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Pneus non-chauffés, danger assuré ? Destinée à garantir une adhérence rapide des voitures en piste, la chauffe des pneus a été interdite pour la 92e édition des 24 Heures du Mans ce week-end, une décision qui se veut écologique mais qui divise, ses détracteurs dénonçant un problème de sécurité.
"Je vais être franc: je ne pense pas que le pneu ait été développé pour démarrer à froid, si les conditions de course sont mixtes - ou la nuit très froide, c'est dangereux", dénonce Paul Di Resta, interrogé par l'AFP sur l'un des principaux sujets qui agite le paddock des "24 Heures".
Parmi les farouches opposants à la mesure, le Britannique de chez Peugeot dans la catégorie reine des Hypercars estime que "du temps et du développement" auraient été davantage nécessaires afin de développer des pneus plus sûrs.
"Quand on sort des stands et que l'adhérence est incertaine, que les GT (catégorie inférieure où les voitures sont moins performantes) pilotées par des pilotes moins bien classés se rapprochent de nous alors que nous ne sommes pas vraiment en total contrôle, je ne pense pas que ce soit la bonne chose", explique-t-il.
Fin mai, les pilotes Ferrari avaient eux aussi pointé du doigt la décision : "nous devrions reconsidérer la question parce que la sécurité n'est pas assurée à 100%", avait asséné Miguel Molina, interrogé par le site spécialisé Autosport.
"Affronter la nuit avec des pneus froids sera assez difficile", avançait Antonio Giovinazzi, vainqueur de la dernière édition au volant de sa Ferrari 499P N.51. "C'est une inconnue et une préoccupation que nous avons tous - pilotes et équipes".
- "Ne pas crier au scandale" -
"Quand les pneus sont froids, c'est effectivement plus difficile à piloter", explique Nicolas Lapierre, pilote Alpine. "Après, le règlement est ce qu'il est et en tant que pilote, on essaie juste de faire au mieux, mais c'est sûr que ce n'est pas facile", poursuit le Français.
L'interdiction de la chauffe des pneus, qui vaut depuis 2023 sur l'ensemble des manches du WEC - le championnat du monde d'endurance auto dont font partie les 24 Heures du Mans -, a été décidée afin de limiter son impact environnemental.
L'an dernier, quelques semaines avant l'édition du centenaire de la course, la Fédération internationale de l'automobile (FIA) et l'Automobile Club de l'Ouest (ACO), organisateurs de la course, avaient toutefois fait volte-face pour la légendaire épreuve mancelle après la grogne des équipes.
Les deux instances avaient finalement autorisé les équipes à chauffer leurs pneus afin d'"assurer aux pilotes de tous niveaux d'expérience la possibilité de courir dans un environnement le plus sécurisé possible, quelles que soient les conditions de piste ou de température".
"Il n'y a pas à crier au scandale", tempère aujourd'hui le Français de chez Cadillac Sébastien Bourdais. "On a vu les Porsche, notamment au Qatar, être capables de mettre les pneus en régime à une vitesse incroyable, si c'est le cas ici, ça risque de les avantager".
Porsche semble effectivement bien moins remonté que ses concurrents quand on interroge ses pilotes : "c'est du sport auto au final, les voitures sont +safe+, beaucoup plus qu'avant", défend le Français Kévin Estre. "En pneus froids, on a moins de grippe, certes - mais quand il pleut, on a moins de grippe aussi et on se débrouille (...) il faut arrêter de pleurer et juste mettre son casque et rouler".
Si le constructeur allemand semble donc avoir une longueur d'avance sur la concurrence, "Toyota et Ferrari ne se contentent pas d'être performants sur la piste, ils optimisent également les pneus lorsqu'ils sont froids", rappelle aussi Ferdinand Habsburg, l'un des six pilotes Alpine engagés en Hypercar. "A nous donc de nous améliorer considérablement".
Le départ des 24 Heures du Mans, la course la plus longue du calendrier du WEC, sera donné samedi à 16h00 (14h00 GMT) par Zinédine Zidane. Avant cela, les 62 équipages ont pris la piste mercredi pour les premiers essais.
O.Meier--NZN