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La ville de Nouméa, capitale de la Nouvelle-Calédonie, est repassée "en totalité" sous le contrôle des forces de l'ordre vendredi, selon les autorités, sur lesquelles les loyalistes mettent la pression pour mettre fin aux blocages qui se multiplient depuis deux semaines et demie.
Quelque 400 policiers et gendarmes, parmi les 3.500 déployés dans l'archipel du Pacifique sud, ont détruit 26 barrages à Rivière-Salée, le dernier quartier de la commune de Nouméa encore bloqué, selon le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.
Lors de l'opération menée dans ce quartier du nord de la ville, douze personnes ont été interpellées, ce qui porte à 666 le nombre d'interpellations en Nouvelle-Calédonie en lien avec les émeutes, selon le haut-commissariat.
La situation sur le territoire océanien, en proie depuis le 13 mai à sa plus grave crise depuis les années 1980, "s'améliore sensiblement", a assuré le représentant de l'Etat dans un communiqué.
"Les premiers blindés Centaure de la gendarmerie arrivent dans quelques heures en Nouvelle-Calédonie pour aider nos forces de l'ordre à mettre fin à tous les barrages et rétablir complètement l'ordre républicain dans l'archipel", a indiqué Gérald Darmanin vendredi après-midi (à Paris) sur X. Six de ces blindés nouvelle génération doivent être acheminés d'ici huit jours, a précisé à l'AFP le ministère de l'Intérieur.
Les émeutes, déclenchées par le vote à Paris d'une réforme du corps électoral accusée par les indépendantistes de marginaliser la population autochtone kanak, ont conduit à la mort de sept personnes dont deux gendarmes, et au blocage de nombreuses voies sur la grande île.
Un couvre-feu a été mis en place et reste en vigueur sur l'ensemble du territoire.
- "Ce n'est pas la fin" -
Si l'opération de police de vendredi, menée par des unités d'élite de la police (RAID) et de la gendarmerie (GIGN), a permis de lever les derniers blocages à Nouméa, des barrages restaient présents en périphérie. Et les militants indépendantistes restent déterminés à poursuivre leurs actions de terrain.
Selon une journaliste de l'AFP sur place, un autre barrage était en cours de démantèlement vendredi à La Tamoa, non loin de l'aéroport international de La Tontouta, fermé aux vols commerciaux jusqu'à lundi matin.
Taoun, 49 ans, observe la scène sur le bord de la route. "C'est la quatrième fois" que le barrage est détruit, selon ce militant, prêt à revenir dès que les forces de l'ordre "auront fini de déblayer".
"Pour nous, ce ne sera pas la fin du mouvement, on a besoin de se faire entendre", martèle Priscilla Païta, 24 ans. Les opposants à la réforme du corps électoral demandent toujours son retrait.
Dans le quartier du Col de la pirogue, à Païta, l'état d'esprit semble identique. Des jeunes se sont équipés en pierres et branches de bambou fraîchement coupées, et le barrage levé était déjà en cours de reconstruction alors que la nuit commençait à tomber.
A Dumbéa, une épaisse fumée noire s'élevait au-dessus d'une salle de sport tandis qu'à Poya un barrage indépendantiste restait en place, dans le calme, ralentissant considérablement le trafic.
- "Ça urge" -
Dans le camp des loyalistes, les appels à faire cesser l'ensemble des blocages se font chaque jour plus pressants.
"L'Etat a les moyens d'agir, on l'a vu sur Rivière-Salée, ça urge de le faire partout où il le faut", a martelé vendredi lors d'une conférence de presse la cheffe de file des non-indépendantistes et présidente Renaissance de la province Sud, Sonia Backès.
"Il faut s'occuper de ceux qui ont mis les émeutiers dans la rue. Vous devez interpeller les commanditaires des actions entreprises depuis trois semaines. [...] La Nouvelle-Calédonie ce n'est pas une zone de non-droit, ce n'est pas le Far West", a renchéri Nicolas Metzdorf, député Renaissance de Nouvelle-Calédonie.
Pour les acteurs économiques, le temps presse, alors que les approvisionnements n'ont repris que de manière sporadique.
Des produits alimentaires et pharmaceutiques ont été acheminés vers la province Nord par des navires militaires. Coupée de la capitale en raison d'une route impraticable pour les poids lourds depuis le début de la crise, cette partie du Caillou est confrontée aux pénuries.
Les troubles sur l'archipel ont déjà des répercussions sur l'emploi.
Thierry Santa, membre du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie en charge du secteur du travail, estime à "plus de 500" le nombre d'entreprises "détruites".
Ces sociétés "n'ont pas pu faire autrement que de licencier d'ores et déjà une partie de leurs salariés", selon ce responsable gouvernemental, qui évoque "plus de 5.000 personnes potentiellement concernées".
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G.Kuhn--NZN