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Le tendon d'Achille blessé et "le cœur brisé", la "Reine Yulimar" Rojas, championne olympique en titre et détentrice du record du monde du triple saut (15m74), a annoncé son forfait pour les JO-2024 dont elle était l'archi-favorite et une des stars attendues.
"Je ne pourrai pas participer aux Jeux Olympiques de Paris 2024. C'est avec beaucoup de douleur et de tristesse que je veux vous dire" qu'à la réception d'un saut "j'ai eu une douleur intense, diagnostiquée comme une blessure au tendon d'Achille gauche", écrit-elle dans un message sur Instagram, postant une photo d'elle allongée sur son lit d'hôpital. L'athlète de 28 ans a été opérée dans une clinique de Madrid.
Quadruple championne du monde en plein air et triplement sacrée en salle, athlète de l'année en 2020 et 2023, championne panaméricaine, d'Amérique du sud, multiple vainqueure de la Ligue de diamant, la "Reine Yulimar" paraissait invincible et seule une blessure semblait pouvoir l'empêcher de s'envoler vers un deuxième titre consécutif aux JO.
Entraînée par la légende cubaine du saut en longueur Ivan Pedroso, Yulimar et ses longues jambes, étaient même à l'étroit dans sa discipline, envisageant de doubler à Paris avec la longueur même si elle n'avait pas encore pu réaliser le minima.
- Quartiers défavorisés -
Le Venezuela perd une légende de son sport, et les Jeux, dont elle était une des grandes attractions, perdent une vedette, qui rayonne sur la piste mais aussi en-dehors. Yulimar était un des visages les plus célèbres de l'athlétisme depuis la retraite du jamaïcain Usain Bolt. Discrète sur ses relations privées, elle défend fièrement son homosexualité et la communauté LGBT+.
Au Venezuela, ses exploits sont peints sur d'immenses fresques, ses photos ornent de nombreux murs et ses publicités à la télévision ou sur des affiches sont omniprésentes. Elle est la seule femme et la seule en athlétisme à avoir remporté l'or olympique pour le Venezuela, qui compte trois autres champions hommes dans d'autres sports.
Parmi ceux-là, Ruben Limardo, sacré à l'épée en 2012 qui sera présent à Paris, lui a apporté son soutien: "Toute la délégation t'accompagnera à Paris, Yuli, et chaque pas que nous ferons, nous le ferons en pensant que tu es avec nous, corps, âme et cœur. Guerrière, tu peux te relever et voler à nouveau!"
Le président vénézuélien, Nicolas Maduro, a également réagi: "Tout mon amour, ma solidarité, mon soutien. Nous t'aimons et nous connaissons ton engagement et ta discipline. Tu es un guerrière de la vie, un exemple pour la jeunesse".
Basée en Espagne, Yulimar Rojas est sortie des quartiers défavorisés de la banlieue de Puerto La Cruz (300 km de Caracas) pour bondir vers la gloire. Elle a longtemps vécu dans une petite demeure, noyée dans un océan de maisonnettes coiffées de toits en tôle.
"On a élevé Yuli dans cet univers humble avec beaucoup de problèmes. Elle s'est élevée, élevée, élevée...", se souvenait fièrement sa mère Yuleisi Rodriguez, interrogée par l'AFP avant les Jeux de Tokyo.
- "Bonne en tout" -
"Depuis petite, elle est bonne en tout: kickball (baseball au pied), softball, basket, foot", assure son beau-père Pedro Zapata, ancien boxeur professionnel.
Forte de sa détente, elle se consacre surtout au volley, mais l’entraîneur Jesus Velasquez la convainc de passer à l’athlétisme. Bonne en sprint et en sauts, Rojas était au début une spécialiste de la hauteur.
Et puis, "un jour, j'entraînais des plus jeunes au triple-saut, elle est venue l'air de rien... Là, elle a sauté... 12 mètres", raconte ce dernier.
Traités de "fous", Rojas et Velasquez passent alors au triple alors que Yulimar avait déjà remporté l'or en hauteur aux Jeux sud-américains de 2014.
"Je suis tombée follement amoureuse du triple. C'était la meilleure décision de ma vie", affirmera-t-elle.
En 2015, sa vie prend une nouvelle dimension lorsque Facebook lui propose Ivan Pedroso, comme "ami". Elle lui envoie un message, lui disant qu'il est son idole. À sa grande surprise, la star cubaine lui propose de travailler avec elle, au FC Barcelone où il officie.
La triple-sauteuse entame une irrésistible ascension. Vice-championne olympique à Rio, elle truste les titres mondiaux jusqu'à son chef d'oeuvre de Tokyo: or olympique et record du monde (15,67 m). Record qu'elle porte à 15,74 m à Belgrade moins d'un an plus tard.
Paris lui tendait les bras et ses lauriers, le sort a brisé son tendon d'Achille et son nouvel envol vers les sommets.
L.Muratori--NZN