Zürcher Nachrichten - Le Rassemblement national, la marche d'un demi-siècle vers le pouvoir en France

EUR -
AED 4.08608
AFN 76.20232
ALL 99.085593
AMD 431.447207
ANG 2.003502
AOA 1033.744362
ARS 1074.095375
AUD 1.625105
AWG 2.005217
AZN 1.889821
BAM 1.956388
BBD 2.244505
BDT 132.841748
BGN 1.95688
BHD 0.419228
BIF 3222.669322
BMD 1.112465
BND 1.435532
BOB 7.698765
BRL 6.160721
BSD 1.111649
BTN 92.863832
BWP 14.637258
BYN 3.637607
BYR 21804.306351
BZD 2.240805
CAD 1.501994
CDF 3193.886248
CHF 0.943798
CLF 0.037275
CLP 1028.47118
CNY 7.845098
CNH 7.849823
COP 4617.273238
CRC 576.501904
CUC 1.112465
CUP 29.480312
CVE 110.299663
CZK 25.110105
DJF 197.96111
DKK 7.457929
DOP 66.79099
DZD 147.607269
EGP 54.133082
ERN 16.686969
ETB 132.532807
FJD 2.441805
FKP 0.847207
GBP 0.833842
GEL 3.036902
GGP 0.847207
GHS 17.487282
GIP 0.847207
GMD 76.20392
GNF 9604.018216
GTQ 8.598702
GYD 232.582501
HKD 8.661482
HNL 27.598673
HRK 7.563659
HTG 146.511312
HUF 394.763639
IDR 16904.567223
ILS 4.210401
IMP 0.847207
INR 92.952762
IQD 1456.257652
IRR 46826.405445
ISK 151.706984
JEP 0.847207
JMD 174.652532
JOD 0.788292
JPY 160.103122
KES 143.407328
KGS 93.724696
KHR 4516.622421
KMF 490.986189
KPW 1001.217518
KRW 1485.485538
KWD 0.339379
KYD 0.926395
KZT 534.53201
LAK 24547.81785
LBP 99552.660428
LKR 338.648602
LRD 222.339867
LSL 19.335577
LTL 3.284818
LVL 0.672919
LYD 5.278659
MAD 10.770985
MDL 19.382178
MGA 5048.518505
MKD 61.499825
MMK 3613.241658
MNT 3780.154694
MOP 8.915222
MRU 44.021835
MUR 50.862069
MVR 17.087279
MWK 1927.692449
MXN 21.51679
MYR 4.67568
MZN 71.030576
NAD 19.335577
NGN 1822.906544
NIO 40.912858
NOK 11.664703
NPR 148.590375
NZD 1.77606
OMR 0.428265
PAB 1.111699
PEN 4.178613
PGK 4.415388
PHP 62.356424
PKR 308.938497
PLN 4.273958
PYG 8652.60255
QAR 4.050718
RON 4.975056
RSD 117.081358
RUB 103.266843
RWF 1500.08491
SAR 4.174079
SBD 9.241174
SCR 14.791613
SDG 669.16071
SEK 11.343451
SGD 1.435992
SHP 0.847207
SLE 25.416816
SLL 23327.820913
SOS 635.291084
SRD 33.858415
STD 23025.771364
SVC 9.727057
SYP 2795.100635
SZL 19.327769
THB 36.641247
TJS 11.81676
TMT 3.893626
TND 3.37156
TOP 2.605506
TRY 37.978098
TTD 7.558715
TWD 35.675623
TZS 3037.028353
UAH 46.028965
UGX 4112.292353
USD 1.112465
UYU 46.264539
UZS 14151.447318
VEF 4029961.491408
VES 40.910734
VND 27388.878691
VUV 132.074033
WST 3.112078
XAF 656.192712
XAG 0.036251
XAU 0.000424
XCD 3.006492
XDR 0.822395
XOF 656.16321
XPF 119.331742
YER 278.477705
ZAR 19.260267
ZMK 10013.534008
ZMW 29.487592
ZWL 358.21315
  • AEX

    5.9200

    903.47

    +0.66%

  • BEL20

    16.8600

    4232.61

    +0.4%

  • PX1

    7.5000

    7508.08

    +0.1%

  • ISEQ

    -45.8500

    9921.7

    -0.46%

  • OSEBX

    4.9300

    1412.29

    +0.35%

  • PSI20

    20.8200

    6737.35

    +0.31%

  • ENTEC

    -5.8300

    1416.23

    -0.41%

  • BIOTK

    -8.2600

    2572.57

    -0.32%

  • N150

    0.6600

    3324.46

    +0.02%

Le Rassemblement national, la marche d'un demi-siècle vers le pouvoir en France
Le Rassemblement national, la marche d'un demi-siècle vers le pouvoir en France / Photo: FRANCOIS LO PRESTI - AFP

Le Rassemblement national, la marche d'un demi-siècle vers le pouvoir en France

Désormais premier parti de France, le Rassemblement national est à l'origine un groupuscule d'extrême droite né il y a plus de 50 ans dont les outrances lui ont d'abord permis de s'immiscer avec fracas dans le paysage politique avant d'entamer une stratégie de dédiabolisation.

