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Comme un air de déjà vu: avec le retour au pouvoir de Donald Trump, la Californie compte reprendre la tête de la "résistance" au président républicain en fédérant plusieurs Etats démocrates en matière d'immigration, d'avortement ou d'environnement.
Lors de son premier mandat, le tribun avait notamment essayé d'annuler l'exception fédérale qui permet au "Golden State" d'imposer ses propres normes de pollution, plus strictes qu'ailleurs aux Etats-Unis.
Sa large réélection cette semaine, avec un programme d'expulsions massives d'immigrés clandestins, augure de nouveaux bras de fer.
De nombreuses associations craignent par exemple que le nouveau président tente de s'en prendre à la pilule abortive.
"Notre combat pour la liberté et les opportunités perdure", a réagi mercredi le gouverneur démocrate de Californie, Gavin Newsom, dès le lendemain des résultats.
"Nous avons l'intention de nous tenir aux côtés des Etats de tout le pays pour défendre notre Constitution et faire respecter l'Etat de droit", a-t-il averti, en louant le "fédéralisme" américain, qui laisse une latitude importante aux 50 Etats du pays pour s'administrer.
Le procureur général de Californie, Rob Bonta, a lui expliqué se préparer à contester en justice les mesures d'un futur gouvernement Trump, chaque fois que cela sera nécessaire.
"Peu importe ce que l'administration qui arrive a en réserve [...], nous continuerons à contrôler les excès et à repousser les abus de pouvoir", a-t-il insisté.
- Batailles judiciaires -
Les responsables d'autres Etats démocrates, dont New York, l'Illinois, l'Oregon et Washington, ont également annoncer leur volonté de résister.
"Si vous essayez de nuire aux New-Yorkais ou de faire reculer leurs droits, je vous combattrai à chaque étape", a par exemple promis la gouverneure de l'Etat de New York, Kathy Hochul.
Des discussions sont déjà en cours pour coordonner la bataille anti-Trump devant les tribunaux.
Les Etats peuvent demander aux juges fédéraux de geler les politiques de l'administration au pouvoir, lorsqu'elles sont susceptibles d'enfreindre la Constitution.
Une prérogative largement utilisée lors de la première présidence Trump, qui a contrarié les efforts du milliardaire pour se débarrasser de certaines politiques migratoires ou de santé passées sous Barack Obama.
A elle seule, la Californie a engagé plus de 100 procédures judiciaires contre les politiques de Donald Trump lors de son dernier mandat.
Ces tactiques dilatoires ont été reprises par de nombreux Etats républicains sous Joe Biden.
"Ces procédures avancent aussi vite qu'un escargot", rappelle à l'AFP Kevin Johnson, professeur de droit à l'université de Californie à Davis. "Certaines affaires font le tour des juridictions inférieures et, lorsqu'elles arrivent devant la Cour suprême, il y a un nouveau président."
- Trump, en colère -
Face à cette mutinerie qui se reconstitue, Donald Trump a exprimé sa colère vendredi, en traitant de "racaille" Gavin Newsom, son ennemi juré à la tête de l'Etat le plus peuplé du pays.
Le démocrate "essaie de TUER la belle Californie", a-t-il lancé sur son réseau Truth Social, en dénonçant sa volonté d'"arrêter toutes les choses GENIALES qui peuvent être faites pour rendre sa grandeur à la Californie".
L'immigration va encore être au centre de la bataille entre les Etats démocrates et la Maison Blanche.
Lors du dernier mandat de M. Trump, la Californie avait été la première à se déclarer comme un "Etat sanctuaire", où les forces de l'ordre locales sont interdites de collaborer avec la police fédérale pour identifier les sans-papiers.
Le tribun républicain pourrait faire pression sur les Etats rétifs, en suspendant leurs financements fédéraux.
Plus expérimenté, il évoque aussi cette fois des mesures plus radicales, comme des expulsions accélérées sans passer par les tribunaux, ou l'intervention de l'armée le long de la frontière mexicaine.
Des actions qui seraient sans précédent et promises à des contestations judiciaires.
Le coût de ces batailles promet de peser sur le budget des Etats impliqués. Mais la Californie, berceau de la tech américaine et des énergies renouvelables, reste une locomotive économique du pays.
La résistance pourrait toutefois être moins aisée, observe Julian Zelizer, professeur d'histoire politique à l'université de Princeton. Car Donald Trump a cette fois été élu avec une avance assez nette, et a même amélioré son score dans de nombreux Etats démocrates.
"Politiquement, cela pourrait être un peu plus difficile (...) de recommencer", estime-t-il.
F.E.Ackermann--NZN