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Le Premier ministre Michel Barnier s'apprête à déclencher lundi l'article 49.3 sur le budget de la Sécurité sociale, au risque d'une motion de censure qui pourrait le faire tomber, à moins d'une dernière concession au Rassemblement national sur la revalorisation des retraites.
Le chef du gouvernement, qui a réuni ses troupes, les chefs de groupes du "socle commun" (LR, Horizons, MoDem et macronistes) en début d'après-midi à Matignon, leur a annoncé qu'il engagerait bien la responsabilité de son équipe sur ce projet, ouvrant la voie à la motion de censure annoncée par les oppositions.
La séance décisive à l'Assemblée a commencé à 15H00.
Dans la matinée, Michel Barnier s'était entretenu au téléphone avec la cheffe des députés RN Marine Le Pen, puis avait annoncé dans un communiqué un nouveau (et dernier ?) geste en direction du RN, en s'engageant "à ce qu'il n'y ait pas de déremboursement des médicaments" en 2025, alors que le gouvernement avait prévu de baisser de 5% le taux de remboursement.
Cette mesure faisait partie des concessions exigées par le RN. Mais pour Mme Le Pen, le compte n'y est pas: en arrivant à l'Assemblée dans l'après-midi, juste avant une séance cruciale, elle a réaffirmé qu'elle demandait au chef du gouvernement de renoncer à la désindexation des retraites s'il voulait échapper à la censure.
"On attend de voir la position du gouvernement" sur ce point: "s'ils ne bougent pas, on censure", a indiqué à l'AFP une source au RN.
Dans la matinée, plusieurs cadres du RN avaient déjà laissé entendre que le parti penchait clairement pour la censure. Pour le président du RN Jordan Bardella, il faudrait "un miracle de dernière minute" pour que le gouvernement ne soit censuré.
L'adoption d'une motion de censure serait une première depuis la chute du gouvernement de Georges Pompidou en 1962. Le gouvernement Barnier deviendrait alors le plus court de l'histoire de la Ve République.
La France s'enfoncerait encore plus dans la crise politique créée par la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin, avec en outre le risque d'une crise financière liée la capacité de la France à emprunter sur les marchés à de faibles taux.
"Nous appelons solennellement les oppositions à ne pas céder à la tentation du pire et donc à ne pas voter la censure du gouvernement", a dit sur X lundi le président du groupe macroniste à l'Assemblée Gabriel Attal. "La France a besoin de stabilité", a-t-il martelé en arrivant à l'Assemblée nationale.
"Si la censure est votée cette semaine, les Français devront se souvenir de cette alliance qui l'a rendue possible. Cette alliance de toute la gauche, y compris d'un Parti socialiste pour qui l'intérêt général n'est plus qu'un lointain souvenir, avec le RN", a prévenu l'ex-Premier ministre.
- Concessions au RN -
Mais pendant le week-end, le ministre des Comptes publics Laurent Saint-Martin, qui veut ramener le déficit autour de 5% du PIB en 2025 contre 6,1% en 2024, a soutenu le texte tel que validé par la commission mixte paritaire ayant réuni une quinzaine de sénateurs et députés.
"Revenir" dessus, "serait s'asseoir sur le Parlement", a-t-il expliqué.
Un casus belli pour le RN.
"Le gouvernement a exprimé son souhait de ne pas modifier le PLFSS, c'est extrêmement clair et nous avons pris acte de cela", avait réagi dimanche Marine Le Pen.
Marine Le Pen se voit en "empereur romain, qui va décider à la dernière minute s'il décide ou pas d'épargner le gladiateur", a résumé le député macroniste Roland Lescure. Mais "Marine Le Pen n'est pas Jules César, c'est plutôt Machiavel au petit pied qui joue avec l'argent des Français", a-t-il jugé.
L'exécutif a la possibilité d'amender le texte qui sera soumis au vote jusqu'au dernier moment.
La gauche, de son côté, semble spectatrice de grand marchandage. "La honte. Je n'oublierai jamais ce jour où un Premier ministre de la France, pour sauver sa peau, s'est senti obligé de passer la brosse à reluire à Marine Le Pen", a commenté l'écologiste Marine Tondelier.
Le groupe socialiste a cependant l'intention de déposer une motion de rejet préalable au PLFSS. Si celle-ci était adoptée, le texte reprendrait sa navette entre l'Assemblée et le Sénat.
Même s'il sortait indemne de cette première étape et échappait à la censure cette semaine, le Premier ministre LR doit encore faire adopter le projet de loi de fin de gestion de l'année en cours, moins emblématique, et le budget de l'Etat, actuellement en discussion. Au-dessus de l'examen de chacun d'entre eux plane un risque de censure.
leo-far-lum-gbh-ab/hr/ybl
P.E.Steiner--NZN