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Après deux reports, le groupe informatique français Atos, en pleine crise financière, dévoile mardi matin ses résultats annuels et les "prochaines étapes" de son plan de sauvetage, à la suite de l'échec de la vente d'une partie de ses activités qui devait lui apporter de l'argent frais.
La direction de cet ex-fleuron, censé assurer une large partie des opérations technologiques des Jeux olympiques cet été, avait proposé en 2022 un plan comprenant sa scission en deux entités: Tech Foundation, qui regroupe les activités historiques d'infogérance, et Eviden, qui comprend notamment les activités "big data" et sécurité (BDS), la pépite du groupe.
Mais l'avenir d'Atos, dont l'endettement affole les investisseurs — avec 3,65 milliards d'euros d'emprunts et obligations à rembourser ou à refinancer d'ici fin 2025 —, s'est un peu plus assombri avec le retrait d'Airbus des discussions pour l'acquisition de BDS la semaine passée.
Un échec survenu quelques semaines seulement après celui des négociations avec le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky pour la vente de Tech Foundations.
Le groupe avait tout de même dévoilé fin février quelques indicateurs de sa performance de 2023, au moment du premier report de la publication de ses résultats. Il avait alors évoqué un chiffre d'affaires de 10,7 milliards d'euros, pour un taux de marge opérationnelle (témoin de sa rentabilité) à 4,4%, contre 3,1% en 2022.
Autre élément très scruté: Atos avait souligné avoir consommé 1,08 milliard d'euros de cash l'an passé, un niveau globalement conforme à ses anticipations.
Alors qu'elle s'échangeait aux alentours de 15 euros fin juillet 2023, l'action a perdu plus de 80% de sa valeur, pour chuter sous les 2 euros, ramenant la valorisation de l'entreprise à moins de 200 millions d'euros.
- Changement de cap -
"Nous avons beaucoup d'inquiétudes sur l'avenir du groupe depuis plus de deux ans parce que nous avons des équipes dirigeantes qui se succèdent et qui sont incapables de gérer la situation", déplore auprès de l'AFP Fabrice Lorioux, délégué syndical Unsa au sein d'Atos.
"C'est compliqué, mais on ne désespère pas. On a beaucoup d'activités qui rapportent de l'argent, qui sont stables. Mais le problème, c'est qu'avec ce qu'il y a dans la presse, on a du mal à recruter, on perd des profils", ajoute-t-il.
Dimanche, David Layani, patron de Onepoint, premier actionnaire d'Atos, a dévoilé son plan pour sauver le groupe, appelant à "mettre fin immédiatement à tout projet de cession", dans un entretien au journal Le Figaro.
"Ce n'est pas au moment où l'on doit se réinventer et repartir qu'il faut vendre ses bijoux de famille", a plaidé le dirigeant du cabinet qui détient plus de 11% du capital.
"La société prend note des propos tenus par David Layani. (...) Ces propos n'engagent pas la société et son conseil d'administration", qui communiquera "en temps voulu sa position", a répondu lundi Atos dans un communiqué.
- "Protection des activités stratégiques" -
Mardi dernier, la CFE-CGC, premier syndicat du groupe, avait défendu le projet de David Layani, "le seul à répondre" aux objectifs de "survie" et de "croissance" de l'entreprise.
"C'est clair, net et précis. On a enfin quelqu'un qui ne raisonne pas seulement financièrement, mais avec un principe de développement industriel", salue Jérôme Loriot, secrétaire du comité social et économique central d'Atos France.
Alors qu'Atos possède des supercalculateurs, notamment utilisés dans la défense et le nucléaire, le ministère français de l'Economie Bruno Le Maire s'est engagé "à construire dans les prochaines semaines une solution nationale de protection des activités stratégiques".
"Sur la partie un peu plus souveraine [d'Atos], s'il y a un acheteur majoritaire et qu'il souhaite avoir [Bpifrance] en minoritaire, on regardera", a fait savoir lundi le directeur général de la banque publique d'investissement Nicolas Dufourcq, sur BFM Business.
"Mais la BPI ne peut être majoritaire, ça voudrait dire qu'on nationalise. Ce n'est même pas dans notre statut, dans notre mandat. Donc il faut qu’il y ait quelqu'un en face", a-t-il précisé.
Sans "solution industrielle qui préserve la totalité de l'actif, c'est le chaos et la fin d'Atos", a insisté David Layani dimanche, appelant à "agir vite, avant les JO-2024 et avant l'été".
A.P.Huber--NZN