est utilisé comme réservoir pour collecter l'eau de pluie pendant l'hiver, et l'eau y est également pompée depuis le fleuve Oronte.
Après le déclenchement de la guerre civile en 2011, le réservoir a été mis hors service faute d'électricité et d'entretien des pompes.
Des infrastructures ont également été la cible de bombardements au cours des batailles qui ont permis aux factions opposées au régime syrien, dont des jihadistes, de prendre le contrôle de la zone.
Mais depuis le début de l'année, les pompes ont été réhabilitées sous la supervision du "Gouvernement de Salut", pouvoir civil mis en place par les jihadistes de Hayat Tahrir al-Cham (HTS) pour gérer les territoires sous leur contrôle.
"Il y a plus de dix ans, l'eau a cessé de parvenir au réservoir en raison des coupures d'électricité", déclare à l'AFP l'homme aux cheveux grisonnants en surveillant l'arrivée de l'eau sur ses terres.
"On avait l'habitude de récupérer l'eau de pluie et de l'utiliser une ou deux fois pour irriguer, mais maintenant, Dieu merci, l'eau de Ain Zarqa est revenue", ajoute cet homme du village d'al-Balaa, dans la région rebelle d'Idleb.
"Avant, on arrosait les légumes à la hâte, de manière insuffisante", explique M. Ramadan, en pompant l'eau d'un canal dérivé du réservoir.
"Avec le retour de l'eau, toute la région d'al-Rouj revit. Même les herbes repoussent... On en a tous bénéficié."
"On a commencé à planter des tomates, des aubergines et des poivrons", se réjouit-il.
- "La vie a repris" -
La plaine d'al-Rouj, entourée de plus de soixante localités, est considérée comme le grenier des zones contrôlées par HTS dans le nord-ouest où vivent environ quatre millions de personnes, dont près de la moitié sont des déplacés.
"Notre agriculture se limitait aux haricots et aux tomates, alors qu'aujourd'hui on peut cultiver (...) de nouvelles variétés", dont le coton, déclare Walid Mohammadia, 40 ans, en récoltant des courgettes.
Aux abords du réservoir, la plaine est verdoyante. Le bétail paît et les agriculteurs s'adonnent à la récolte.
"Quand l'eau est revenue, c'était comme si la vie avait repris", ajoute M. Mohammadia.
L'eau du réservoir, auquel 2.5 millions de dollars ont été alloués pour sa réhabilitation, alimente une superficie estimée à 4.000 hectares, selon le responsable du ministère de l'Agriculture et de l'Irrigation du "Gouvernement de Salut", Tammam al-Hamoud.
Cet ingénieur espère que les "terres qui dépendaient de la pluie seront désormais des terres irriguées" afin d'augmenter le nombre des récoltes et pour atteindre à terme, plus de 10.000 hectares de terres cultivées.
Parmi les cultures à promouvoir selon lui, figure le coton ou l'"or blanc", comme il l'appelle, qui nécessite beaucoup d'eau. Il met en avant son "importance économique pour approvisionner les usines, en plus d'employer de la main d'œuvre" dans la région.
- Mécontents -
"Nous stockons actuellement l'eau dans le réservoir pour (...) augmenter les superficies irriguées afin d'accroître la production agricole", explique Jihad al-Sawaq, directeur de la division des projets et des stations de pompage d'al-Rouj.
"Nous allons encourager plusieurs cultures stratégiques, notamment la betterave sucrière, le tournesol et le soja, qui s'étaient interrompues depuis 2011", ajoute-t-il, exprimant l'espoir que cela contribuera à la relance économique de la région.
Mais la réhabilitation du réservoir fait des mécontents, comme Zakwan Al-Hamdoun, un éleveur de 53 ans.
L'homme réside depuis cinq ans dans un camp de déplacés à al-Balaa, à la périphérie du réservoir: "On avait l'habitude de faire paître les moutons à l'intérieur du réservoir, et aujourd'hui, ils le remplissent pour irriguer les terres agricoles".
"Où allons-nous prendre les moutons maintenant que les pâturages se sont raréfiés ?", s'exclame-t-il. "Nous voulons que le gouvernement (local) nous aide au moins en nous fournissant du fourrage".
J.Hasler--NZN