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La présidence tournante du Conseil de l'Union européenne exercée depuis début juillet par la Hongrie tourne à la confrontation, après la visite, sans la moindre concertation, du Premier ministre hongrois Viktor Orban au président russe Vladimir Poutine.
Lundi soir, la Commission européenne a annoncé qu'"à la lumière des récents développements", ses commissaires ne participeraient pas aux multiples réunions prévues en Hongrie lors des six mois à venir.
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a décidé que cette institution serait représentée "uniquement au niveau des hauts fonctionnaires" lors des rencontres informelles du Conseil prévues en Hongrie jusqu'à la fin de l'année, a annoncé son porte-parole Eric Mamer sur X.
Par ailleurs, le voyage du Collège des commissaires traditionnellement organisé dans le pays de la présidence "n'aura pas lieu", a-t-il ajouté. Ce voyage normalement prévu début juillet avait déjà été reporté à septembre, officiellement pour des raisons de calendrier.
"Sans précédent!", a réagi sur X Alberto Alemanno, professeur de droit européen à HEC Paris, évoquant un "boycott" de la présidence hongroise par la Commission européenne.
Viktor Orban a suscité colère et incompréhension au sein de l'UE en rendant visite à Vladimir Poutine début juillet, une "initiative de paix" non concertée avec les autres dirigeants du bloc européen.
La Hongrie occupe depuis le 1er juillet la présidence semestrielle du Conseil de l'UE, une fonction de coordination des travaux législatifs qui n'autorise pas à s'exprimer au nom des Européens sur la scène internationale.
Or, M. Orban est accusé d'avoir abusé de cette position pour discuter des voies d'un "cessez-le-feu" en Ukraine, en rupture avec la position européenne de soutien total à Kiev et d'isolement de la Russie.
- "Inacceptable" -
La Hongrie a vivement réagi, par la voix de son ministre des Affaires européennes, Janos Boka, à la décision de la Commission, s'interrogeant sur les motivations de cette dernière.
"L'UE est une organisation internationale constituée par ses Etats membres. La Commission européenne est une institution de l'UE (...) elle ne peut choisir les institutions et les Etats membres avec lesquels elle veut coopérer", a-t-il lancé sur X.
"Toutes les décisions de la Commission sont-elles désormais fondées sur des considérations politiques?", a-t-il ajouté.
Pour l'eurodéputée hongroise Kinga Gal, membre du Fidesz, parti de Viktor Orban, cette décision fait "clairement partie" de la "campagne électorale" d'Ursula von der Leyen et est "inacceptable".
La responsable allemande espère obtenir jeudi à Strasbourg le feu vert des députés européens pour un deuxième mandat de cinq ans à la tête la Commission.
L'UE étudie par ailleurs la possibilité de snober une réunion des ministres des Affaires étrangères prévue en août à Budapest.
Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, pourrait empêcher les ministres de se rendre en Hongrie le mois prochain en convoquant une autre réunion au même moment à Bruxelles, selon plusieurs diplomates en poste dans la capitale de l'UE.
Selon les diplomates interrogés par l'AFP, le boycott de la réunion à Budapest serait une façon de réprimander la Hongrie.
Si Josep Borrell convoquait une réunion à la même date, "cela retirerait la décision des mains des ministres. Il ne s'agirait pas pour eux de prendre la décision politique de ne pas aller en Hongrie mais plutôt du fait qu'ils devraient se rendre à Bruxelles", a expliqué l'un d'eux.
Viktor Orban critique les sanctions contre la Russie et l'aide militaire à Kiev et a constamment freiné les efforts de l'UE dans ces domaines.
Il s'oppose aussi à la perspective d'une adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne. Malgré la guerre, la Hongrie a renforcé ses liens avec le Kremlin, au nom de ses intérêts économiques notamment dans le domaine énergétique.
E.Leuenberger--NZN