AEX
-11.9800
Le camp de la cheffe du gouvernement italien Giorgia Meloni est bien parti pour dépasser celui du président français Emmanuel Macron au Parlement européen, au moment où la dirigeante d'extrême droite entend donner de la voix sur la répartition des postes-clés dans l'UE.
Le Parti Fratelli d'Italia de Mme Meloni et d'autres forces d'extrême droite ont augmenté leur nombre de députés à Strasbourg après les élections européennes du 9 juin.
En revanche, le groupe Renew Europe, où se retrouvent libéraux et centristes, dont les élus français de Renaissance, a perdu des sièges. Il en a même encore perdu vendredi, avec le départ annoncé des eurodéputés du parti tchèque Ano, du milliardaire eurosceptique et ancien chef du gouvernement Andrej Babis.
Le groupe des Conservateurs et réformistes européens (ECR), où siège Fratelli d'Italia, revendique aujourd'hui la troisième place au Parlement européen, avec 83 députés contre 81 pour Renew (74 sans les sept eurodéputés tchèques qui n'ont pas encore totalement officialisé leur départ).
Un écart qui change tout, selon la cheffe du gouvernement italien. Par tradition, les postes-clés dans l'Union européenne doivent être attribués en tenant compte des résultats des élections européennes.
Or, les forces politiques arrivées en tête le 9 juin, les chrétiens démocrates du PPE, suivis des socio-démocrates du groupe S&D, entendent bien reconstituer la majorité dont ils disposaient avec les centristes de Renew lors de la législature précédente.
Ensemble, ces trois groupes politiques disposent d'une majorité confortable d'environ 400 sièges sur un total de 720 eurodéputés.
Forts de ce calcul, les dirigeants européens PPE, S&D et Renew, ont commencé à discuter entre eux lundi soir, lors d'un sommet informel des 27, de l'attribution des "top jobs" de l'UE.
- "Surréaliste" -
Au grand dam de Mme Meloni qui a jugé "surréaliste" de ne pas être invitée à la table des négociations. "Les élections ont clairement déplacé le centre de gravité de l'Europe vers la droite", sans que cela ne change rien à la table des 27, a-t-elle déploré dans un entretien au quotidien italien Il Giornale.
Et la dirigeante compte bien se rattraper à l'occasion du prochain round de négociations, prévu les 27 et 28 juin à Bruxelles lors d'un nouveau sommet européen.
La bataille pour la troisième place n'est toutefois pas terminée. Il faudra attendre mercredi pour mesurer avec exactitude le rapport de forces entre ECR et Renew, à l'issue de la constitution formelle des groupes, et des derniers ralliements toujours possibles avant cette date.
Le paysage devrait donc être éclairci pour le sommet des 27 qui doit désigner les présidents de la Commission européenne, du Conseil européen, ainsi que le chef de la diplomatie européenne.
Ursula von der Leyen, soutenue par le PPE, paraît bien placée pour se voir confier un second mandat à la tête de la Commission européenne. Un accord s'est largement dessiné sur son nom lundi soir. Si ce choix est confirmé jeudi ou vendredi, elle devra encore recevoir l'approbation du Parlement européen.
La présidence du Conseil européen, qui rassemble les dirigeants des 27, devrait revenir à l'ancien Premier ministre socialiste portugais Antonio Costa, et le poste de cheffe de la diplomatie européenne à la Première ministre estonienne Kaja Kallas, membre de Renew.
- "Surprises" -
Ces décisions se prennent à la majorité qualifiée entre les 27 et Mme Meloni n'a, a priori, pas les moyens de s'y opposer. "Elle n'est pas faiseuse de rois, en aucune circonstance", a résumé un diplomate européen rompu aux négociations entre les Etats membres de l'UE.
Au Parlement européen, le camp de Mme Meloni, même associé au reste de l'extrême droite, dont le Rassemblement national français de Jordan Bardella ou le Fidesz de Viktor Orban, n'a pas la majorité.
Même si l'ECR devait confirmer sa troisième place, cela ne changerait pas l'équilibre au sein du Parlement, fait valoir une source parlementaire du PPE.
Pas de quoi cependant décourager Mme Meloni.
"Je pense que dans l'actuel parlement, sur plusieurs dossiers, nous verrons qu'il peut y avoir un changement dans les sujets traités, dans les priorités, dans la façon de considérer certaines politiques", a-t-elle affirmé, promettant des "surprises".
A.P.Huber--NZN