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Les dirigeants des pays d'Asie du Sud-Est sont réunis mercredi au Laos, en présence d'un représentant birman, pour trois jours de discussions qui tenteront de relancer le processus de paix en Birmanie, au point mort depuis le coup d'Etat.
L'autre sujet prioritaire au programme du sommet de l'Association des nations d'Asie du Sud-Est (Asean), concerne la situation en mer de Chine méridionale, après plusieurs épisodes récents de tensions entre Pékin d'un côté, et Manille et Hanoï de l'autre.
Les échanges, qui se tiennent jusqu'à vendredi à Vientiane, incluront les principaux partenaires de l'Asean, invités habituels de la grand-messe annuelle, comme le Premier ministre chinois Li Qiang, le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken ou le nouveau Premier ministre japonais Shigeru Ishiba.
Le sommet représente une "grande opportunité" pour accroître la stabilité et la paix dans la région, a déclaré le Premier ministre laotien Sonexay Siphandone, dans son discours d'ouverture.
Le bloc de dix pays, souvent décrit comme un forum de discussions sans réel pouvoir, où les principes de non-ingérence et de consensus priment sur l'efficacité, essaye en vain de négocier une sortie de crise en Birmanie, Etat membre plongé dans le chaos depuis le coup d'Etat du 1er février 2021.
Le conflit, qui a tué plus de 5.300 civils et provoqué le déplacement de plus de 3,3 millions de personnes selon l'ONU, représente l'un des plus grands défis que l'association ait eu à affronter depuis sa création en 1967.
- La junte en difficulté -
L'Asean a bien établi une feuille de route vers la paix quelques semaines après le putsch, mais le texte est resté lettre morte auprès de la junte, aux prises dans des combats toujours plus violents avec des rébellions issues de l'opposition politique et de minorités ethniques.
Le sommet laotien pourrait marquer un tournant: pour la première fois en trois ans, Naypyidaw a envoyé un "représentant non-politique", seule présence tolérée par le bloc qui a banni les généraux au pouvoir.
La présence du secrétaire permanent du ministère des Affaires étrangères, Aung Kyaw Moe, intervient dans un contexte difficile sur le terrain pour le pouvoir militaire, qui a reculé ces derniers mois dans plusieurs régions frontalières.
La junte a appelé fin septembre à un cessez-le-feu et à des pourparlers de paix, mais sa proposition a pour le moment été rejetée par ses adversaires.
Des responsables de l'Asean interprètent ce geste de la junte comme un signal que Naypyidaw serait prêt à s'engager dans une voie diplomatique.
- "Aucun progrès" -
Mais Daniel Kritenbrink, sous-secrétaire d'Etat américain en charge de l'Asie de l'Est, a partagé ses doutes.
Le responsable a assuré qu'Antony Blinken ferait pression sur la junte en vue de réduire les violences, libérer des prisonniers politiques et nouer un dialogue avec l'opposition.
"Malheureusement, nous n'avons vu virtuellement aucun progrès sur aucune de ces priorités", a-t-il fait remarquer.
La crise birmane, qui se décline sur des volets humanitaire, politique et économique, a mis en lumière des divisions au sein du bloc, où l'Indonésie, la Malaisie et les Philippines apparaissent comme les partisans d'une ligne plus dure vis-à-vis des généraux.
"C'est la crise birmane qui va définir le futur de l'Asean, sur sa capacité à naviguer un paysage géopolitique en mutation", estime Mustafa Izzuddin, analyste basé à Singapour.
En parallèle des pourparlers menés par l'Asean, la Thaïlande doit accueillir en décembre une réunion informelle, possiblement en présence de la Chine et de l'Inde, sur la Birmanie.
Un porte-parole de l'Union nationale Karen (KNU), qui combat la junte depuis des décennies dans l'Est du pays, a suggéré de son côté que l'Asean devrait se "coordonner" avec la Chine et les Etats-Unis.
Le président philippin Ferdinand Marcos devrait de son côté encourager les discussions sur la mer de Chine méridionale, où de nombreux accrochages ont eu lieu ces derniers mois entre navires chinois et philippins.
Début octobre, le Vietnam a condamné le "comportement brutal" de la Chine, après l'agression de pêcheurs vietnamiens.
La Chine revendique la quasi-totalité de cette mer. Le Vietnam, les Philippines, la Malaisie et Brunei ont en outre chacun des intérêts qui se chevauchent dans certaines parties.
Au coeur des différends se trouve la question de l'appartenance des centaines d'îlots, atolls et récifs, à l'origine inhabités, qui parsèment cette mer à forts enjeux commerciaux et stratégiques.
La crise au Moyen-Orient et la guerre en Ukraine devraient aussi occuper les débats.
L.Zimmermann--NZN