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De nouveaux rassemblements sont attendus mardi au Venezuela, où la tension ne cesse de monter après la mort d'au moins quatre personnes et des centaines d'arrestations lors de manifestations contre la réélection du président Nicolas Maduro.
Devant une communauté internationale de plus en plus critique à l'égard de Caracas, un bras-de-fer est engagé entre le pouvoir et l'opposition. Emmenée par sa cheffe Maria Corina Machado et le candidat Edmundo Gonzalez Urrutia, qui l'a remplacée au pied levé quand elle a été déclarée inéligible, l'opposition dénonce une "fraude massive".
Symbole après 25 ans de pouvoir chaviste, deux statues d'Hugo Chavez ont été déboulonnées par des protestataires dans le pays, aujourd'hui exsangue après des années de crise et de sanctions internationales. Président socialiste du Venezuela de 1999 jusqu'à sa mort en 2013, Hugo Chavez avait choisi Nicolas Maduro pour dauphin.
Lundi à Caracas, les forces de sécurité ont tiré du gaz lacrymogène et des balles en caoutchouc sur des manifestants. Aux cris de "Liberté, liberté !", les protestataires ont affiché leur colère après l'annonce de la réélection de M. Maduro pour un troisième mandat de six ans, à l'issue du scrutin de dimanche.
Le bilan des manifestations est désormais d'au moins quatre morts.
Outre "44 blessés", l'ONG Encuesta nacional de hospitales a recensé trois morts -- deux à Maracay, à 100 km à l'ouest de Caracas, et un dans la capitale - tandis que l'organisation Foro penal a enregistré un mort dans l'État de Yaracuy (nord-ouest).
Le ministère de la Défense a évoqué 23 militaires blessés. Le procureur général Tarek William Saab a fait état de l'arrestation de "749 délinquants" dans le cadre des manifestations, certains pour "terrorisme".
Dans ce contexte, l'opposition dénonce une "escalade de la répression" et a annoncé mardi matin l'arrestation à Caracas par les forces de l'ordre d'un important cadre du parti Voluntad Popular (VP), Freddy Superlano.
- "Coup d'Etat fasciste" -
Nicolas Maduro, 61 ans, a été officiellement proclamé lundi président, après l'annonce de résultats par le Conseil national électoral (CNE).
Sans fournir le détail des résultats, le CNE a affirmé que M. Maduro a obtenu 5,15 millions de voix (51,2%) devant Edmundo Gonzalez Urrutia, 4,5 millions de voix (44,2%).
Balayant les critiques de l'opposition et de la communauté internationale, le chef d'Etat a dénoncé une tentative de "coup d'État fasciste au Venezuela".
Mais l'opposante Maria Corina Machado a dit lundi soir aux médias que l'opposition avait les moyens de "prouver" la victoire de son candidat.
Selon elle, Edmundo Gonzalez Urrutia, un diplomate discret de 74 ans, a obtenu 6,27 millions de voix (73%), contre 2,7 millions pour Maduro. "Nous allons nous battre pour notre liberté", a lancé lundi soir M. Gonzalez Urrutia.
Mme Machado a affirmé que ces "preuves de la victoire" ont été fournies à "des dirigeants".
- "Assemblées" et "marches" -
Maria Corina Machado a appelé ses concitoyens à participer mardi à des "assemblées populaires" dans tout le pays pour soutenir une transition pacifique.
Le directeur de campagne du président-candidat, Jorge Rodriguez, a pour sa part appelé à "de grandes marches à partir de ce mardi pour célébrer la victoire et défendre la paix de la République".
Signe de la tension, des queues se sont formées devant des supermarchés. Certains magasins, dans les quartiers les plus pauvres, gardent leurs grilles fermées et ne laissent entrer les clients qu'un par un.
L'attitude de l'armée sera clef dans la crise postélectorale qui s'ouvre. Dès mardi, le ministre de la Défense, le général Vladimir Padrino, a "réaffirmé" la "loyauté absolue" des forces armées au président Maduro.
Ce dernier peut se féliciter du soutien de la Chine et de la Russie, qui a appelé l'opposition à "accepter sa défaite", ainsi que de ses alliés traditionnels (Cuba, Nicaragua, Honduras et Bolivie).
Il apparaît cependant de plus en plus isolé avec l'afflux de réactions internationales critiques ou sceptiques.
L'Organisation des États américains (OEA) a dénoncé mardi "une manipulation aberrante" lors du scrutin.
Neuf pays d'Amérique latine (Argentine, Costa Rica, Equateur, Guatemala, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine, Uruguay) ont appelé dans une déclaration commune à un "réexamen complet avec la présence d'observateurs électoraux indépendants".
Le Brésil et la Colombie, deux pays présidés par la gauche, ont demandé une vérification du dépouillement alors que les États-Unis ont affirmé "craindre que le résultat annoncé ne reflète pas la volonté ou le vote du peuple vénézuélien".
Le chef de la diplomatie de l'Union européenne, Josep Borrell a appelé à la "transparence totale".
Caracas a réagi en retirant son personnel diplomatique de sept pays d'Amérique latine (Argentine, Chili, Costa Rica, Panama, Pérou, République dominicaine et Uruguay) et en annonçant suspendre à partir de mercredi les vols avec le Panama et la République dominicaine.
M.Hug--NZN