Taille du texte:

Ils sont quelques dizaines, ce jour d'octobre 1972, autour de Jean-Marie Le Pen, un ex-député poujadiste, petit parti populiste et corporatiste de l'après-guerre. Figurent notamment un ex-combattant français des Waffen-SS, Pierre Bousquet ou Roger Holeindre, partisan acharné de l'Algérie française.

Sur la banderole, "Front national pour l'unité française", rapidement résumé à ses deux premiers mots. Pour logo, une flamme tricolore, la même que celle du Mouvement social italien (MSI), le parti néo-fasciste le plus puissant d'Europe. Objectif : créer une vitrine pour fédérer toutes les extrêmes droites françaises, aussi éparpillées que marginalisées depuis la Deuxième guerre mondiale et la collaboration avec les nazis.

L'élection présidentielle de 1974 permet une première immixtion dans le jeu politique, avec la candidature de Jean-Marie Le Pen. A l'exploit d'avoir recueilli les 500 parrainages d'élus locaux nécessaires pour pouvoir se présenter à l'élection répond la déception d'un score famélique, 0,75%.

Le Front national végète ensuite plusieurs années. Son dirigeant, visage barré d'un bandeau et verbe haut, échoue à se présenter à la présidentielle de 1981.

- "Le Pen, le peuple" -

C'est deux ans plus tard, lors d'une élection municipale dans une petite ville du centre de la France, Dreux, que l'acte fondateur électoral du Front national advient. La formation d'extrême droite obtient 16,72% des suffrages exprimés, un séisme dont les répliques plongent immédiatement la droite dans un embarras dont elle ne s'est jamais véritablement sortie quarante ans plus tard.

A part quelques personnalités comme Simone Veil ou Jacques Toubon, les représentants de la droite plaident l'alliance.

L'opinion publique est néanmoins secouée par l'affaire. François Mitterrand, aussi. Le chef de l'Etat socialiste comprend que le FN peut fracturer la droite et décide de lui ouvrir grand les portes des plateaux de la télévision publique.

En juin 1984, la liste Front national conduite par Jean-Marie Le Pen aux élections européennes recueille 2,2 millions de voix, presque 11% des suffrages exprimés, portée par des slogans qui font florès : "La France aux Français", "Un million de chômeurs, c'est un million d'immigrés de trop" et, bientôt, "Le Pen, le peuple".

Car le Front national repense le logiciel de l'extrême droite autant que sa stratégie de conquête de l'électorat. S'il accueille indifféremment dans ses rangs catholiques intégristes, monarchistes, néo-païens, nostalgiques de Vichy voire des néo-nazis, il resserre son discours quasiment sur la seule supposée submersion migratoire.

Il ne s'agit plus de s'adresser à une frange marginale de la bourgeoisie conservatrice, synonyme d'impasse électorale, mais aux masses, principalement populaires, dans une logique volontiers populiste. Quitte à passer du libéralisme au souverainisme étatiste, concepts de toutes façons jugés mineurs à l'heure de la fin des idéologies.

La mise en place du scrutin proportionnel pour les législatives de 1986 - une tentative qui n'aura pas de suite - offre une première consécration, avec l'arrivée de 35 députés qui défendent le déremboursement de l'IVG ou le rétablissement de la peine de mort. "Nous étions l'avant-garde, sabre au clair, contre l'+Établissement+", se rappelle l'un d'entre eux, Bruno Gollnisch, dans une référence au "système" inlassablement combattu par les "lepénistes" et qui visait toujours la classe politique en place.

- Le "diable de la République" -

L'année suivante, Jean-Marie Le Pen apporte au Front national ce qui va devenir sa marque de fabrique : le goût du scandale. En renvoyant l'Holocauste à "un détail de l'Histoire", le président du mouvement à la flamme s'inscrit dans une tradition antisémite de l'extrême droite française.

L'épisode provoque condamnations unanimes, une condamnation de Jean-Marie Le Pen pour contestation de crime contre l'humanité, et convainc les derniers récalcitrants à droite de se ranger derrière la nouvelle doctrine de leur chef de file, Jacques Chirac : "Aucune alliance avec l'extrême droite".

Mais la lumière projetée sur le FN, loin de le brûler, attire au contraire davantage les foules séduites par ces transgressions xénophobes plusieurs fois condamnées par la justice. "Un Front (national) gentil, ça n'intéresse personne", résumait Le Pen, en ironisant : "avant le +détail+, 2,2 millions d'électeurs; après, 4,4 millions".

