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Un épisode précoce de très fortes chaleurs en provenance du Maghreb frappait vendredi le sud de l'Europe, particulièrement le sud-ouest de la France, où des records de température sont attendus samedi au dessus de 40 degrés, mais aussi l'Espagne toujours aux prises avec plusieurs incendies.
"C'est la vague de chaleur la plus précoce jamais enregistrée en France" depuis 1947, selon Matthieu Sorel, climatologue à Météo-France, y voyant un "marqueur du changement climatique". Et ce n'est pas fini: Météo-France avertit que "samedi après-midi, la chaleur s'accentuera encore" dans l'ouest du pays et "des records absolus pourraient alors tomber".
Des records pour un mois de juin ont déjà été battus vendredi dans au moins 13 communes, avec notamment 40,4°C à Carcassonne, dans le sud de la France.
La multiplication des vagues de chaleur en Europe est une conséquence directe du réchauffement climatique. Les émissions de gaz à effet de serre accroissent la puissance, la durée et le rythme de répétition des vagues de chaleur, selon les scientifiques.
En France, la canicule s'étend à la quasi-totalité du pays et 14 départements du sud-ouest ont été placés en vigilance rouge. Les écoliers et collégiens de ces zones ont pu rester chez eux vendredi.
- "Hôpital évidemment saturé" -
"Nous sommes dans un épisode de canicule très précoce, un épisode fort qui dure un peu plus que prévu", a déclaré la ministre française de la Santé Brigitte Bourguignon, lors d'un déplacement dans une maison de retraite dans le sud-ouest, ajoutant que "l'hôpital est évidemment saturé, mais répond à la demande".
La Première ministre Elisabeth Borne a insisté sur les consignes de prudence et de prévention pour les personnes vulnérables. Les pouvoirs publics sont particulièrement vigilants depuis une vingtaine d'années, tirant les leçons de la canicule historique de 2003 qui avait fait plus de 15.000 morts en France, surtout parmi les personnes âgées.
Et les habitants modifient leurs habitudes pour s'adapter, comme Daniel Toffaloni, 64 ans, agriculteur près d'Elne, dans le département des Pyrénées-Orientales, frontalier de l'Espagne.
"J'attaque au lever du jour jusqu'à 11h30, et après je peux travailler le soir, avant la tombée de la nuit", souligne-t-il. Dans ses serres où il cultive des tomates, la température peut atteindre 55°C l'après-midi.
Effet secondaire classique des épisodes de chaleur, la concentration d'ozone dans l'air est en nette augmentation sur une grande partie de la France, selon le bulletin officiel Prev'Air publié vendredi.
- Evacuations en Espagne -
En Espagne, les pompiers continuaient de lutter contre plusieurs incendies vendredi à travers le pays, frappé par une vague de chaleur exceptionnelle depuis près d’une semaine, avec des températures dépassant parfois les quarante degrés.
Plus de 3.000 personnes ont ainsi été évacuées du parc d'attractions du Puy du Fou Espagne, dans le centre du pays, en raison d'un violent incendie à proximité du site.
Au total, "2.500 visiteurs et 700 employés" ainsi que "200 oiseaux et 55 chevaux" ont été évacués mais personne n'a été blessé ni même "mis en danger", selon la direction du parc.
L'incendie le plus dévastateur, attisé par des "vents changeant" de direction et "la chaleur", a brûlé près de 9.000 hectares dans la Sierra de la Culebra (nord-ouest), selon les autorités régionales de Castille-et-Léon.
Dans le nord-est, la région de Catalogne fait face elle aussi à plusieurs incendies. Le plus grave s'est déclaré près de Baldomar, dans la province de Lérida, où le feu a détruit plus de 940 hectares de forêt, selon le gouvernement régional.
Cette vague de chaleur, inhabituelle à ce stade de l'année en Espagne, a entraîné une explosion des températures, avec des pointes allant jusqu'à 43 degrés, et devrait durer jusqu'à samedi.
Dans le nord de l'Italie, la Lombardie se prépare à déclarer l'état d'urgence face à une sécheresse record menaçant les récoltes et l'eau est déjà rationnée dans plusieurs villes de la Plaine du Po. Cette région, qui abrite d'importantes cultures, affronte sa pire sécheresse depuis 70 ans.
- "Agir maintenant" -
L'Organisation des nations unies (ONU) a appelé vendredi à "agir maintenant" contre la sécheresse et la désertification afin d'éviter des "désastres humains".
"Il est temps d'agir: chaque action compte", a déclaré le secrétaire exécutif de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification (CNULCD), Ibrahim Thiaw, lors d'une conférence à Madrid à l'occasion de la journée mondiale de lutte contre la sécheresse.
Pour les scientifiques, la multiplication, l'intensification et l'allongement des canicules, aggravés par les émissions de gaz à effet de serre, constituent un marqueur sans équivoque du réchauffement climatique.
Les conséquences de ce dérèglement sont nettes, pointent-ils : incendies jusqu'en Sibérie, fonte de la banquise en Arctique, sécheresses, températures records sur tous les continents, cyclones et autres événements climatiques extrêmes.
R.Bernasconi--NZN