AEX
-11.9800
Aux portes d'une victoire historique en Irlande du Nord, le parti nationaliste Sinn Fein, partisan d'une réunification de toute l'Irlande, a promis samedi une "nouvelle ère", malgré le risque de paralysie politique.
Alors que progresse le long dépouillement des bulletins de vote déposés jeudi dans les urnes pour désigner les 90 élus de l'Assemblée locale, des résultats partiels donnent une légère avance au Sinn Fein face à son rival unioniste DUP, favorable au maintien au sein de la couronne britannique. C'est une première en cent ans d'histoire de la province, sous tension en raison du Brexit.
"C'est aujourd'hui un moment très important de changement", avec l'entrée dans "une nouvelle ère", s'est félicitée la dirigeante du Sinn Fein en Irlande du Nord, Michelle O'Neill, depuis sa circonscription de Mid Ulster, promettant de dépasser les divisions. "J'offrirai un leadership inclusif, qui célèbre la diversité, qui garantit les droits et l'égalité pour ceux qui ont été exclus, discriminés ou ignorés dans le passé".
Une victoire propulserait Michelle O'Neill au poste de cheffe du gouvernement local, qui doit être dirigé conjointement par nationalistes et unionistes en vertu de l'accord de paix de 1998.
A Belfast, le décompte donne jusqu'ici au Sinn Fein 23 des 77 sièges déclarés, contre 21 pour son rival unioniste du DUP, favorable à la couronne britannique.
Le parti nationaliste a déjà obtenu le plus de votes de première préférence (29% contre 21,3%) et la fin du dépouillement ne devrait pas inverser la donne.
Le leader du DUP, Jeffrey Donaldson, a reconnu sur Sky News que le Sinn Fein était sur le point de devenir le nouveau parti dominant à l'Assemblée.
Mais les pourparlers pour la formation d'un gouvernement s'annoncent difficiles et le risque de paralysie plane, les unionistes refusant de rejoindre un gouvernement tant que resteront en place les contrôles douaniers post-Brexit, qui menacent selon eux l'intégrité du Royaume-Uni.
"Je veux un gouvernement en Irlande du Nord, mais il doit être basé sur des fondations stables", a insisté M. Donaldson, déplorant que le protocole nord-irlandais porte "atteinte à l'économie" de la province et à sa "stabilité politique"
- "Des mois" de négociations -
Un autre ténor du parti, Edwin Poots, a prévenu que des négociations prendraient "des semaines, avec un peu de chance, ou même des mois", alors que le ministre britannique chargé de la province, Brandon Lewis, est attendu lundi à Belfast, selon des responsables politiques nord-irlandais.
"Les gens ont parlé et notre travail est maintenant de faire acte de présence. J'attends des autres qu'ils fassent de même", a dit Michelle O'Neill à des journalistes.
Elle a appelé à un "débat sain" sur l'avenir de l'Irlande du Nord, estimant que le nouvel exécutif devait s'attaquer en priorité à l'envolée du coût de la vie, après une campagne durant laquelle elle a insisté sur les questions sociales et sociétales plutôt que constitutionnelles.
Marquée par trois décennies de troubles sanglants entre unionistes et indépendantistes puis l'agitation causée par le Brexit, l'Irlande du Nord avait replongé dans l'incertitude en février, avec la démission du Premier ministre unioniste Paul Givan, mécontent de la situation post-Brexit.
"Le succès du Sinn Fein profite de la faiblesse de l'unionisme, à une période de changement véritable pour le Royaume-Uni après le Brexit. Il ne représente pas un changement radical des opinions en Irlande du Nord en faveur de la réunification", analyse pour l'AFP Katy Hayward, politologue à la Queen’s University de Belfast.
Elle note aussi une fracturation du vote unioniste et la progression du parti centriste Alliance.
- Revers pour Boris Johnson -
Ailleurs au Royaume-Uni, où se tenaient jeudi des élections locales, le Parti conservateur du Premier ministre Boris Johnson a essuyé un sévère revers, miné par le "partygate" et l'inflation, affaiblissant sa position. Ils ont perdu des centaines de sièges et une dizaine de conseils au profit des travaillistes et des libéraux-démocrates.
Boris Johnson s'est dit déterminé à rester au pouvoir. Mais ces piètres résultats le fragilisent et poussent des députés de son camp, inquiets pour les législatives de 2024, à s'interroger sur l'opportunité de continuer à le soutenir.
Pour convaincre, Boris Johnson devra offrir "un vrai plan d'action" mardi lors du traditionnel discours du trône où le gouvernement dévoilera ses priorités au Parlement, estime Simon Usherwood, politologue de l'Open University interrogé par l'AFP.
E.Leuenberger--NZN