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Le procès à huis clos du journaliste américain Evan Gershkovich a repris jeudi à Ekaterinbourg, ville où il avait été arrêté fin mars 2023, en plein reportage, pour "espionnage", accusation que la Russie n'a jamais étayée.
L'audience, la seconde depuis l'ouverture du procès le 26 juin, a débuté en fin de matinée dans cette cité de l'Oural, a indiqué un porte-parole du tribunal à une journaliste de l'AFP présente dans le palais de justice.
Aucune autre information n'a été communiquée, toute la procédure étant placée sous le sceau du secret.
Le correspondant du Wall Street Journal et ancien journaliste du bureau de l'AFP à Moscou est détenu depuis presque 16 mois.
Lui, son employeur, ses proches, son pays rejettent tous avec véhémence les accusations d'espionnage pesant contre lui et passibles de 20 ans de prison, tandis que les autorités russes s’efforcent de ne pas révéler le contenu du dossier qu'elles affirment avoir constitué.
A la demande de la défense, l'audience, prévue à l'origine en août, a été avancée à jeudi. Elle est fermée au public et contrairement à la fois précédente, les journalistes n'ont pas pu voir l'accusé dans la salle avant le début des débats.
Pour Washington, l'arrestation d'Evan Gershkovich, 32 ans, vise avant tout à monnayer un possible échange de prisonniers.
Moscou a admis négocier sa libération et le président russe Vladimir Poutine a évoqué lui-même le cas de Vadim Krassikov, en prison en Allemagne pour un assassinat commandité attribué aux services spéciaux russes.
Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov s'est borné à dire mercredi, depuis le siège de l'ONU à New York, que des contacts étaient en cours "pour voir s'il est possible d'échanger quelqu'un contre quelqu'un", selon l'agence d'Etat TASS.
Fin juin, la Maison Blanche a dénoncé un "simulacre" de procès, répétant que M. Gershkovich n'avait "jamais travaillé pour le gouvernement" américain, n'était "pas un espion" et "n'aurait jamais dû être arrêté".
- Détention "arbitraire" -
Au premier jour de son procès, le 26 juin, Evan Gershkovich était apparu le crâne rasé, la coupe imposée aux prisonniers, mais toujours souriant dans la cage en verre réservée aux accusés. S'il ne peut cependant faire de déclarations, il a fait des signes aux personnes qu'il connaissait.
Il communique avec sa famille et ses proches via des lettres lues et censurées par l'administration pénitentiaire. Dans ces courriers, il dit garder le moral, attendre sa condamnation, vouloir voir le ciel plus souvent, le tout avec des traits d'humour.
Le reporter, enfant d'immigrés ayant fui l'URSS pour les Etats-Unis, s'était installé en Russie en 2017. Il était réputé pour la qualité et le professionnalisme de ses reportages.
Début juillet, un panel d'experts de l'ONU a estimé que sa détention était "arbitraire" et qu'il devait être libéré "sans délai".
Les enquêteurs assurent que M. Gershkovich, qui avait travaillé pour l'AFP à Moscou en 2020-2021, a collecté des informations sensibles pour la CIA sur l'un des principaux fabricants russes d'armements, l'entreprise Ouralvagonzavod.
Cette usine produit notamment des chars T-90 utilisés en Ukraine et ceux de nouvelle génération Armata, alors que son activité civile est la production de wagons de marchandises.
La Russie détient plusieurs autres Américains, dont la journaliste russo-américaine Alsu Kurmasheva, arrêtée en 2023 pour une infraction à la loi sur les "agents de l'étranger", et l'ex-Marine Paul Whelan, qui purge une peine de 16 ans de prison pour espionnage, une accusation qu'il conteste.
E.Leuenberger--NZN