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En ruines, le système de santé syrien doit faire l'objet d'une réflexion pour stopper l'exode à l'étranger du personnel médical, qui en est réduit à pratiquer "une médecine du IVe siècle", a réclamé une haute responsable de l'Organisation mondiale de la santé.
La situation en Syrie est "catastrophique", avec un nombre "ahurissant" de personnes dans le besoin et une malnutrition infantile à un niveau alarmant, explique dans un entretien avec l'AFP Mme Hanan Balkhy, la directrice régionale de l'OMS pour la Méditerranée orientale, qui a pris ses fonctions en février et s'est rendue du 11 au 16 mai dans ce pays confronté à de "multiples crises".
Elle a ajouté que près de la moitié du personnel de santé avait fui la Syrie, qui a connu 13 ans de guerre civile, de sanctions et le tremblement de terre majeur de l'année dernière, en plus d'une situation géopolitique complexe.
Conséquence : seuls 65% des hôpitaux et 62% des centres de soins sont pleinement opérationnels et ils souffrent tous d'une grave pénurie de médicaments et d'équipements, a-t-elle déploré.
Pour Mme Balkhy, "nous devons sortir des sentiers battus lorsqu'il s'agit de maintenir le personnel de santé, d'y attirer des jeunes, de les garder impliqués".
- Médecins "paralysés" -
Les employés de ce secteur perçoivent des "rémunérations très, très basses", si tant est qu'un salaire leur soit versé...
Et s'il n'y a pas de salle d'opération, d'anesthésie, d'infirmières professionnelles et d'unités de stérilisation à disposition, "à quoi cela sert-il d'avoir un chirurgien ?", demande-t-elle.
"Il faut ensuite disposer de médicaments. Si vous ne produisez pas vos propres médicaments et si vous ne pouvez pas les importer, le médecin est en quelque sorte paralysé".
"Il faut donc se contenter de pratiquer une médecine du IVe siècle, en cautérisant les gens et en les renvoyant à leur triste sort, soit essayer de trouver des solutions créatives".
Entre autres, il faudrait faire en sorte que les professionnels de la santé soient plus satisfaits de rester en Syrie ou de retourner dans leur pays, ce que beaucoup feraient "volontiers", selon Hanan Balkhy, "s'ils bénéficiaient d'un certain soutien".
"Ils apprennent l'allemand à l'école de médecine en parallèle afin d'être prêts à partir et c'est effrayant pour la région", regrette cette Saoudienne.
Elle a proposé d'engager les jeunes médecins dans des projets de recherche avec une possibilité de publication, afin qu'ils puissent "sentir qu'ils font quelque chose d'utile" et de s'assurer qu'ils "disposent au moins de l'équipement" nécessaire aux opérations chirurgicales.
Et comme les médecins ne peuvent pas se rendre à des conférences pour présenter leurs articles, ils doivent avoir accès à des plateformes virtuelles pour demeurer en contact avec la communauté internationale de la santé, estime Mme Balkhy.
- "Les enfants sont les plus touchés" -
Concernant les médicaments, elle suggère d'intensifier les achats groupés et de soutenir la fabrication locale de produits de base comme les analgésiques, les antibiotiques, et les remèdes pour soigner l'hypertension artérielle.
Cette responsable, qui était à Genève cette semaine pour la réunion du conseil exécutif de l'OMS, insiste sur le fait que les fréquentes coupures de courant en Syrie ont d'importantes répercussions sur la santé.
Il y a, souligne-t-elle, un nombre disproportionné de brûlures car les gens utilisent n'importe quoi, "des pneus, du plastique, du tissu", pour faire cuire la nourriture et réchauffer leurs maisons, provoquant des incendies domestiques et des lésions respiratoires, tandis que les arrêts récurrents dans l'alimentation en électricité font exploser les appareils ménagers.
"Les civils, les enfants sont les plus touchés", relève Hanan Balkhy, qui exhorte les pays donateurs à dissocier la santé de la politique et à s'impliquer à nouveau dans le financement de l'aide humanitaire à la Syrie.
"Je suis pédiatre de formation, la prévention est donc mon cheval de bataille", lance-t-elle.
P.E.Steiner--NZN