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"Nous avons assez erré, assez souffert, nous allons enfin nous fixer ici et préparer l'avenir des enfants". Comme Hama Dawa, des milliers de réfugiés maliens au Niger tentent de s'intégrer aux communautés locales, faute de pouvoir retourner dans leur pays qui reste frappé par des attaques jihadistes.
"Rentrer au Mali n'est pas à l'agenda. Pour le moment nous construisons notre avenir ici: on est bien assistés et il y a la sécurité", affirme à l'AFP Mahamadou Seguid, un porte-parole de ces réfugiés maliens réinstallés sur un site à Ouallam, à une centaine de kilomètres au nord de Niamey.
Près de 6.000 y vivent: aux premières lueurs du jour, nombre d'entre eux sont déjà partis au marché pour vendre animaux et objets d'artisanat, d'autres sont ouvriers dans une briqueterie locale.
A l'entrée du site, des enfants pieds et torses nus font la queue devant une vendeuse de couscous, tandis que des écoliers, cartable sur le dos, se dirigent vers l'école.
Plus de 61.000 Maliens sont au Niger après avoir fui il y a dix ans le nord du Mali tombé sous la coupe de groupes jihadistes.
Avec la persistance des attaques jihadistes, dont celles du groupe Etat islamique au grand Sahara (EIGS), impossible pour eux de rentrer.
"Nous suivons avec une certaine inquiétude les développements au Mali" et "nous espérons qu'ils vont devenir plus positifs, parce que sans la paix il n'y aura pas de retour de réfugiés", explique à l'AFP Filippo Grandi, Haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés (HCR), qui s'est rendu récemment à Ouallam.
"Avec la dégradation de la sécurité dans la zone des trois frontières (Niger, Mali, Burkina), les conditions de leur retour au pays ne sont évidemment pas réunies", acquiesce Laouan Magagi, le ministre nigérien de l'Action humanitaire.
Résignés, les réfugiés tentent de s'intégrer à Ouallam, petite ville de 15.000 habitants, à travers des "espaces communs" mis en place par le HCR: magasins, centres de soins, écoles.
"Retourner au Mali? Mais, je n'ai presque plus rien là-bas, mes enfants sont nés au Niger, l'un va à l'école, leur avenir est ici", affirme Agaïchatou, une jeune maman originaire de Ménaka (nord-est du Mali), en pilant du mil, son bébé sur le dos.
- "Coexistence positive" -
Certains réfugiés ont reçu des moutons et des chèvres pour "reconstituer un troupeau" et "se procurer du lait", témoigne Ousseïni Hassane, un autre réfugié.
Depuis trois ans, le site aux allures de bidonville s'est mué en un vrai quartier: des petites maisons en briques ocres prennent progressivement la place des abris et bâches de fortune régulièrement détruits par les tempêtes de sable et les inondations.
Il y a une école, une fontaine connectée au réseau d'eau potable de la ville, des lampadaires solaires, une aire de jeux pour enfant, un espace vert.
Plus de 400 familles ont déjà été relogées dans des maisons où elles cohabitent avec des populations locales. Quelque 600 autres maisons vont bientôt sortir de terre, promet le HCR.
Ce "projet extraordinaire vise à assurer la coexistence positive entre autochtones et réfugiés", espère Filippo Grandi.
Sur les 600 élèves de l'école récemment construite, "40%" sont des enfants réfugiés, se félicite-t-il. Récemment, un jardin a été crée où réfugiés et Nigériens font pousser conjointement fruits et légumes.
Avec 464 exploitants - dont 404 femmes - assistés par des agronomes, le potager de plus de cinq hectares est doté d'un système d'irrigation par goutte à goutte et équipé de capteurs d'humidité de sol.
"Je pourrais enfin gagner mon propre argent après avoir vendu une partie de ma production", sourit Madinat, une réfugiée, arrosoir à la main.
D'après l'ONU, le Niger - un des Etats les plus pauvres au monde - abrite plus de 266.400 réfugiés nigérians et maliens auxquels viennent de s'ajouter plus de 13.000 Burkinabè fuyant les atrocités des jihadistes.
Pourtant, le Niger est également victime des atrocités des groupes jihadistes: leurs incursions meurtrières dans l'ouest et dans le sud-est ont déplacé 264.257 personnes à l'intérieur du territoire depuis 2015.
Ce flux humain est un "fardeau pour les communautés locales", prévient Filippo Grandi qui plaide pour une plus grande "aide financière internationale au Niger".
M.J.Baumann--NZN