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En patrouille dans la mer d'Azov, le capitaine ukrainien Olexandre Sourkov regarde de travers les mitrailleuses de son navire et déplore à quel point elles seront futiles en cas d'attaque russe.
"Nos armes sont conçues pour protéger la frontière, pas pour faire la guerre", déclare à l'AFP le capitaine de 32 ans en tenue de camouflage bleue à bord du bateau qui avance au large de Marioupol, ville portuaire et industrielle dans l'est de l'Ukraine.
"Mais s'ils attaquent, nous nous défendrons avec toutes les armes dont nous disposons."
La Russie a lancé samedi de nouvelles manœuvres navales d'ampleur à proximité, dans la mer Noire, avec plus de 30 navires qui ont pris la mer depuis Sébastopol et Novorossiïsk.
L'ancienne force navale ukrainienne, stationnée presque entièrement à Sébastopol, en Crimée, a pratiquement disparu lorsque la Russie a annexé la péninsule et saisi les navires ukrainiens en 2014.
Selon les analystes militaires, l'Ukraine ne dispose désormais que d'un seul navire de guerre et d'une dizaine de patrouilleurs du type de celui commandé par le capitaine Sourkov.
"La présence de patrouilleurs russes augmente. Nous les voyons souvent à la limite de notre territoire", explique Olexandre Sourkov. "Ils attisent les tensions."
- "Se préparer au pire" -
Marioupol se trouve tout près de la ligne de front séparant le territoire sous contrôle du gouvernement ukrainien de celui contrôlé par les séparatistes prorusses soutenus par la Russie dans la région de Donetsk, dans l'est de l'Ukraine.
La ville a subi des attaques répétées au cours des premiers mois du conflit en 2014 alors que les séparatistes tentaient de s'emparer de son port.
Kiev a pu résister, à un coût élevé. Selon les estimations de l'ONU, le conflit dans l'est de l'Ukraine a fait plus de 14.000 morts et plus de 1,5 million de déplacés.
Les garde-côtes qui patrouillent dans les eaux au large de Marioupol doutent d'être en mesure de repousser un assaut russe qui pourrait accompagner une invasion terrestre depuis l'est et le nord de l'Ukraine.
Les navires russes qui sont entrés dans cette région de la mer Noire "ont des armes qui peuvent être utilisées aussi bien sur terre qu'en mer. Ils ont des missiles", dit le capitaine des gardes-côtes ukrainiens Igor Tchernov.
"Nous comptons sur une solution diplomatique de la crise, mais il faut se préparer au pire", souligne Olexandre Sourkov.
- Opération compliquée -
Pour Nick Childs, expert des forces navales de l'Institut international d'études stratégiques à Londres, un assaut contre l'Ukraine ne serait pas facile à réaliser, même pour une puissance militaire comme la Russie.
"On a accordé beaucoup d'attention aux mouvements de navires amphibies russes dans la mer Noire pour renforcer les forces déjà présentes", dit-il à l'AFP. "Cependant, ce type d'opérations présenteraient des dangers pour les forces russes et l'Ukraine possède certaines capacités de défense côtière, notamment des missiles anti-navires en développement", ajoute-t-il.
"Nous avons de bonnes défenses le long de la côte de la mer Noire", souligne Mykola Beleskov, analyste ukrainien du Centre des études stratégiques.
"Ce serait une opération très compliquée pour la Russie", affime-t-il, "Si l'opération se limite à l'envoi de fusiliers-marins, on survivra".
Selon l'analyste militaire russe Pavel Felgenhauer, le Kremlin se prépare à une telle attaque depuis près d'un an.
"Ils ont organisé un exercice d'atterrissage sur le champ de tir d'Opouk, en Crimée, en avril dernier", dit-il. "Le plan est de concentrer une force d'assaut amphibie massive de 10.000 soldats dans la première vague. Les Ukrainiens ne pourraient jamais repousser cela".
"Et puis la deuxième vague viendrait. Un débarquement amphibie serait très difficile à surmonter car la Russie est supérieure non seulement en mer, mais aussi dans l'air".
L'idée qu'une guerre puisse éclater à tout moment est source d'anxiété pour la famille du capitaine Sourkov, qui passe la quasi-totalité de son temps en mer depuis le début de l'année.
"Ma femme est angoissée parce que je passe si peu de temps à la maison. Elle me demande tout le temps si tout va bien".
S.Scheidegger--NZN