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Vers une alliance historique à gauche: la France insoumise et le Parti socialiste ont conclu mercredi un accord pour les législatives. Mais le vote d'approbation interne aux socialistes s'annonce délicat et l'ex-Premier ministre Bernard Cazeneuve a déjà claqué la porte du PS.
EELV dimanche soir, le PCF mardi et le PS mercredi. La France insoumise, forte des 22% de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle, est en passe de réunir ses anciens concurrents pour les scrutins des 12 et 19 juin et réussir son OPA sur la gauche.
Après une semaine de négociations, Insoumis et socialistes se sont accordés dans la nuit de mardi à mercredi sur l'épineux dossier des circonscriptions, puis ont annoncé l'accord global dans l'après-midi.
Le but affiché de l'accord est d'"empêcher Emmanuel Macron de poursuivre sa politique injuste et brutale et battre l'extrême-droite", déclarent de concert le PS et LFI.
Corollaire, "le Premier ministre serait issu du plus grand groupe à l'Assemblée, soit Jean-Luc Mélenchon" qui apparaît comme le grand gagnant de cette "Nouvelle union populaire écologique et sociale".
L'accord doit cependant encore être validé par les 300 membres du Conseil national du PS jeudi soir. Ce ne sera "pas une formalité, au contraire", avertit l'entourage du premier secrétaire Olivier Faure, car "il y aura des déçus, chez les fédérations moins servies que d'autres" en circonscriptions.
Dès mercredi, plusieurs figures historiques du PS, à commencer par François Hollande, ont regretté le choix de la direction du parti. Et l'ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve a carrément annoncé son départ du PS.
Plusieurs maires de grandes villes, dont Mathieu Klein (Nancy) et Johanna Rolland (Nantes), ont eux appelé à valider l'accord, tout en réaffirmant leur "profond attachement au projet européen" et à "une gauche de transformation de la société qui s'assure de la crédibilité et de la soutenabilité des mesures qu'elle propose".
Les socialistes obtiennent 70 circonscriptions, a indiqué la direction du PS à l'AFP, arguant que les "députés sortants désireux de l'accord ont été préservés".
Selon la liste consultée par l'AFP, une bonne vingtaine de circonscriptions sont gagnables. Mais trois sortants ont été sacrifiés: David Habib dans les Pyrénées-Atlantiques, Christian Hutin dans le Nord et Michèle Victory dans l'Ardèche. Auxquels s'ajoute la 1ère circonscription dans la Loire de Régis Juanico (Générations), que le PS pensait récupérer.
Le texte programmatique a aussi nécessité plusieurs compromis. Figure ainsi explicitement, à la demande du PS, "la défense de la République laïque et universaliste".
Les deux formations assument "des histoires différentes avec la construction européenne", mais l'objectif est commun: "mettre fin au cours libéral et productiviste de l'Union européenne".
LFI et le PS font un compromis lexical sur les traités en appelant à "ne pas respecter certaines règles" qui empêcheraient l'application du programme. "Nous parlons de désobéir pour les uns, de déroger de manière transitoire pour les autres".
Pour la retraite à 60 ans, elle sera "pour tous" mais le PS a fait ajouter: "avec une attention particulière pour les carrières longues, discontinues et les métiers pénibles".
N'ont pas posé de problème le SMIC à 1.400 euros nets, le blocage des prix de première nécessite, l'abrogation de la loi El-Khomri (une socialiste), la planification écologique, la VIe République...
- "Prouesse" -
Le nombre de circonscriptions obtenues est inférieur à celui d'EELV - une centaine dont une trentaine gagnable - mais supérieur aux communistes - 50 dont 16 gagnables.
La direction du PS estime qu'obtenir 70 circonscriptions est "une prouesse" au vu des "1,7% de la présidentielle", le score d'Anne Hidalgo.
Elle déplore en revanche la bataille perdue pour Lamia El Aaraje dans la 15e circonscription de Paris où va être investie l'insoumise historique Danielle Simonnet.
Mécontente pour cette protégée d'Anne Hidalgo, mais aussi pour d'autres circonscriptions, la fédération PS de Paris va probablement appeler ses représentants au Conseil national à voter contre l'accord, a indiqué à l'AFP Rémi Féraud, chef de la majorité socialiste au Conseil de Paris.
Anne Hidalgo, quant à elle, n'a pas l'intention de sortir de son silence, préférant "se concentrer sur Paris", selon son entourage à l'AFP.
Les nouveaux partenaires vont se retrouver pour une "photo de famille" rapidement, selon plusieurs cadres de partis, avant la convention d'investiture commune qui est en train d'être conçue pour samedi.
En attendant, Olivier Faure doit composer avec la fronde de plusieurs figures du parti. François Hollande a dit "récuser l'accord sur le fond et même sur les circonscriptions".
L'ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault a dénoncé auprès de l'AFP un "rafistolage" et le "prix exorbitant" payé par le PS.
Carole Delga, présidente PS de la région Occitanie, a fait état de sa déception quant au peu d'investitures accordées au PS (6 sur 49) dans sa région.
Face à cette fronde, Olivier Faure a, dans un tweet, cité Jaurès: "C'est en allant vers la mer que le fleuve est fidèle à sa source".
Les dissidences pourraient toucher tous les partis. A Vénissieux dans la banlieue de Lyon, la maire communiste Michèle Picard n'entend pas céder sa place à l'Insoumis investi, le journaliste controversé Taha Bouhafs.
J.Hasler--NZN