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Une centaine de personnes ont été arrêtées en Géorgie lors du deuxième jour de manifestations déclenchées par la décision du gouvernement de reporter les discussions sur l'adhésion à l'Union européenne, en pleine crise post-électorale, ont annoncé les autorités samedi.
Ces 107 personnes ont été placées en détention pour "désobéissance aux ordres de la police" et "des actes de hooliganisme" lors de la manifestation de vendredi soir, a précisé le ministère de l'Intérieur.
Durant celle-ci, la police anti-émeute a de nouveau utilisé gaz lacrymogène et canons à eau contre les manifestants, qui de leur côté jetaient des œufs et des lançaient des fusées d'artifice, selon des journalistes de l'AFP sur place.
"Tout au long de la nuit (...) les manifestants ont lancé divers objets, notamment des pierres, des engins pyrotechniques, des bouteilles en verre et des objets métalliques, sur les forces de l'ordre", a affirmé le ministère, en ajoutant que "10 employés du ministère de l'Intérieur ont été blessés".
Concernant la manifestation de jeudi, il avait fait état de 32 officiers blessés et de 43 manifestants arrêtés.
Le pays du Caucase est dans la tourmente depuis que le parti au pouvoir, Rêve géorgien, a proclamé sa victoire aux élections de fin octobre. L'opposition et la présidente Salomé Zourabichvili disent le scrutin entaché de fraudes.
La Géorgie a obtenu officiellement le statut de candidat à l'adhésion à l'UE en décembre 2023, mais Bruxelles a depuis gelé le processus, accusant l'exécutif d'opérer un grave recul démocratique.
- Dispersion violente -
Vendredi soir, des milliers de personnes se sont à nouveau rassemblées devant le Parlement à Tbilissi à l'appel de l'opposition pro-européenne, malgré la dispersion violente de la manifestation la veille.
La chaîne de télévision indépendante Pirveli a affirmé qu'une de ses journalistes avait été hospitalisée avec des blessures graves après avoir été battue avec son cameraman par la police.
Des manifestations ont également eu lieu dans plusieurs autres villes de Géorgie vendredi, selon la chaîne de télévision Mtavari. Au moins huit manifestants ont été arrêtés dans la deuxième ville de Géorgie, Batumi, selon les médias locaux.
"Le mouvement de résistance a commencé. (...) Je suis solidaire", a déclaré vendredi soir dans un discours télévisé la présidente Zourabichvili, qui a constitutionnellement des pouvoirs limités. "Nous resterons unis jusqu'à ce que la Géorgie atteigne ses objectifs: revenir sur la voie européenne et obtenir de nouvelles élections".
Cette ancienne diplomate française, élue en 2018 dans son pays d'origine, avait participé jeudi à la première manifestation.
La France a appelé vendredi au "respect du droit de manifester pacifiquement" et souligné "soutenir les aspirations européennes" de la Géorgie, "qui ne doivent pas être trahies".
Le Conseil de l'Europe a condamné la "répression brutale des manifestations", en s'alarmant de la décision du gouvernement de suspendre ses négociations avec l'UE.
- "Supprimer toute dissidence" -
Amnesty Inernational a dénoncé une volonté de "supprimer toute dissidence".
L'Ukraine, qui avait elle-même connu en 2014 une révolution pro-européenne après que les autorités de l'époque avaient tenté sous la pression de la Russie de suspendre le rapprochement avec l'UE, a dénoncé un "recours à la force" et une "limitation des processus démocratiques" opérés "pour plaire à Moscou".
Contestant les résultats des législatives de fin octobre, l'opposition boycotte le nouveau Parlement et les manifestations se succèdent, jusqu'à présent sans faire plier le pouvoir.
Mme Zourabichvili exige que la Cour constitutionnelle annule les résultats, une demande qui a peu de chances d'aboutir.
Jeudi, le Parlement européen a adopté une résolution rejetant ces résultats, dénonçant des "irrégularités significatives". Le texte exige un nouveau scrutin dans un délai d'un an sous supervision internationale et des sanctions contre de hauts responsables géorgiens, dont le Premier ministre Irakli Kobakhidzé.
En réponse, ce dernier, en fonction depuis février et confirmé par les députés jeudi, a accusé le Parlement européen de "chantage".
O.Meier--NZN