Les présidentielles de 1988 (14,39%) et 1995 (15,00%) confirment ce statut de dynamiteur de l'échiquier politique, porté par une série d'outrances : la théorisation de "l'inégalité des races" ou la relativisation de l'Occupation allemande en France, "pas particulièrement inhumaine".

Les élections municipales de 1995 confrontent le Front national à un fait inattendu: la victoire. Mais les équipes qui s'installent à Toulon, Vitrolles ou Marignane (sud-est de la France) trébuchent rapidement sur des scandales, démonstration d'une forme d'amateurisme voire d'incompétence qui relègue le parti à sa seule fonction protestataire.

Ces nuages annoncent un orage dévastateur: la tentative par le numéro deux, Bruno Mégret, de prendre le parti. Un "pu-putsch", dénonce Le Pen, qui conserve les clés de la maison, mais vidée des trois quarts de ses cadres.

La violence de l'affaire - qui va jusqu'à diviser la famille Le Pen elle-même - révèle, plus encore qu'une querelle d'hommes, une divergence de stratégie. Mégret veut conquérir le pouvoir en s'alliant avec la droite, à l'image des accords noués en catimini lors des élections régionales de 1998. Le Pen entend lui conserver jalousement son titre de "diable de la République".

En 2002, c'est un séisme qui ébranle le paysage politique français, lorsque Jean-Marie Le Pen réunit 16,8% des voix et se qualifie pour le second tour de la présidentielle. Le triomphe a son revers: pendant quinze jours, des millions de personnes défilent contre le racisme et son incarnation politique. Surtout, Jean-Marie Le Pen permet la réélection facile de son ennemi juré Jacques Chirac, en ne récoltant au final que 17,79% des voix au second tour.

- Respectabilité -

Cinq ans plus tard, Le Pen, vieillissant, est dépouillé d'une partie de son électorat par le représentant de la droite Nicolas Sarkozy à l'élection présidentielle, où il ne réunit que 10,44% des voix au premier tour.

Le Front national se cherche un second souffle, qu'il trouvera chez Marine Le Pen, fille du fondateur. Un changement de ligne? Pas sur le fond: "Je prends l'ensemble de l'histoire de mon parti" et "j'assume tout", prévient-elle le jour de son accession à la présidence du parti en 2011. Mais sur la forme, la stratégie se résume en un seul mot: "dédiabolisation".

La respectabilisation passe par des exclusions... y compris, en 2015, de Jean-Marie Le Pen, coupable d'avoir promis une prochaine "fournée" au chanteur juif Patrick Bruel.

Élection après élection, Marine Le Pen et les siens tentent de rassurer toutes les catégories de la population qui lui sont historiquement hostiles : la communauté juive, les cadres, les banlieusards, les jeunes, les retraités, les femmes... La tâche, immense, passe par un changement de nom: en 2018, le parti se rebaptise "Rassemblement National".

Le RN progresse, mais reste fragile, d'abord financièrement, au risque de montages financiers hasardeux sanctionnés par la justice - sans parler d'un emprunt, aujourd'hui remboursé, contracté en 2014 auprès d'une banque tchéco-russe et dont la créance avait été successivement rachetée par des sociétés russes, suscitant des soupçons de proximité avec le Kremlin.

Ensuite, le parti à la flamme subit la concurrence des "identitaires". Ces militants, qui mettent en avant une "identité blanche et une "unité culturelle en Europe", désespèrent de la "malédiction" Le Pen, alors que la cheffe de file du parti ne réunit que 33,90% des voix au second tour de la présidentielle de 2017.

En 2022, ils voient en Éric Zemmour un sauveur, tant sa candidature à l'Elysée est portée par des sondages flatteurs. Mais sa popularité s'effondre le jour du scrutin. Une nouvelle fois, Marine Le Pen est qualifiée pour le second tour face à Emmanuel Macron, qu'elle perd en réunissant 41,5% des voix.

Quelques semaines plus tard, 89 de ses candidats sont élus députés, vitrine pour achever de crédibiliser le parti à la flamme.

Ces nouveaux relais dans les territoires s'affichent cravatés et écharpés bleu-blanc-rouge dans les comices agricoles de leurs circonscriptions comme les réceptions à la préfecture, toujours dûment relayés sur les réseaux sociaux.

"C'est ce qui nous manquait", admet Marine Le Pen, qui promeut une nouvelle incarnation du Rassemblement National. Jordan Bardella, né en 1995, prend le parti en 2023 dans le cadre d'un "duo complémentaire" avec la fille de Jean-Marie Le Pen. A elle, l'Elysée; à lui Matignon, fanfaronnent les deux.

La formule ciselée, le cheveu impeccablement plaqué, le jeune homme plaît autant à la jeunesse - 1,2 millions d'abonnés sur TikTok - qu'à leurs parents - 100.000 adhérents revendiqués et près de 11 millions de voix au premier tour des législatives. Et, peut-être dimanche, une majorité à l'Assemblée.

L.Muratori--NZN