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"Chavez vit", s'époumonent encore aujourd'hui les militaires vénézuéliens en hommage à Hugo Chavez décédé en 2013. Malgré tout, l'opposition espère que l'armée, pilier du pouvoir au Venezuela depuis 25 ans, respectera et fera respecter l'issue du scrutin présidentiel de dimanche.
Dauphin désigné de Chavez, le président sortant Nicolas Maduro, brigue un troisième mandat de six ans, face à l'ancien ambassadeur Edmundo Gonzalez Urrutia, donné favori dans les sondages.
Sous sa présidence, M. Maduro n'a fait qu'accroître l'influence des militaires, déjà particulièrement choyés par son prédécesseur Hugo Chavez (1999-2013). L'ancien chef d'Etat leur avait notamment donné des postes clé dans l'administration et l'économie. Et sa réforme constitutionnelle de 1999 leur a octroyé le droit de vote.
Outre les armes, les forces armées contrôlent aujourd'hui les sociétés minières, pétrolières et de distribution alimentaire, ainsi que les douanes et 12 des 34 ministères, dont des portefeuilles importants tels que le Pétrole, la Défense, l'Intérieur ou le Commerce.
"La force armée nationale bolivarienne me soutient, elle est chaviste, elle est bolivarienne, elle est révolutionnaire", a réaffirmé cette semaine M. Maduro.
"Je jure que jamais ce bâton (de commandement) ne tombera entre les mains d'un oligarque, d'une marionnette, d'un traître, je le jure, jamais! La victoire nous appartient", a-t-il lancé M.le 5 juillet à l'occasion de la fête de l'indépendance.
De son côté, le candidat de l'opposition Edmundo Gonzalez Urrutia, qui a remplacé au pied levé Maria Corina Machado, la leader de l'opposition déclarée inéligible, a appelé début juillet dans une lettre ouverte les militaires à "respecter et faire respecter (la) volonté souveraine" du peuple lors de la présidentielle de dimanche.
Les forces armées vénézuéliennes comptaient 343.000 hommes en 2020, selon l'Institut international d'études stratégiques (IISS), soit une taille similaire à celle de l'armée du Mexique, dont la population est pourtant quatre fois supérieure.
- "Privilèges" -
Après avoir été pendant des décennies équipé de matériel américain, le Venezuela a changé de camp sous Chavez, se fournissant chez la Russie, notamment en avions Sukhoi et fusils Kalachnikov. Début juillet, deux navires militaires russes ont notamment visité La Guaira, le port de Caracas.
L'opposition et les experts dénoncent des réseaux de corruption qui ont enrichi de nombreux officiers.
"Maduro n'a pas le leadership militaire en tant que commandant en chef. Il est en train de gagner les forces armées avec des privilèges, des promotions et la création de nouveaux postes", assure le général à la retraite Antonio Rivero, critique du chavisme en exil aux Etats-Unis.
Jusqu'ici, l'institution s'est montrée monolithique dans son soutien au président Maduro, en particulier lorsque les Etats-Unis, l'Union européenne et la plupart des pays d'Amérique latine ont rejeté sa réélection de 2018 jugée frauduleuse.
"Les militaires de haut rang sont devenus incroyablement puissants (...) et certains sont impliqués dans des affaires illicites, voire les dirigent", estime Rebecca Hanson, professeure au Centre d'études latino-américaines de l'Université de Floride. "Ils ont beaucoup à perdre si Maduro tombe".
Près de 50 hauts fonctionnaires, en activité ou à la retraite, figurent sur la liste des sanctions américaines. Les premiers ont été inclus en 2008 pour leurs liens présumés avec la guérilla colombienne. Par la suite, d'autres ont été accusés de trafic de drogue et, plus récemment, de violations des droits humains.
Parallèlement, les organisations de défense des droits humains dénoncent la détention pour des motifs politiques de dizaines de militaires (149 au 1er juillet) et la mort en détention de trois d'entre eux.
- "Boite noire" -
Renata Segura, du International Crisis Group, décrit les forces armées comme "la boîte noire la plus méconnue du Venezuela".
"C'est un monde très hermétique", mais en cas de victoire de l'opposition, "ce sera un acteur déterminant, soit pour faire pression sur le gouvernement afin qu'il accepte le résultat, soit pour sortir et réprimer s'il y a des protestations", dit-elle.
Depuis 1999, l'opposition n'a remporté que deux élections nationales: en 2007, lorsqu'un référendum visant à réformer la Constitution vénézuélienne a été rejeté, et en 2015, lorsqu'elle a obtenu la majorité absolue au Parlement.
Mme Segura rappelle un "précédent important" en 2015: l'actuel ministre de la défense, Vladimir Padrino, avait alors reconnu le résultat et avait salué "le comportement du peuple vénézuélien" lors d'une allocution.
F.Schneider--NZN