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Les rues des grandes villes de Birmanie sont restées vides mardi et des habitants, retranchés dans leur domicile, ont applaudi en défi à la junte pour marquer le premier anniversaire du coup d’État qui a plongé le pays dans la violence.
Rangoun, la capitale économique, était déserte et de nombreux magasins ont gardé porte close. L'appel à la grève silencieuse, lancé par les opposants au régime, a été très suivi à travers toute la Birmanie, de l'État Shan (Est) à l'État Kachin (Nord) en passant par Mandalay (centre).
"Le silence est le cri le plus fort que nous pouvons lancer contre les soldats et leur sanglante répression", a écrit une opposante sur Twitter. Les photos de Birmans restés chez eux et saluant à trois doigts en signe de résistance ont afflué sur les réseaux sociaux.
En fin d'après-midi, des applaudissements soutenus ont retenti dans plusieurs quartiers de Rangoun et de Mandalay pour marquer la fin de la grève silencieuse, ont constaté des journalistes de l'AFP. Les autorités ont averti que de telles actions pourraient être qualifiées de haute trahison, un crime passible de longues années de détention.
Des vidéos non datées fournies mardi par les autorités ont montré des manifestations pro-militaires dans des régions non spécifiées du pays. Des partisans du régime ont brandi le drapeau national et dénoncé les "Forces de défense du peuple", ces milices citoyennes qui mènent régulièrement des opérations de guérilla contre les forces de sécurité.
De son côté, le chef de la junte, Min Aung Hlaing, a promis d'organiser des élections "libres et équitables (...) dès que la situation serait pacifiée et stabilisée".
Depuis son coup d'Etat contre Aung San Suu Kyi, plus de 1.500 civils ont été tués et près de 9.000 sont détenus dans les geôles du régime, d'après un observatoire local qui dénonce des cas de viols, de torture et d'exécutions extrajudiciaires.
Face à cette spirale de violence, la communauté internationale a accru lundi la pression sur les généraux.
L'ONU a fait savoir qu'elle enquête sur des crimes contre l'humanité.
"La justice internationale a la mémoire très longue", a averti Nicholas Koumjian, à la tête du Mécanisme onusien d'enquête indépendant pour la Birmanie. Créé par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU en septembre 2018, ce groupe monte des dossiers en vue de procédures pénales.
Les Etats-Unis ont de leur côté imposé, en coordination avec le Royaume-Uni et le Canada, de nouvelles sanctions financières.
Sont notamment ciblées les plus hauts responsables judiciaires, le procureur général Thida Oo, le président de la Cour suprême Tun Tun Oo et le chef de la commission anti-corruption Tin Oo.
- "Pas oublié" -
"Tant que le régime privera le peuple de Birmanie de sa voix démocratique, nous le ferons payer aux militaires et à leurs partisans", a mis en garde le président américain Joe Biden. "Je dis au peuple birman: nous n'avons pas oublié votre combat".
Londres "défendra toujours le droit à la liberté (...) Nous ferons rendre des comptes à ce régime brutal et oppressif", a promis de son côté la ministre britannique des Affaires étrangères, Liz Truss.
Depuis le putsch qui a mis fin à une décennie de transition démocratique, Aung San Suu Kyi, 76 ans, est assignée à résidence dans un endroit tenu secret.
La prix Nobel de la paix est visée par une multitude de chefs d'accusation (violation d'une loi sur les secrets d’État datant de l'époque coloniale, fraude électorale, sédition, incitation aux troubles publics, corruption...).
Lundi, elle a été de nouveau inculpée, accusée cette fois d'avoir fait pression sur la commission électorale lors des législatives de 2020 remportées massivement par son parti.
Déjà condamnée à six ans de prison, elle risque des décennies de prison au terme de son procès.
Le pays a plongé dans le chaos ces douze derniers mois. La rébellion, menée par des milices citoyennes et des factions ethniques, s'intensifie, poussant la junte à encore durcir sa répression. Ces violences ont déjà fait plusieurs centaines de milliers de déplacés.
L'émissaire de l'ONU pour la Birmanie, Noeleen Heyzer, a plaidé pour la tenue prochaine d'une "réunion humanitaire" avec "la plupart des parties prenantes" au conflit.
Dans une déclaration commune, les ministres des affaires étrangères d'Australie, des États-Unis, ou encore de l'Union européenne ont exhorté la communauté internationale à mettre un terme "au flux d'armes" vers la Birmanie.
Des déclarations jugées trop timides pour de nombreux experts qui exhortent le Conseil de sécurité de l'ONU à décréter un embargo mondial sur la vente d'armes en Birmanie.
"L'heure n'est pas à la rhétorique, mais à une action significative", a déclaré Tom Andrews, rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l'homme en Birmanie.
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L.Zimmermann--NZN