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Des élus américains des deux côtés de la profonde fracture qui divise le pays ont entamé dimanche ce qui s'annonce comme une bataille tendue et durable sur l'avortement, aussi bien au niveau des Etats qu'au Congrès alors que la moitié du pays s'apprête à interdire l'IVG.
Pour la troisième journée consécutive, des partisans du droit à l'avortement se mobilisaient pour protester contre la décision de la Cour suprême d'annuler ce que beaucoup considéraient comme un droit acquis. Une veillée aux chandelles était prévue dimanche soir devant la haute cour, tout près du Capitole.
Dans un pays fragmenté entre Etats qui ont déjà ou vont bientôt nier le droit à l'avortement, qui était garanti depuis 1973, et ceux qui vont le maintenir, voire le renforcer, les divergences d'opinion ont parfois tourné à l'échauffourée lors de manifestations ce week-end, provoquant des dizaines d'arrestations.
- Contraception, pilule abortive -
En quelques heures vendredi, au moins huit Etats ont rendu immédiatement tout avortement illégal et sept autres ont prévu de faire de même dans les prochaines semaines.
Le gouverneur républicain de l'Arkansas Asa Hutchinson a jugé sur NBC que son Etat, où une mesure similaire a été adoptée, et d'autres devraient maintenant s'atteler à des aides aux mères et aux nouveaux-nés, en développant les services d'adoption.
Ce conservateur s'est félicité du retour aux Etats des décisions sur l'avortement, mais il s'est opposé à tout effort du parti républicain pour interdire l'IVG au niveau fédéral ou tenter de réduire l'accès à la contraception.
"En Arkansas, le droit à la contraception est important", a-t-il dit. "Il est reconnu. On n'y touchera pas".
La gouverneure républicaine du Dakota du Sud Kristi Noem a de son côté qualifié l'abandon de "Roe v. Wade" de "merveilleuse nouvelle pour la défense de la vie", mais elle a ajouté s'attendre à beaucoup de "débats et discussions" dans son Etat et ailleurs sur les législations à venir.
Elle s'est déclarée favorable à des lois interdisant "les avortements par télémédecine", une allusion aux pilules abortives prescrites en téléconsultation, une pratique approuvée par l'agence américaine des médicaments, la FDA.
- "Effroyable" -
De leur côté, les partisans du droit à l'avortement se sont rapidement mobilisés. L'organisation de planning familial Planned Parenthood a lancé samedi une procédure judidiaire dans l'Utah pour tenter de bloquer la mise en oeuvre automatique d'une loi qui interdirait quasiment toute IVG et criminaliserait les professionnels de santé qui la pratiqueraient.
Dans le Wisconsin, où une loi de 1849 interdisant l'IVG sauf pour les femmes dont la vie serait en jeu risque d'entrer en vigueur, le gouverneur démocrate Tony Evers a promis de gracier tout médecin qui serait poursuivi.
Dans l'Etat du Michigan dont le Congrès est contrôlé par les républicains, la gouverneure démocrate Gretchen Whitmer a promis de "se battre de toutes ses forces" pour protéger les droits des femmes. Elle aussi a saisi les tribunaux pour empêcher la mise en oeuvre d'une loi interdisant l'avortement.
Sur CNN, la candidate démocrate au poste de gouverneur de Géorgie, Stacey Abrams, a noté que son Etat allait interdire dans les prochains jours tout avortement après six semaines de grossesse. "C'est effroyable et c'est une erreur, et si je suis gouverneure, je ferai tout mon possible pour revenir dessus".
Dans les Etats où les lois seront les plus strictes, les femmes auront le choix entre garder le bébé, subir un avortement clandestin, se procurer des pilules abortives ou se rendre dans un Etat où l'IVG restera légale.
Pour l'élue progressiste Alexandria Ocasio-Cortez, les situations de cauchemar vont se multiplier. "Forcer des femmes à poursuivre leur grossesse contre leur gré va les tuer, ça va les tuer", s'est-elle exclamée sur NBC.
Elle a suggéré que l'administration Biden ouvre des cliniques de planning familial sur des terres fédérales dans les Etats interdisant l'avortement.
Selon un sondage publié dimanche par CBS, une majorité d'Américains désapprouvent la décision de la Cour suprême: 59% des personnes interrogées et 67% des femmes s'y opposent. En outre, 52% des sondés ont jugé qu'il s'agissait d'un recul pour les Etats-Unis, tandis que 31% ont jugé que c'était une avancée.
O.Pereira--NZN